PP a écrit :
ça me fait un peu flipper quand on commence à
comprendre le terrorisme.
c'est pas inintéressant ce que tu écris, et je ne sais pas si tu as tort ; j'espère en tout cas, parce que je me trouve en presque total désaccord ; il me semble notamment que c'est l'islamisme radical et hélas le terrorisme qui s'ensuit qui provoquent le "déséquilibre profond" dont tu parles, par la rupture assumée et progressive des terrains d'entente sur le vivre-ensemble "à la française" (question du voile notamment) et pour aller plus loin par son abondante imagerie de haine mortifère et la fascination qu'elle exerce sur esprits en rupture ou en recherche de transgression ; c'est pour cela qu'abonder dans un sens victimaire me semble une terrible et regrettable erreur, notamment quand on a la charge d'éduquer ou d'instruire des jeunes.
Il ne s'agit pas d'excuser, mais de comprendre. Pendant des décennies la lutte contre la drogue a considéré les drogués comme des responsables, des pervers, des délinquants, des gens mauvais en soi et l'épidémie n'a cessé de prendre de l'ampleur. La répression ne parvenait pas à juguler le phénomène. Au milieu des années 1990, en Suisse, face aux problèmes d'une toxicomanie devenue complètement ingérable, on a changé de regard, on s'est mis à essayer de comprendre. La drogue a cessé d'être le diable dont se saisissent des individus malintentionnés. Elle est devenue un symptôme d'autre chose. On s'est intéressé aux conditions de vie des toxicomanes, on a arrêté de considérer la drogue comme seul et principal problème de ces gens. L'abstinence n'était plus la priorité et pourtant les résultats ont été époustouflants. J'ai commencé à travailler dans l'évaluation de cette nouvelle politique de la drogue en Suisse, au tournant 2000. État de santé, intégration, morbidité, incidence, etc.. tout s'améliorait de façon impressionnante. Le rapport avec notre sujet: on nous reprochait d'excuser, de victimiser. Le débat était violent. Pourtant, tous les pays d'Europe nous ont emboité le pas à partir des années 2000... même la réactionnaire (en matière de stup) France. Je suis conscient qu'il s'agit d'un travail perpétuel, contre notre nature religieuse si j'ose dire (le mal c'est l'impur, son contact est polluant). En effet, on remarque que depuis quelques années on vit un retour de la réaction en matière de politique des drogues (pas partout, pas au même rythme, tous ces mouvements sont cycliques et désynchronisés). Et qu'est-ce qu'on observe dans ces pays qui remettent actuellement la répression en avant: une recrudescence des problèmes de drogues!
Tu parlais d'éducation. Mon exemple illustre de façon claire pour moi, que les conduites abominables que peuvent avoir certains ne sont pas inscrites dans une idéologie : il ne suffit pas et il n'est pas nécessaire de lire le Coran pour devenir un candidat aux 37 vierges, comme il ne suffit pas et il n'est pas nécessaire de prendre une drogue pour devenir complètement addict. Il faut un terrain, des conditions individuelles et sociales très spécifiques pour que ce geste, complètement aberrant de notre point de vue, devienne sensé. Et ce sont ces conditions qu'il s'agit de comprendre.
Vous battez pas, je vous aime tous