Le revenu de base inconditionnel : parlons-en

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jules_albert
pour expliquer la mentalité terriblement limitée des "citoyennistes" et autres gauchistes alter-mondialistes, il faut en revenir à une analyse élémentaire. les "citoyens" d'aujourd'hui se déplacent en automobile, travaillent avec des ordinateurs, se distraient dans des centres commerciaux et signent des hypothèques. mais en même temps, ils créent les relations sociales de l'environnement où ils travaillent, se déplacent, s'endettent et se distraient.

ils créent aussi les catégories abstraites de ces mêmes relations : "citoyenneté", "démocratie", "mouvement social", "état de droit", "sécurité citoyenne", etc. eh bien, ces catégories, ces idées, n'ont pas toujours existé : elles sont historiques et elles correspondent à la façon qu'a une classe sociale bien determinée de décrire une situation sociale qui commence à lui devenir hostile. ou dit autrement : ces catégories correspondent à la conception du monde de cette classe au moment où celui-ci s'écroule.

le problème pour cette classe sociale qui n'en est pas une - la classe moyenne moderne - apparaît lorsqu'elle veut transformer ces catégories, fruit des relations capitalistes à un moment historique donné, en vérités intemporelles et universelles.

la classe en question, la classe moyenne moderne, reste enfermée dans son horizon limité incapable de comprendre ce qui se passe. et elle ne veut pas que cet horizon soit dépassé par qui que ce soit. elle désire les conditions de vie néocapitaliste sans ses conséquences. l'erreur provient du fait que pour la classe moyenne, l'homme de la rue, l'individu moyen déclassé - le pacifique et petit-bourgeois contemporain baisé de tous les côtés - est l'être social par excellence. elle ne peut imaginer une société sans une majorité d'hommes et de femmes communs, dociles, braves électeurs et frustrés.

au lieu de voir dans les crises actuelles, le conflit insoluble entre forces de destruction incontrôlées et relations sociales chaque fois plus inhumaines, au lieu de voir le violent état de siège qui approche, nos "indignés" voient des problèmes qui sont résolus par des formules magiques du genre "revenu basique inconditionnel", "développement durable", "crédit aux entrepreneurs", "décroissance" ou "démocratie participative", formules qui doivent être mises en place par l'état. pour changer la société réelle, il suffirait de changer les formules actuelles par de nouvelles, sans toucher à l'état, ni subvertir les relations sociales au moyen d'une révolution.

une de ces formules magiques est la "démocratie économique", à savoir, un parlement plus diversifié avec un gouvernement assez fort pour que l'état passe de serviteur à superviseur du capitalisme. sur le caractère qu'adoptera l'état après cette transformation magique, il y a plusieurs points de vue : les uns prétendent transformer l'état en super-employeur et grand financier, dans le style stalinien. d'autres, en simple moteur de l'économie, dans le style social-démocrate.

quoi qu'il en soit, l'état citoyenniste est devenu la marotte des nouvelles classes moyennes (et du prolétariat déclassé et domestiqué) lorsque la paix sociale qu'ils offraient en échange d'une place au soleil de la consommation est devenue trop chère pour le capital.

les grandes transformations socio-économiques des 20 dernières années ont supprimé en grande partie l'intégration dans le marché du travail des enfants issus de la classe moyenne et mis un terme à ses aspirations de promotion sociale. pourtant, les enfants des classes domestiquées ne veulent plus briser les chaînes de classe comme en 1968, mais au contraire les renforcer. aujourd'hui, il semblerait que la liberté dépende du fait d'avoir un salaire, pas d'en finir avec la travail salarié ; d'accéder à une hypothèque, au lieu d'abolir l'argent ; d'être sous la tutelle de députés, pas de dissoudre les parlements ; de demander la protection de l'état, au lieu de le détruire.

cette contradiction se répète lors de toutes les époques grosses d'un conflit social : les classes en décomposition n'ont jamais accepté de se prolétariser, ce qui fait qu'elles adoptent des idéaux et des consignes propres à leur période ascendante ; mais leur fonction a disparu et leur futur n'existe plus.

la vraie question est de savoir si la décomposition de ce conglomérat de 10 ou 12 millions d'électeurs progressistes qui alimentait le système de partis "de gauche" servira à allumer les feux de la lucidité d'où sortira le sujet révolutionnaire qui exécutera la sentence contre l'intolérable société capitaliste ou si, au contraire, elle alimentera les illusions suicidaires sur la réformabilité du régime.

le problème fondamental est celui de la conscience, qui dans ce cas passe par la mémoire. pour que se réalise dans la société un projet de désertion et d'auto-défense, le passé révolutionnaire doit faire acte de présence. la rencontre du sujet révolutionnaire contemporain avec ses racines historiques rendra possible le retour des classes dangereuses sur le devant de la scène sociale.



bibliographie : miguel amoros, "salida de emergencia".
Sans valeur marchande : https://debord-encore.blogspot(...).html

La peste citoyenne. La classe moyenne et ses angoisses : http://parolesdesjours.free.fr(...)e.pdf
Invité
Tres bon ça Jules Albert. C'est de toi? OU tu nous a fais présent d'une traduction maison de l'auteur que tu cites a la fin?

