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- Publié par
fab38 le 27 Fév 2023, 09:31
On dirait que le découragement pointe le bout du nez chez certains... Allez, du nerf, que diable, la musique qu'on aime écrire et jouer vaut bien le coup par rapport à tout le temps passé à faire des conneries dans notre vie!
Ma petite expérience, c'est qu'il n'y a pas de règles. Des choses arrivent quand on ne s'y attend pas (le membre du groupe qui change de boulot et quitte la région, la rencontre d'autres musiciens qui te proposent un plateau à partager et qui booste le groupe qui ronronnait à s'en décrocher les maxilaires, la pédale achetée qui d'un seul coup te donne un son improbable à la base d'un morceau, etc...), d'autres n'arriveraient jamais si on ne poussait pas pour qu'elles arrivent, et d'autres n'arrivent jamais même si on pousse comme un malade.
Comme certains l'ont déjà noté, le minimum pour jouer en groupe c'est que le "contrat" soit clair : sur les objectifs communs, sur la gestion quotidienne, sur le niveau d'exigence, sur l'image (c'est con, mais tu fais pas un concert sans qu'on te demande une photo, et même si c'est le dernier de mes soucis, j'ai pas envie d'envoyer une image qui ne me corresponde pas - idem pour la scène), bref sur tout ce qui fait la vie d'une "petite famille temporaire" en fait.
Personnellement, j'ai toujours le cul entre deux chaises : j'écris et enregistre/programme quasiment toutes les parties de tous les morceaux, car c'est mon groupe. Je veux dire par là le groupe que j'ai souhaité monter, avec les sons que j'aime et le type de morceaux que j'aime. Il y a des règles claires (pas de solo de guitare, pas de poses de rockeurs "standard" sur scène, j'ai le dernier mot sur ce qui est posté, aussi bien en terme de visuels que de musique), mais j'ai appris peu à peu à calmer ma dictature-attitude, et j'accepte maintenant les idées des autres. Pas toutes, mais certaines. Du moment que les règles ne sont pas transgressées.
Ca peut paraître rigide, mais honnêtement ça marche bien : j'ai été clair dès le début, ils ont eux aussi su être clairs quand ils avaient des choses à dire, et je pense qu'on a trouvé notre équilibre. On se fait mutuellement confiance, mais pas aveuglément.
On a tous la cinquantaine, on sait qu'on ne vivra pas de la musique, on ne se la joue pas "attitude d'artistes" (qu'est-ce que je déteste le petit milieu musical urbain qui se la pète et qui bave sur les autres!), seule la musique est importante. Et quand on joue en concert, on se prépare sérieusement et on est motivés pour présenter notre univers de façon sérieuse et humble. C'est vraiment ça qui nous guide, le reste n'est que pipeau je pense.
Quand je dis que j'ai le cul entre deux chaises, c'est que j'aime à la fois tout maîtriser (même si je me soigne sous la contrainte des autres), mais que j'avoue prendre un pied pas possible à jouer nos morceaux en groupe. L'énergie du jeu en groupe, c'est quand même quelque chose d'irremplaçable quand ça se passe bien. Et ça permet aussi de se rendre compte que certains morceaux sont très bien enregistrés d'une certaine façon, mais doivent être joués différemment en live pour avoir de la gueule dans un set.
Par exemple, nous avons fait une résidence hier pour préparer un concert début avril, et j'ai pris un pied pas possible sur un des morceaux : je jouais, je chantais, et en même temps je me disais "Enfin, on a trouvé comment le faire sonner". Le pied intégral.
Donc oui, on peut tout faire seul devant son ordi et sa MPC avec tout plein de technologie, mais on perd quand même tout un aspect du plaisir de faire de la musique, qui est le partage instantané avec d'autres êtres humains.
Après, il y a des phases où on envie d'être seul car les autres être humains c'est chiant à gérer. Mais il faut pas que ça dure trop longtemps car sinon on devient grincheux, et on régresse musicalement.
Bref : il faut lutter, il faut du courage, mais ça vaut le coup. Tout en sachant que ça s'arrêtera un jour.