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Lao
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    Lao
    le 14 Mai 2017, 15:57
Je suis dans les "oldies SF françaises" en ce moment.

Putain, ça déménage!
Si vous avez aimé des trucs genre Rock Machine de Spinrad .....
jules_albert
il y a trois ans, j'avais posté ici même le livre de miguel amoros, rock pour débutants, excellente analyse sociopolitique qui sauvait de l'oubli la charge révolutionnaire contenue dans le rock jusqu'au début des années 70 : https://www.guitariste.com/for(...).html

l'auteur a été récemment interviewé par le magazine rock "ruta 66", voici la traduction en anglais de cet entretien : https://libcom.org/library/int(...)3%B3s

texte original en espagnol : http://kaosenlared.net/miguel-(...)zalo/

Sans valeur marchande : https://debord-encore.blogspot(...).html

La peste citoyenne. La classe moyenne et ses angoisses : http://parolesdesjours.free.fr(...)e.pdf
jules_albert
jules_albert a écrit :
aux p.u.f. :

jean vioulac, la logique totalitaire, essai sur la crise de l'occident, 2013

Notre époque est celle de la crise : mais une crise n’est jamais que la phase critique atteinte par un processus de plus lointaine provenance. La crise contemporaine est ainsi révélation, à la fois de la dépendance de notre époque à l’endroit de l’histoire dont elle procède et de l’essence même de cette histoire : la pensée de la crise impose de la concevoir comme accomplissement d’un destin qu’il s’agit de mettre au jour.

La logique de ce destin est restituée à partir de Hegel, qui découvre dans l’histoire un processus de totalisation achevé dans la « totalité autonome » de l’État, régie par la terreur et la guerre. Cette figure de l’État correspond au concept de totalitarisme, qu’il importe alors d’étudier. Or ce que montre le nazisme, caractérisé par la désintégration de l’appareil d’État, c’est que le totalitarisme n’est pas forcément étatique : il existe un processus immanent de totalisation dont les régimes totalitaires ne furent que des phénomènes dérivés.

Ce processus est celui que Tocqueville a vu dans la massification des sociétés démocratiques. Il échoue à l’expliquer, le fondant en dernière instance sur la Providence divine, mais a cependant vu son lien avec la révolution industrielle. C’est Marx qui a pensé jusqu’au bout le processus de totalisation immanent au champ des pratiques, en découvrant dans le Capital la puissance de mobilisation et de massification caractéristique de la modernité : le capitalisme est en cela l’essence même du totalitarisme, et la mondialisation contemporaine n’est autre que la totalisation propre au Capital.

Le surmontement de la crise s’identifie dès lors au dépassement du capitalisme : mais si le capitalisme se définit par l’autonomisation du système des objets, alors l’automatisation propre au dispositif technique s’avère plus fondamentale encore que le capitalisme, et il faut avec Günther Anders parler d’un « totalitarisme technocratique », dont on peut craindre qu’il soit indépassable.

Reste alors à penser ce qui se dit dans une telle catastrophe.

un autre extrait de ce bon livre, page 158 :

Le totalitarisme nazi se définit ainsi par le déchaînement inconditionné de la puissance de la masse, c'est-à-dire par ce que Schmitt appelait "l'expression immédiate de la substance et de l'énergie démocratique", et cette expression de la puissance s'opère par le biais des appareils spécifiques à la modernité occidentale (bureaucratie et dispositif industriel), dans les buts caractéristiques du XIXe siècle européen (colonialisme, impérialisme et eugénisme) et sous couvert de l'idéologie propre à cette époque (scientisme et athéisme). C'est pourquoi la catastrophe nationale-socialiste est l'événement crucial de la modernité occidentale : elle n'est en rien un déraillement sur la voie du progrès, un accident de parcours ou une parenthèse dans le destin de l'Occident, mais tout au contraire l'accomplissement paroxystique de la totalité de ses déterminations.

Il y a en cela une singularité d'Auschwitz, mais il convient de définir le concept de singularité : non pas un événement absolument incomparable et irrépétable, mais un événement particulier en lequel se résume et se récapitule l'Universel. Auschwitz est une singularité en ce sens que cet événement ponctuel, localisé dans l'espace et dans le temps, concentre en lui l'événement constitutif de la modernité occidentale. Le nazisme est catastrophe de l'Occident, comme l'on parle de catastrophe industrielle, au sens où par exemple l'explosion d'un réacteur nucléaire n'est pas un événement aberrant par rapport à la logique de son fonctionnement, mais tout au contraire le plein déploiement de ses potentialités constitutives. Le Troisième Reich est un Tchernobyl politique, où la masse atomisée s'emballe et libère d'un seul coup son énergie atomique.

