Blow Up a écrit :
Houlala ça rame dure, tant de circonvolutions et de HS pour revenir au point de départ.
Les protestants n'ont pas inventé le religieux sans sacrements ou la religion sans sacré (je ne sais pas comment ils se démerdent d'ailleurs en Suisse avec les germanophones qui n'ont qu'un seul mot pour saint et sacré).
On est dans le sens premier du mot religieux qui signifie relier. Et en prêtant serment sur le vieux bouquin mythologique, le concerné fait un acte de communautarisme religieux (sans sacré, mais c'est pareil).
D'ailleurs le blasphème est toujours un délit en Suisse, les premiers mots de la Constitution sont " Au nom de Dieu Tout-Puissant ! " et les cantons peuvent choisir de voter pour avoir une religion officielle. On a vu mieux comme pays sécularisé
D'ailleurs la Suisse n'est pas un Etat laïc. Les signes religieux ne sont pas interdit à l'école ou dans l'administration.
La laïcité francaise c'est la solution politique d'une nation ayant une religion charismatique, incapable d'instituer une autorité sans appeler à la transcendance. Mais c'est incompatible avec un Etat moderne démocratique. Elle sépare donc le temporel et le spirituel de façon à masquer les signes du sacré, à les rendre invisibles. Mais le sacré continue d'iriguer la légitimité du pouvoir, les rites républicains, l'homme providentiel, etc.. Malgré les dénégations, le religieux est encore au coeur de l'Etat francais qui est un des pays au monde qui parle le plus et tout le temps de l'islam (et plus largement de tous les sujets réactionnaires religieux: suicide assisté, mariage pour tous, drogue) sans être sous la charia ou une autre constitution révélée.
Le protestantisme luthérien mais surtout calviniste (et de Viret, Zwingli) est basé sur une intériorisation du spirituel: il n'y a plus de sacré ici bas. L'autorité est donné par son oeuvre, le travail, l'épreuve. Le marxisme est l'enfant moderne du protestantisme, pas du républicanisme catholique. La mutation moderne du catholicisme, c'est Saint-Simon. L'universel de Hegel, c'est autre chose que l'universel de Comte. Bref il y aurait à dire sur cette prétention universaliste.
Quant aux anglo-saxons, on est encore sur autre chose: ni religion du rituel et de l'exhibition du pouvoir, ni religion de l'oeuvre et du salut, mais religion de la communauté, du groupe. L'évangélisme américain ou anglican est charismatique. Mais sur d'autres points, le puritanisme typiquement, il se rapproche du protestantisme. C'est impossible de réduire à l'un ou l'autre, il y a trois figures au minimal. Un président américain qui jure sur la bible, ça ressemble plus à un président francais qui nous fait son show au panthéon qu'un chef d'État danois, norvégien, allemand ou suisse qui choisit de prêter serment sur la bible: ce dernier ne tire aucune légitimité de cette action qui ne scelle rien. Il n'y a rien de sacré dans cette opération qui est fondamentalement personnelle, de l'ordre de l'hygiène individuelle de vie si j'ose dire, et surtout absolument facultative (dans beaucoup d'endroits cela se fait de plus en plus rarement).
Ce que je veux dire par là c'est que la France est bien plus liée au religieux qu'elle ne veut le dire et que beaucoup de pays d'europe continentale. Elle connaît le sacré (République) comme peu de pays occidentaux. C'est un fait visible si on analyse la struture de l'autorité et les manifestations de la transcendance dans l'exercice du pouvoir.
Donc les confusions entre modèles, les leçons de laïcité, etc.. J'ai quand même lu un tel paquet de conneries que je me suis un peu perdu et j'ai effectivement ramé un peu pour mettre l'ordre dans cette confusion à la Onfray. Mais surtout:
J'ai cité 3 modèles. C'est parce que je n'ai pas les compétences et le temps pour développer au-delà . Je n'ai pas mentionné d'autres solutions politiques qui ont été élaborées pour lier autorité et religion, le kemalisme, la démocratie chrétienne, le modèle marocain, la charia, etc.. Mais elles sont nombreuses en réalité, les variantes possibles. Je suis toujours amusé de voir des personnes imaginer détenir un modèle versus le reste du monde (moi vs les autres). C'est pas un trait uniquement français, mais quand même souvent, vous avez de la peine avec le pluralisme.
Vous battez pas, je vous aime tous