@ zeb46
Tu me fais penser à ces maoïstes qui distribuaient le Petit Livre Rouge comme une nouvelle Bible, en faisant abstraction, de mauvaise foi ou par simple ignorance, d'un aspect fondamental de l'Histoire.
Mais si on peut éventuellement pardonner aux jeunes mao des années 60-70, dans l'exaltation de leur jeunesse et l'embrigadement politique dont ils ont pu être les victimes, d'avoir omis les 50 millions de victimes en 30 ans du communisme à la Mao Zedong, tu ne pourrais raisonnablement soutenir en 2016 que "tu ne savais pas" la réalité de la guitar industry en Chine.
Toi qui, dans presque chacune de tes phrases, martèles "Chine" et surtout "prix", tu escamotes le facteur principal de l'équation : le faible coût de la main d'oeuvre chinoise, obtenu grâce à :
- un salaire horaire pour lequel tu ne voudrais toi-même certainement pas travailler (revenu annuel moyen d'un ouvrier chinois : 1.300 USD)
- une durée journalière et hebdomadaire du travail à laquelle tu ne voudrais toi-même certainement pas te soumettre
Auquel faible coût de main d'oeuvre viennent s'ajouter les facteurs suivants pour limiter les coûts de production :
- des conditions de travail (hygiène et sécurité) que tu trouverais sans doute inadmissibles pour toi-même. L'industrie de la lutherie étant fondamentalement une industrie du bois, il y a production importante de poussières fines et usage intensif de solvants et vernis. Pour la préservation de la santé des travailleurs, les normes occidentales en ces domaines sont devenues très contraignantes. Elles le sont beaucoup moins en Chine... lorsqu'elles existent.
- normes environnementales inexistantes ou non respectées lorsqu'elles existent. Ça veut dire tout simplement qu'on rejette tout dans l'air, le sol et les cours d'eau, sans aucun filtre.
- l'interdiction du syndicalisme, du droit de grève, de réunion, de manifestation, d'expression (abolis en 1982)
- la tradition multimillénaire de corruption généralisée de l'état chinois et donc des agents chargés de faire respecter le peu de réglementation qui existe pour protéger le travailleur et l'environnement
- le mépris total du droit de la propriété industrielle et intellectuelle (brevets, dessins et modèles, marques et logos), tradition multicentenaire, ça a commencé avec la copie industrialisée de l'armement occidental. De toute façon, c'est dans la culture asiatique, le Japon est devenu une puissance industrielle de premier plan de cette façon, d'abord apprendre en copiant puis améliorer en innovant, tuant par la même occasion les industries européennes du matériel photo & cinéma, de l'horlogerie grand public, l'industrie automobile britannique, et bien d'autres domaines.
- etc.
- etc.
L'ouvrier chinois est donc un quasi-esclave, le respect de l'environnement est la dernière des préoccupations des entreprises (et de leurs clients, les Thomann/Harley Benton, Epiphone, Ibanez et compagnie), et la contrefaçon est un cancer qui détruit l'emploi chez nous.
Tout cela, tu le sais parfaitement.
Libre à toi de te compromettre là-dedans. Et ne viens pas te justifier en arguant que toi aussi tu es une victime du capitalisme, qu'on ne te laisse pas le choix, etc., car tu nous as démontré auparavant que tu as les moyens de t'offrir des instruments de musique construits dans des pays civilisés.
En ce qui me concerne, j'ai eu quelques guitares et basses, j'en ai encore quelques unes, mais je n'ai jamais eu de guitares Made in China, et je n'en aurai pas. C'est un parti pris politique, social, écologiste.
Je ne vais pas me salir la conscience pour économiser quelques ronds, pour un produit d'ailleurs souvent inférieur, et au final pour qu'encore plus de fric remplisse les poches des actionnaires avides de méga-groupes occidentaux ou japonais.
Je procède de même pour l'électronique grand public (dur dur quand même...), l'électroménager, les fringues, chaussures, l'habillement et la mode en général, l'ameublement, etc.
C'est parfois difficile de trouver une alternative, c'est plus cher évidemment, pour les raisons énumérées ci-dessus. Mais au moins je dors bien la nuit. Et si je ne trouve pas ou en dehors de mes moyens, et bien je m'en passe tout simplement. Petite précision : je ne pense pas faire partie de ceux que tu appelles "les riches", et je suis même sans emploi depuis 2 ans.