un article de Macé-Scaron qui résume bien les choses à mon avis :
Citation:
Une partie de la droite française est-elle en train de devenir la plus radicale d’Europe ? Entendons-nous : de tout temps, il y a eu au sein de la droite parlementaire, une famille politique qui regroupait les modérés et une famille qui rassemblait ceux qui voulaient en découdre. Du classique.
On a expliqué à des générations d’étudiants de Sciences-Po, les comportements de cette droite-là grâce aux doctes analyses de René Rémond (ils sont bonapartistes, ils sont plébiscitaires, ils soutiennent l’autorité…). Pour autant, cette droite en permanence au bord de la crise de nerfs a toujours manifesté sa colère au sein de l’arc républicain.
Qu’arrive t-il aujourd’hui ? Tout se passe comme si la manifestation du 24 mars dernier des opposants au mariage pour tous avait fait sauter des barrières et marqué un vrai tournant. Pour la première fois depuis la Libération, une faction de la droite parlementaire acceptait d’être dans le même cortège que des groupes d’extrême-droite cherchant l’affrontement. Pour la première fois, une partie de la droite française se réveillait liguarde.
Cinq années de sarkozysme étaient parvenues à faire tomber la digue psychique qui la séparait des thèses lepenistes. Cinq heures ont suffi à faire s’écouler la digue physique qui les séparait encore de l’ultra-droite. Désormais quand on entend les responsables de cette droite devenue folle dire comme Christine Boutin : « Ca va péter ! » ou évoquer comme d’autres la « guerre civile », on ne sait plus s’il est question d’une crainte ou s’il s’agit d’un secret espoir.
En découdre, donc. Et c’est là qu’intervient la fameuse et fumeuse création du « Printemps français » de Béatrice Bourges, ancienne porte-parole de la « Manif pour tous » qui ratisse large, très très large. De l’UMP aux identitaires. Ce printemps de Bourges est surtout l’occasion d’un long hiver des idées. Depuis le 24 mars, on assiste à une multiplication d’opérations visant ici à interdire aux partisans du mariage pour tous de prendre la parole, là à intimider des sénatrices organisées par des groupes « spontanés ».
Il paraît que Frigide Barjot couine son mécontentement devant la radicalisation du mouvement qu’elle a porté. La belle affaire. Le golem idéologique qu’elle a créé, court maintenant tout seul. Elle est bien la seule à s’en étonner. Il fallait juste… deux doigts de jugeote.
Le week-end a été riche d'enseignements. Il y a d’abord eu les prières de rue du groupe catho-intégriste Civitas devant le Sénat. Puis dans la nuit de samedi à dimanche dernier, des militants de l’UMP, de l’Uni et du Printemps français ont maculé d’affiches et de slogans haineux l’Espace des blancs manteaux, à Paris. Ce lieu avait le « tort » d’accueillir, comme tous les ans, les associations LGBT.
Le mariage pour tous n’était pas la seule raison de ce rassemblement où l’on retrouve des représentants d’associations sportives mais aussi d’associations qui luttent au quotidien contre l’exclusion sociale et l’homophobie. Qu’importe ! Seul importait ici de déconsidérer ce qui est devenu non pas un adversaire mais un ennemi à abattre.
Cette droite hystérique a vidé les étriers et perdu toute mesure. Pour ceux qui ont connu cet épisode, nous sommes à des années lumière de la réaction pour la défense de l’école privée qui fit reculer l’exécutif au début du septennat mitterrandien. Frigide Barjot n’est pas Nicole Fontaine et Laurent Wauquiez n’est malheureusement pas Jacques Barrot. Le discours de haine qui est en train de courir comme une monture sans mors risque bientôt de piétiner ces pauvres acteurs qui pensaient chevaucher un baudet.
Cinq mois de débat vont réussir à ruiner cinquante ans de lutte contre la discrimination. Samedi soir, un couple de gay a été physiquement et violemment agressé dans Paris. Est-ce qu’il faut attendre un drame pour voir qu’aujourd’hui, l’homophobie s’est invitée dans nos débats ? Est-ce que l’Histoire ne nous apprend vraiment rien ?