En tout cas merci. La classe moyenne me débecte moderne, plus que la classe haute qui a au moins pour elle la constance.

Cela dit je suis assez contre le projet révolutionnaire en soi.
Il faut quitter le système électif, c'est la source de beaucoup de maux et une imposture intellectuelle dont le succès me laisse rêveur.
jules_albert
liolio, je pars du fameux principe que tout texte peut être librement reproduit, traduit ou adapté, même sans indication d'origine. dans ce cas, l'origine est indiquée...

quant à la classe moyenne en décomposition, comme le rappelle miguel amoros, l'histoire montre qu'elle a toujours exigé des gouvernements autoritaires. l'arrivée prochaine de catastrophes écologiques sans pareil (les échéances de la dette du capitalisme envers la nature vont survenir de plus en plus violemment) devrait donc servir à l'avénement d'un pouvoir écolofasciste visant à préserver le capital et l'état à tout prix.

mais en menant la bataille de façon conséquente, les partisans d'un changement radical et libertaire pourraient changer le cours des choses. rien n'est joué, les rêves de liberté, l'utopie, sont encore possibles et réalisables.
Sans valeur marchande : https://debord-encore.blogspot(...).html

La peste citoyenne. La classe moyenne et ses angoisses : http://parolesdesjours.free.fr(...)e.pdf
mabuto
  • mabuto
  • Special Méga utilisateur
Très interessant. De mon regard et a court terme, l'idée de citoyennisme est la plus réaliste. L'appel à la citoyenneté et le premier jalon vers l'idée plus forte de patriotisme. Le départ des fortunes à l'étranger pourrait être limitée par le risque de sanctions liées au caractère anti patriotique d'une evasion fiscale massive (suppression identité française, confiscation de biens, radiation de la sécurité sociale ou interdiction de territoire = ca calme).

" aujourd'hui, il semblerait que la liberté dépende du fait d'avoir un salaire, pas d'en finir avec la travail salarié ; d'accéder à une hypothèque, au lieu d'abolir l'argent ; d'être sous la tutelle de députés, pas de dissoudre les parlements ; de demander la protection de l'état, au lieu de le détruire.

cette contradiction se répète lors de toutes les époques grosses d'un conflit social : les classes en décomposition n'ont jamais accepté de se prolétariser, ce qui fait qu'elles adoptent des idéaux et des consignes propres à leur période ascendante ; mais leur fonction a disparu et leur futur n'existe plus"
excellent!

Beaucoup se retrouveront la dedans. Le culte de la personnalité allié à l'individualisme ont leur part de responsabilité dans le refus d'une partie de la classe moyenne d'accepter sa condition de prolétaire tout juste bon à entretenir le consumérisme ou l'ordre établit. Ce quantasoi médiocre entretien le mensonge quotidien de se penser libre. Sinon, pourquoi voir un facebook? des vêtement de marque? ou se suicider pour cause de licenciement? J'ajouterai que la dimension sexuelle renforce le capitalisme et plus particulièrmeent, la féminisation.

Au passage, lorsque vous rencontrez une connaissance, la première question sera : que deviens-tu? Que fais-tu?
Cela se résume à demander : quelle est ta place dans la socièté? Combien tu gagnes? Es-tu interessant?
Rarement, en dehors des copains et de la famille on vous demande : comment vas-tu? !! je le constate presque tout les jours.
"La musique souvent me prend comme une mer."
"La vraie musique suggère des idées analogues dans des cerveaux différents."
Charles Baudelaire
JHEX
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  • Publié par
    JHEX
    le 06 Sep 2012, 13:21
mabuto a écrit :

Au passage, lorsque vous rencontrez une connaissance, la première question sera : que deviens-tu? Que fais-tu?
Cela se résume à demander : quelle est ta place dans la socièté? Combien tu gagnes? Es-tu interessant?
Rarement, en dehors des copains et de la famille on vous demande : comment vas-tu? !! je le constate presque tout les jours.


Pas faux. Une question qui m'a toujours emmerdé et qui survient assez rapidement après avoir échangé deux ou trois phrases avec quelqu'un: "Et tu fais quoi toi?"

