Repérage sur le manche pendant l'impro (jazz)

Rappel du dernier message de la page précédente :
Jonas Cordier
ben oui ca revient à jouer D mixo, mais tu vas pas te dire en contexte de jeu sur ce morceau joué à fond "je vise les notes de D mixo et 2 temps plus tard, celles de G majeur"... On peut penser en G dès le D7
critique aisée, art difficile
Au passage une petite question: vous avez mémorisé les positions de chaque mode avec la root (du mode) en repère, ou alors vous utilisez la méthode "parallèle", en pensant "je joue la gamme de G majeur pour avoir du D myxo" ? Cette dernière m'a toujours paru un peu bricolo, mais la première c'est pas mal de boulot aussi.
Jonas Cordier
pour ma part j'ai toujours fait chaque mode en me repérant avec la root
critique aisée, art difficile
shenton
Citation:
ben oui ca revient à jouer D mixo, mais tu vas pas te dire en contexte de jeu sur ce morceau joué à fond "je vise les notes de D mixo et 2 temps plus tard, celles de G majeur"... On peut penser en G dès le D7

en contexte de jeu, je ne me dis rien du tout; j'essaye simplement de jouer le mieux possible.
le fait de penser tonalité ou mode, j'utilise ça quand je travaille un morceau phrase par phrase pour ne plus avoir à y penser quand je joue réellement.
shenton
pour moi, jouer un mode, c'est savoir placer la (ou les) note specifique du mode :
4te majeure pour le lydien
7me mineure pour le myxo
6te majeure pour le dorien.

avec l'experience suffisante, on finit par les connaitre aussi bien qu'on connait une gamme majeure ou mineure

le rapport avec la gamme de reference est juste un principe de definition. il ne faut pas y penser quand on joue dans un mode
Pickasso
Pour faire simple, et pour reprendre l'essence de ce que mentionne Jonas, je vois 3 modes de base : le Majeur, le mineur, et les "dominants". Juste avec ça, je peux au moins anticiper une position d'accord assez loin sur le manche, donc une structure dans laquelle je choisis quoi jouer. Comme tout travail sur l'instrument, le "repérage" devient plus facile avec la pratique, et on a avantage à bien se mettre les positions et doigtés classiques "dans les doigts" pour avoir autre chose à penser pendant l'impro que les considérations purement "techniques". C'est beaucoup plus facile sur un clavier parce que tout est repérable visuellement, de façon identique d'un octave à l'autre, alors que la guitare oblige à faire un petit calcul de transposition rapide. Pour exemple, on fait facilement les "renversements" sur le clavier en déplaçant un ou deux doigts latéralement, alors que sur la guitare il faut carrément faire danser / croiser les doigts pour avoir le même résultat en respectant le doigté "conventionnel". Probable que c'est cette difficulté qui amène nombre de guitaristes chevronnés à utiliser leur pouce pour jouer la basse sur certains changements, plutôt que de faire la gymnastique réglementaire pour respecter le "bon doigté".
lapinmalin
Perso je me repère par accord, en visualisant la gamme d'accord possible, et en pensant le prochain accord pour "l'approcher".

La difficulté à mon sens est de faire respirer sa phrase indépendament de cette réflexion... Comme faisait Coltrane, il ne s'arrête souvent ni sur le premier temps, mais en plein milieu, repart n'importe ou et cette liberté est vraiment attirante.

Une phrase donné pour un accord à mon avis ne sonne que sur cette accord car les notes pivots ne sont pas les mêmes, des mecs comme Joe Pass ont un jeu d'une logique incroyable et qui font entendre l'harmonie rien qu'en jouant la ligne mélodique.

Pour moi, joue sans penser sur quel accord on est ça doit rester un "effet" consistant à répéter une phrase sur plusieurs accords, sinon c'est peindre le toit en bleu et le ciel en rouge, mais je suis peut être un peu psychorigide .