L'événement qu'est le nazisme témoigne ainsi d'une possibilité latente à la civilisation occidentale : cette catastrophe révèle l'essence même de l'Occident qui jusqu'à elle était demeuré cachée, en retrait, et c'est pourquoi il faut dire que "dans l'apocalypse d'Auschwitz ce n'est ni plus ni moins que l'Occident, en son essence, qui s'est révélé - et qui ne cesse, depuis, de se révéler".
Sans valeur marchande : https://debord-encore.blogspot(...).html

La peste citoyenne. La classe moyenne et ses angoisses : http://parolesdesjours.free.fr(...)e.pdf
jules_albert
je complète par ce passage qui marque bien la différence entre la théorie révolutionnaire de marx et ses dérives contre-révolutionnaires léninistes, trotskystes ou staliniennes, dérives dont nous subissons encore aujourd'hui les effets délétères (admiration pour les régimes bolivariens ou castristes de la part des gauchistes occidentaux, par exemple) :

page 434

La Révolution n'a pas pour finalité de rétablir l'égalité entre telle ou telle classe sociale. La Révolution a pour fonction de libérer tous les sujets de leur subsomption et de leur aliénation au dispositif de l'autovalorisation, c'est-à-dire de leur "asservissement à l'objet". Il ne s'agit pas de se demander comment les hommes pourraient devenir égaux à l'intérieur de ce système (en redistribuant équitablement la valeur, par exemple), puisqu'une telle égalité serait égalité dans l'aliénation : elle serait égalité dans la soumission au dispositif autonome de l'objectivité, c'est-à-dire, en toute rigueur des termes, qu'elle serait simple équivalence de marchandises dans l'espace commun du marché.

Marx insistait sur le fait qu'un relèvement autoritaire du salaire ne serait qu'une meilleure rémunération d'esclaves : l'augmentation des salaires en effet, quelle que soit son ampleur, ne résoud en rien le problème, puisqu'elle maintient - et, pire encore, présente comme désirable - la soumission du sujet à l'argent, et Le Capital répète que, "pas plus qu'une amélioration de l'habillement, de la nourriture, de leur traitement et l'augmentation de leur peculium n'abolissaient le rapport de dépendance et l'exploitation de l'esclave, elles n'abolissent la situation du travailleur salarié. La hausse du prix du travail consécutive à l'accumulation du Capital signifie en fait simplement que l'ampleur et le poids de la chaîne d'or que le salarié s'est lui-même déjà forgée permettent qu'on la serre un peu moins fort".

L'enjeu de la Révolution est précisément d'abolir, c'est-à-dire de surmonter (aufheben) cette situation d'assujettissement : il s'agit de se demander comment les sujets peuvent se réapproprier la puissance d'agir confisquée par l'objectivité.

[...]

Toute l'analyse marxienne de l'avènement du capitalisme montre que l'État n'est rien d'autre qu'une fonction du Capital : l'outil administratif de la massification et du nivellement du corps social, qui assure "le maintien de l'ordre, c'est-à-dire de l'ordre social existant, et par suite la subordination existante des masses", qui instaure la discipline, forme les travailleurs selon les spécialisations de la division du travail, installe les infrastructures, garantit les contrats et la propriété, prélève l'impôt et attribue les budgets. Marx parle de "la machinerie de l'État", et en effet l'État est une des pièces de la Machinerie par laquelle le Capital se donne les instruments dont il a besoin. L'État spécifiquement moderne est en effet défini par la centralisation et la concentration des pouvoirs, l'égalisation et le nivellement de la société, et son indépendance de plus en plus grande par rapport à la réalité sociale. [...] De même que Tocqueville, Marx souligne alors que la Révolution française, bien loin d'opérer une rupture avec l'absolutisme royal, a parachevé son oeuvre. [...]

Dès lors, la Révolution ne peut consister en la conquête du pouvoir d'État, et l'idée d'un État communiste est une aberration pour Marx. Si elle doit constituer "la classe du renversement", alors "la classe ouvrière ne peut pas se contenter de prendre telle quelle la machinerie de l'État et de la faire fonctionner pour son propre compte" (Marx, La Guerre civile en France). C'est ce qui explique la superficialité de toutes les révolutions connues à ce jour : "Toutes les révolutions eurent donc pour conséquence unique de perfectionner la machinerie d'État, au lieu de rejeter ce cauchemar étouffant." Toute politique qui "considère la prise et la direction de cette immense machinerie de gouvernement comme le butin principal du vainqueur" est par suite nulle, impuissante, et constitue surtout une nouvelle menace.

La Révolution doit au contraire démanteler l'État, "briser ce pouvoir gouvernemental centralisé et organisé qui, par usurpation, était le maître de la société au lieu d'en être le serviteur" (Marx). Ce faisant, elle ne supprime pas toute unité et ne renvoie pas à la féodalité, mais au contraire rend à la communauté des hommes l'unité qui est la sienne et qui était objectivée et réifiée dans l'État : "L'unité de la nation ne doit pas être brisée, mais au contraire être organisée, elle doit devenir une réalité par la destruction du pouvoir d'État qui prétendait être l'incarnation de cette unité, mais se voulait indépendant de la nation même et supérieur à elle, alors qu'il n'en était qu'une excroissance parasitaire" (Marx).