Traduction: quel est ton job, t'es dans quoi, qu'est-ce que tu étudies?
"Aucune idée sur terre est digne d'un trépas
Il faut laisser ce rôle à ceux qui n'en ont pas"
mabuto
  • mabuto
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peut-être l"instinct de survie...
"La musique souvent me prend comme une mer."
"La vraie musique suggère des idées analogues dans des cerveaux différents."
Charles Baudelaire
Dans les cercles chics et élégants que je fréquente... Il n'y a pas pire faute de gout, que de questionner quelqu'un sur son travail ou sa position sociale, c'est pratiquement une insulte (la communication phatique des ploucs, il n'y a rien de pire et du plus inélégant)... Ou encore plus grave... parler d'argent (sauf quand le dealer débarque, bien sur)
mabuto
  • mabuto
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faut croire qu'il y'a un paquet de ploucs...
"La musique souvent me prend comme une mer."
"La vraie musique suggère des idées analogues dans des cerveaux différents."
Charles Baudelaire
Invité
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HenryWotton a écrit :
en tant que patron... le plus compliqué, c'est de trouver des mecs compétant pour bosser a ta place...


C'est un point de vue... Tu l'as toujours ta boîte ?

mabuto a écrit :
Au passage, lorsque vous rencontrez une connaissance, la première question sera : que deviens-tu? Que fais-tu?
Cela se résume à demander : quelle est ta place dans la socièté? Combien tu gagnes? Es-tu interessant?


Quand j'ai monté mon "affaire", des anciens profs m'ont tout à coup ajouté sur Facebook... Je devenais intéressant car "chef d'entreprise".

Quand ils ont su que ce n'était que "fabrication et réparation d'instruments de musique", certains m'ont viré...
Invité
jules_albert a écrit :
ici ou là-bas, bourgeois ou bureaucratique, libéral ou totalitaire, occidental ou tiers-mondiste, l'état est toujours ce qui est fondamentalement extérieur aux peuples, comme ce qui leur est complètement étranger.
là où il y a état, il n'y a que des esclaves.

Au passage ca me fait penser a des citations de Tocqueville.

Citation:

Si quelqu'un me montrait entre l'indépendance complète et l'asservissement entier de la pensée une position intermédiaire où je puisse espérer me tenir, je m'y établirais peut-être ; mais qui découvrira cette position intermédiaire ?

J'aime bien l'ironie qu'il y a dans celle la.

Celle la a de quoi faire flipper un paquet de plot theorists:
Citation:

l y a aujourd'hui sur la terre deux grands peuples qui, partis de points différents, semblent s'avancer vers le même but : ce sont [les Anglo-Américains et les Russes.
[...]
Pour atteindre son but, le premier s'en repose sur l'intérêt personnel, et laisse agir, sans les diriger, la force et la raison des individus.
Le second concentre en quelque sorte dans un homme toute la puissance de la société.
L'un a pour principal moyen d'action la liberté ; l'autre, la servitude.
Leur point de départ est différent, leurs voies sont diverses ; néanmoins, chacun d'eux semble appelé par un dessein secret de la Providence à tenir un jour dans ses mains les destinées de la moitié du monde.

Visionnaire sur les techniques de com modernes...
[/quote]Un mot abstrait est comme une boîte à double fond: on y met les idées que l'on désire, et on les en retire sans que personne le voie.[quote]
OU encore:
Citation:
Pourvu que le législateur se charge lui-même d'enlever aux hommes leur indépendance, ils sont à peu près contents.
Redstein
DyingFicus a écrit :
WellRespectedM a écrit :
Redstein a écrit :
Mais : et le logement dans tout ça ?


Question intéressante.

Est-ce que, sur un marché immobilier déjà saturé, donner plus de moyens à ceux qui cherchent à se loger leur permettra de mieux se loger, ou ne va-t-on pas simplement assister à une hausse généralisée des loyers ?


Une solution qui fonctionne et qui revient peu à peu : les immeubles d'habitation coopératifs. Je met ça en HS parce que le principe est intéressant mais sans lien direct avec le sujet du topic...


Faut penser à distraire Zepot, alors je déterre. La question du logement est cruciale : pas d'indépendance sans sécurité du logement. Si tout le monde est +/- propriétaire (sans joug bancaire) d'un logement qui de surcroît ne lui coûte rien ou pas grand chose en chauffage, le RBI devient soudain nettement plus faisable...

...en fait ça met un terme à la course des rats.

D'accord avec toi, DF, le logement coopératif de toutes sortes est une solution, et j'ai repensé à ce topic en bouquinant le numéro d'août-septembre de La Maison Écologique (pub gratos), qui en présente d'autres qui ne manquent pas d'intérêt...


'Human beings. You always manage to find the boring alternative, don't you?'


http://fermons-les-abattoirs.org

- Quand Redstein montre l'abattoir, l'imbécile regarde Redstein - (©Masha)
ZePot
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    ZePot
    le 28 Mai 2013, 02:49
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Voilà un projet intéressant, a mon avis applicable dans un pays ayant une économie de base solide. C'est une solution pour dynamiser la consommation et l'immobilier.

Mettre ça en place en France? C'est déjà plus ou moins le cas, non?
Les guitaristes sont des cons.
https://www.helixpulsar.com/

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