Le problème ne faisant comme ça c'est de sortir de la mécanique de jeu, et de fluidifier, et ça ne vient pas facilement.

Joe Pass, Niel Hening Orsted Perdersen ont des jeux très "logiques" mais sonnent un peu raide...
En duo on a de magnifiques contrepoint, adorable.
C'est là que le jazz rejoint Bach.
jazz life
break934
WorstScenario a écrit :
Bonjour à tous,

Je débute et travaille l'impro jazz en ce moment et je me débrouille comme je peux, j'arrive à faire des jolis choses mais j'ai un problème qui me freine assez fréquemment, tentative d'explication:

Quand j'improvise ou que j'accompagne, pour mémoriser la grille, je pense principalement en terme de degrés, par exemple si je prends le début de A foggy day - FM7, Am7b5, D7b9, Gm7, C7, F6, etc ... Je pense I, IIIb5, VI7b9, II, V7, I6, etc ... ou tout simplement I, III, VI, II, V, I et je me rappel les altérations au feeling/à l'oreille.

Maintenant mon problème c'est que quand j'improvise je visualise la tonique de chaque accord et les différents intervalles dans la "zone" où je joue, mais quand la grille avance et que je me balade un peu trop sur le manche je me retrouve souvent à me dire "là je suis sur la 7e du IIIe degré, et .... jsuis paumé". Jsuis paumé parce que parfois je dois retrouver le premier degré pour pouvoir retrouver (par exemple) le VIe ... comme j'apprends généralement pas le nom précis de tous les accords de la grille par cœur. Et tout ça c'est du boulot qui casse le feeling pendant l'impro, parce que repérer les intervalles par rapport à la tonique, elle même auparavant repérée par rapport au I du moment, ça devient facile de perdre le fil. Bref j'ai tendance à perdre mes repères.

Donc question principale: comment gardez mes repères pendant les impros, autant sur le manche que dans la grille.

1) Est ce que vous retenez la grille en mémorisant le nom de tous les accords ? (oui ya des cycles et des parties qui se répètent, ça facilitent la tâche mais quand même ...)
2) Est ce que vous vous imposez de rester dans une même zone du manche pour certaines parties, et attendez les changements de tonalités pour vous déplacer ?
3) Est ce que vous jouez sur (au même endroit) que la position de l'accord que vous auriez joué si vous deviez accompagner ?
4) La réponse D!

Voilà, j'espère que c'est compréhensible, je n'attends pas de solution miracle, mais si vous pouviez me donner une méthode de travail pour me forger des repères solides et que je me paume un peu moins, ça serait génial et ça me ferait faire un grand pas! N'hésitez pas à décrire un peu comme ça se passe dans vos têtes quand vous jouez, ça m'intéresse, surtout de la part des guitaristes expérimentés


Merci d'avance à ceux qui prendront le temps de me lire.


ps: je précise que si je prends chaque accord séparément je n'ai aucun problème pour repérer tous les intervalles, pareil pour jouer les suites d'accords, je retiens relativement bien la grille. C'est le fait d'improviser et de me balader sur le manche qui pose problème.


Ta question illustre bien pourquoi c'est important de ne pas utiliser le terme "tonique" à la place de "fondamentale".

La fondamentale c'est la note de base d'un accord.
La tonique c'est la note de base de la tonalité, donc généralement du morceau entier.

L'intervalle que font les notes avec la tonique est le repère le plus solide et important pour l'oreille.
Savoir entendre cet intervalle c'est en fait le fondement de l'oreille relative.

C'est ce que tu veux en fait.
Parce-que la tonique ne change pas à chaque accord, loin de là, donc ça donne une base stable et durable pour se repérer, même quand on se gaufre.

Et pour les degrés c'est pareil, le degré I c'est la tonique.
Il n'y a pas d'autres degré I.
Les fondamentales ne sont pas "leur propre degré I".

