Brigido a écrit :
Les bluesmen de l'âge d'or du blues noir américain (pour simplifier, on va dire de 1950 à 1980), avaient ils une connaissance consciente de l'harmonie et de ses théories ?
Tu as légèrement
changé l'orientation du propos à l'origine du débat car au départ de la discussion il n'était pas question du fait qu'ils en soient conscients ou non mais plutôt qu'ils utilisaient ou non toute une palette d'éléments harmoniques en dehors de la simple pentatonique mineure.
Du coup j'en déduis que tu es peut-être finalement d'accord avec mes propos
qui ont été à l'origine du débat sur la page des guitares Epiphone - et que je remets ci-dessous - en réponse à Ruhm66 et Room335.
Mikka a écrit :
Au contraire, le Blues est omniprésent dans le Jazz. C'est deux styles sont d'un point de vue historique, culturel et musicologique indissociables. Il faut juste l'approcher en tenant compte des modulations intrinsèques au mouvements harmoniques imposés par les II V ou II V I le VI de l'anatole n'étant rien d'autre qu'un I déguisé derrière sa relative mineure. Parfois cela t'impose juste de penser mineur et parfois majeur en fonction de l'accord résolvant à venir joué ou juste sous entendu par le II V. C'est une approche autant tonale que modale. Le véritable souci vient surtout que beaucoup pensent savoir jouer le Blues alors qu'il n'en est rien car se limitant à la simple pentatonique mineure, ils se prive de 80% de ce qu'est réellement le Blues et passent à côté de l'essentiel.
Adam Bopel a écrit :
Tu peux préciser quels sont ces 80 % essentiels, pour jouer le Blues ?
Mikka Grytviken a écrit :
Gamme pentatonique majeure, gamme blues, gamme diatonique majeure avec en particulier le mode mixolydien sur un accord de septième de dominante mais aussi les modes aéolien, phrygien et dorien sur les accords mineures dans un contexte de blues mineur mais pas que, lesquels sont d'ailleurs extrapolables sur penta majeure et mineure, et puis différents modes harmoniques mineures et mélodiques mineures ainsi que la gamme diminuée et quelques autres gammes pentatoniques ainsi que la gamme bebop etc ... que de nombreux bluesmen tel que B.B.King, ses contemporains et même avant ont su utiliser avant même la vague Blues Fusion qu'on a connue durant les 70' et 90' et que Hendrix a aussi largement balayées dès 1968-1969...
... J'ai même omis un éléments fondamental ...
... l'usage du quart de ton via les bends, fréquent chez les trois Kings et Albert Collins par exemple mais aussi dans l'accordage comme par exemple peut l'exploiter John Lee Hooker en accordant sa corde de Sol 1/4 de ton tantôt en-dessous ou tantôt au-dessus suivant les enregistrements que j'ai pu écouter de lui.
On pourrait aussi souligner les aspects rythmiques ...
Brigido a écrit :
Beaucoup de mots savants qu'aucun des bluesmen précités n'auraient sans nul doute jamais compris
BB King et ses contemporains du postwar blues ont trouvé quelques plans à l'oreille (piqués à droite à gauche), ce qui a contribué a amener quelques "raffinements" dans leur jeu, mais pas plus. (les fameuses "boxes").
Le blues est effectivement omniprésent dans le jazz, sauf qu'aucun bluesman ne saura vraiment improviser sur une grille de jazz/blues et sonner jazz, et qu'aucun véritable jazzman ne saura "sonner" blues. Le monde est injuste
Ces deux deux musiques sont de la même famille, mais bien différentes malgré tout. Le blues est une musique de tradition "orale" et le jazz est une musique "savante" (même si toutes les deux sont des musiques d'improvisation).
Le Jazzman le plus blues qui soit, c'est Kenny Burrel, et pourtant Kenny Burrel c'est déja totalement hors de portée d'un bluesmen en terme d'improvisation...
Moralité : si tu veux sonner vraiment blues (j'entends "blues noir"), n'apprend surtout pas l'harmonie, sinon tu finiras comme Robben Ford. Et, si tu es un bluesman et que tu veux sonner comme Kenny Burrel, prépare toi à bouffer quand même des traités d'harmonie.
Mikka Grytviken a écrit :
Et rien que l'intro de Red House, ce sont des intervalles tritoniques donc diminués ... les Bluesmen ont toujours eu une culture musicale bien supérieure à ce que le "petits blancs" de chez nous s'imaginent pour n'avoir qu'effleuré le sujet et ce par facilité et pauvreté culturel ... je parle pour le Français en particulier car des guitaristes comme Clapton, Keith Richards ou encore Jimmy Page sont eux très conscients de ce que je souligne.
Brigido a écrit :
C'est à chaque fois la vidéo que l'on me ressort (je l'attendais)
BB fait des efforts pour plaire à l'homme blanc, il parle d'harmonie avec un niveau de guitariste du dimanche, il n'y connait presque rien, parce qu'en réalité il s'en fout, ce n'est pas comme ça qu'il a avancé dans sa musique. Tradition orale, repiquage de plans à l'oreille qu'on incorpore dans son jeu , c'est comme ça que ça marchait à l'époque et c'est précisément ça qui a fait le son des grands du blues et de leurs styles (avant tout basé sur l'expression, de bonnes idées originales et non l'étude de l'harmonie !). C'est pareil pour TBone Walker, T Bone Walker (et je connais très bien) c'est 4 ou 5 plans en boucle, c'est pas dans l'harmonie que résidait son génie. Il n'a jamais fait évoluer son jeu, il en était incapable et il s'en foutait (bah oui, c'était T Bone Walker quoi !).
Mikka a écrit :
La tradition orale n'empêche en rien la sophistication ni la compréhension. La musique n'a pas besoin d'être écrite pour être "savante", riche, complexe et sophistiquée.
Il n'y a qu'à voir la richesse rythmique et harmonique de tout un tas de musiques africaines ou "créoles" apparues avant qu'on ne les théorises sur le papier et quid de la musique indienne avec à la fois tous ses rythmes et ses gammes et modes (et ses intervalles tellement plus fins que ceux de la culture occidentale savante alors qu'il s'agit d'une musique transmise uniquement oralement depuis des millénaires.
B.B.King qui veut plaire aux blancs en s'appuyant sur la musique des gitans ou des afro-américains qui ont fortement contribuer à la naissance du Jazz et ensuite du Bebop !
Voilà, je pense que il y en aura qui seront d'accord mais surtout en désaccord avec ce que je dis et c'est normal et tant mieux, ça devrait bien lancer le sujet.
Tiens d'ailleurs en passant Wes Montgommery n'avait absolument aucunes connaissance en solfège ou harmonie à l'instar de son mentor précurseur du Jazz Bebop Charlie Christian.
Et je pense que le guitariste de Jazz parmi les grand de l'époque que tu sites et qui serait le plus influencé par le Blues ça n'est pas de mon point de vue Burrel mais Grant Green.
Exemple ... mais bon sang je suis déjà HS !!!