Les histoires de modes ne font en fait que jeter la confusion là dessus, en faisant croire qu'il y a des degrés I partout.


Donc pour ton exemple, il faut que tu saches te repérer avec l'intervalle fait avec la note du degré I, quel que soit l'endroit de la grille, que l'accord courant soit le II, ou le V, ou le III ou le I etcetera.

Dans le milieu jazz américain, la tonique, le degré I est appelé la note "Home".
La maison, la note à laquelle on revient toujours, c'est le repère le plus important.


C'est ce qui dit Jonas Cordier en fait formulé différemment, mais c'est la même idée.
break934
Citation:
Dans le bouquin "Jazz theory" de Marc Lévine, il explique que ça peut prendre longtemps mais que l'objectif est de penser chaque accord de la grille comme une gamme/tonalité, de manière indépendante, il propose des exercices et fait comprendre que c'est quasi-indispensable pour la réharmonisation de certains passage par exemple, ou même tout simplement pour improviser sur les accords altérés (gammes min mélo, diminuée et par tons). Alors je sais pas ... c'est pour ça que vos commentaires m'intéressent au plus haut point!


Faut juste savoir que sa méthode est controversée.

Maintenant il y a tellement d'adeptes qu'il vaut mieux éviter d'en parler en mal sinon ça part en couille.
break934
lapinmalin a écrit :
Perso je me repère par accord, en visualisant la gamme d'accord possible, et en pensant le prochain accord pour "l'approcher".

La difficulté à mon sens est de faire respirer sa phrase indépendament de cette réflexion... Comme faisait Coltrane, il ne s'arrête souvent ni sur le premier temps, mais en plein milieu, repart n'importe ou et cette liberté est vraiment attirante.


l'approche décrite par Jonas Cordier est ce qui permet le plus de faire ça
bullfrog
break934 a écrit :
Citation:
Dans le bouquin "Jazz theory" de Marc Lévine, il explique que ça peut prendre longtemps mais que l'objectif est de penser chaque accord de la grille comme une gamme/tonalité, de manière indépendante, il propose des exercices et fait comprendre que c'est quasi-indispensable pour la réharmonisation de certains passage par exemple, ou même tout simplement pour improviser sur les accords altérés (gammes min mélo, diminuée et par tons). Alors je sais pas ... c'est pour ça que vos commentaires m'intéressent au plus haut point!


Faut juste savoir que sa méthode est controversée.

Maintenant il y a tellement d'adeptes qu'il vaut mieux éviter d'en parler en mal sinon ça part en couille.


je me sers de son bouquin comme sous plat et ça fonctionne super bien
Thank heavens the Ampeg doesn't sound like a Deluxe Reverb!
break934
shenton a écrit :
justement ! penser D7, ça veut dire jouer re myxo; ce qui revient à jouer en sol.
c'est un des grands avantage des chord scales : on a pas besoin de faire d'analyse tonale, puisque automatiquement on retombe sur les structures harmoniques de base.


Je comprend pas comment tu peux souhaiter ne pas avoir besoin de faire d'analyse tonale.

L'analyse tonale décrit quelle note est entendue comme tonique, quelle note est entendue comme dominante etcetera.
C'est le fondement de l'oreille relative.

99% des morceaux sont conçus avec cette façon de percevoir et hiérarchiser les notes de musique.

Donc je vois pas l'intérêt d'éviter une analyse qui décrit fidèlement la façon dont un morceau est conçu, et qui décrit fidèlement la façon dont l'oreille perçoit le morceau.

En fait l'analyse tonale, c'est pas censé être un calcul qu'on pose sur papier, on est censé entendre les degrés et faire une analyse à la volée.
shenton
a écrit :
Je comprend pas comment tu peux souhaiter ne pas avoir besoin de faire d'analyse tonale.

L'analyse tonale décrit quelle note est entendue comme tonique, quelle note est entendue comme dominante etcetera.
C'est le fondement de l'oreille relative.

c'est sur, mais en passant par l'analyse modale on retombe sur les memes conclusions.
si on reprend l'exemple du II V I on dit : le II est en dorien, le V en myxo et le I en ionien; et on se rend compte qu'on est en I majeur.
evidemment dans cet exemple ça parait idiot et inutile (mais meme ça, ça se discute car pour moi ça ne me parait pas suffisant de dire qu'on est en majeur) mais dans des morceaux avec beaucoup de modulations et de substitutions (ex : desafinado) l'analyse tonale devient tres difficile, et le passage par les chordscales et l'analyse modale permet d'une part de determiner les gammes d'impro et d'autre part facilite l'analyse tonale.
personnellement, je fais beaucoup d'analyse de pieces classiques (bach, mozart, etc...) et j'utilise la meme methode car la aussi, l'analyse tonale classique est souvent difficile à detecter.en conclusion, je dirais que le grand interet est justement qu'elle s'applique aussi bien à du modal pur qu'à du tonal sophistiqué.

maintenant, je peux concevoir que cette technique qui me semble ideale peut ne pas convenir à tout le monde, mais lorsque quelqu'un sur le forum cherche des directions de travail pour evoluer, je pense qu'il est important de lui presenter celle-ci; à lui de voir ce qu'il peut en tirer.
break934
shenton a écrit :
a écrit :
Je comprend pas comment tu peux souhaiter ne pas avoir besoin de faire d'analyse tonale.

L'analyse tonale décrit quelle note est entendue comme tonique, quelle note est entendue comme dominante etcetera.
C'est le fondement de l'oreille relative.

c'est sur, mais en passant par l'analyse modale on retombe sur les memes conclusions.
si on reprend l'exemple du II V I on dit : le II est en dorien, le V en myxo et le I en ionien; et on se rend compte qu'on est en I majeur.
evidemment dans cet exemple ça parait idiot et inutile (mais meme ça, ça se discute car pour moi ça ne me parait pas suffisant de dire qu'on est en majeur) mais dans des morceaux avec beaucoup de modulations et de substitutions (ex : desafinado) l'analyse tonale devient tres difficile, et le passage par les chordscales et l'analyse modale permet d'une part de determiner les gammes d'impro et d'autre part facilite l'analyse tonale.
personnellement, je fais beaucoup d'analyse de pieces classiques (bach, mozart, etc...) et j'utilise la meme methode car la aussi, l'analyse tonale classique est souvent difficile à detecter.en conclusion, je dirais que le grand interet est justement qu'elle s'applique aussi bien à du modal pur qu'à du tonal sophistiqué.

maintenant, je peux concevoir que cette technique qui me semble ideale peut ne pas convenir à tout le monde, mais lorsque quelqu'un sur le forum cherche des directions de travail pour evoluer, je pense qu'il est important de lui presenter celle-ci; à lui de voir ce qu'il peut en tirer.


Le but de l'analyse tonale n'est pas de résoudre l'équation de la grille dont le résultat est les notes jouables à l'instant x ou y.

Tu dis que le résultat est le même, mais ça s'est uniquement dans TA logique.

Le problème de dire que II est dorien, c'est que ça obstrue le vrai sens de ce qu'est le mode dorien pour l'oreille.
Et on se retrouve dans la même situation que la confusion entre fondamentale et tonique entraine, à savoir une perte d'info pour l'oreille.

De même tu fais cette même erreur en parlant de modulation à tout bout de champ, même quand il s'agit pas de modulation.

C'est ce qui est très dommage dans ces forums, c'est qu'il y a plus de désinformation que d'information
Jonas Cordier
dans desafinado, on est en F dans le A, et on passe par A et C (assez abrupte vers C d'ailleurs ) dans le B.
Après c'est blindé de dominants secondaires et quelques sous dominants mineurs
critique aisée, art difficile

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