C'est ainsi qu'en mai 1871 Marx interprète la Commune de Paris : "Ce fut une Révolution contre l'État lui-même, cet avorton surnaturel de la société ; ce fut une reprise par le peuple et pour le peuple de sa propre vie sociale. Ce ne fut pas une Révolution faite pour transférer ce pouvoir d'une fraction des classes dominantes à une autre, mais une Révolution pour briser cette horrible machinerie de la domination de classe". Il s'agit de rendre possible la plénitude vitale de chacun en particulier : "La Commune est la réabsorption du pouvoir d'État par la société dont il devient la force vivante, au lieu d'être la force qui la domine et la subjugue." Toute la pensée marxienne de la Révolution tend ainsi à récuser la thèse "consistant à croire que l'on peut construire avec l'appareil de l'État une nouvelle société" - et les "idées d'édification du socialisme" ou de "construction du communisme" n'ont pas de sens pour Marx.

La pensée marxienne de la Révolution met en évidence qu'elle ne peut en aucun cas consister à la prise du pouvoir gouvernemental par qui que ce soit, elle ne peut en aucun cas consister en la réalisation d'un programme quel qu'il soit. [...] La Révolution est l'acte de la réappropriation, par les victimes d'une expropriation radicale, de l'essence commune transférée et substantialisée dans un Fonds désormais détenteur, en tant que Machinerie, de la puissance inconditionnée, et qui ainsi amène l'homme à son être propre et rend possible l'avènement des "hommes complets" : la Révolution est un événement, l'événement terminal de l'Histoire : celui par lequel "commence l'épanouissement de la force humaine, qui est sa propre fin, le véritable règne de la liberté".
Sans valeur marchande : https://debord-encore.blogspot(...).html

La peste citoyenne. La classe moyenne et ses angoisses : http://parolesdesjours.free.fr(...)e.pdf
PP a écrit :
jimfire a écrit :
Ah ? C'est intéressant ! De quel "grand classique" le rapprocherais-tu ?
De mon côté, je n'étais peut-être pas dans les bonnes dispositions pour le lire ; J'ai trouvé ça d'une noirceur sans aucun espoir... Bien écrit cependant.


ben, assez curieusement, ça m'avait évoqué Dostoïevski, dans le sentiment de grandeur étrange que ça avait imprimé sur moi ; je m'étais dit, chose qui ne m'arrive plus que très rarement, à la fin de la lecture, que malgré ses défauts et ce qu'il pouvait avoir de rebutant, c'était un grand livre ; à la réflexion, le rapprochement avec Dostoïevski n'est pas si étonnant au fond.


J'ai enfin fini Les Particules Elémentaires et... gros kif. J'ai adoré.
La dernier bouquin qui m'a laissé dans un état comparable c'était Ubik, de K. Dick, y a longtemps. Je ne lis pas assez de bons romans je crois.

Sylvain Tesson, à tout hasard, quelqu'un connait ?
Swingui
  • Swingui
  • Special Total utilisateur
Il est un poil médiatisé Tesson : une gamelle en tentant de l'urban climbing sous éthanol, une berezina par ci, un ermitage en Sibérie par là, etc
Cette critique de Dans les forêts de Sibérie reflète exactement ce que je pense de sa prose...

http://laprecaritedusage.blog.(...)sson/

il gagnerait peut être à être rencontré pour évoquer ses trips mais je pense qu'il y a d'autres auteurs de voyage qui valent le détour au préalable

Pour ma part je suis plongé dans le second volet de Mehmed le Mince de Yasar Kemal, un régal
Kandide
PEACE & LOVE
jules_albert


https://www.lesbelleslettres.c(...)bible

Tout est symbolique pour Léon Bloy : l’histoire de l’humanité, sa propre vie, les contes sortis de son imagination offrent tous une image de Dieu sous des dehors inattendus. Il ne lui suffit pas de pourfendre le positivisme qui domine dans l’opinion de son époque : à la religion de la Science il oppose une vision du monde dans laquelle le moindre événement, réel ou imaginaire, exprime la Parole divine à l’instar de la Bible. Ainsi, toute réalité est textuelle sous le regard de cet écrivain qui, dans le divers de l’existence, aperçoit, par fragments, la même fiction transcendante. Cet ouvrage explore l’étonnante pratique de la littérature qui résulte de ce parti-pris apologétique risqué. Le roman, l’historiographie, le pamphlet, le journal intime n’y sont jamais que des textes de seconde main : des réécritures déconcertantes qui, selon des conventions différentes, ont la Bible pour matrice et tentent d’en faire résonner les échos intempestifs à l’oreille des contemporains.
Sans valeur marchande : https://debord-encore.blogspot(...).html

La peste citoyenne. La classe moyenne et ses angoisses : http://parolesdesjours.free.fr(...)e.pdf
jim204
  • jim204
  • Custom Ultra utilisateur
jim204 a écrit :
Je commence "une vie" une bio sur Albert Camus d'Olivier Todd (800p)


Ca n'est pas cette couverture

L'entrée en matière me plait déjà, avec les nombreuses descriptions de la vie des français modestes d’Algérie.
On verra par la suite si je tiens le coup


Alors j'y suis toujours dessus et a peine 350 pages de lus sur les 800, c'est long mais c'est assez dingue. Ca a du être le travail d'une vie cette bio.
MonsieurMalabar
Pareto a écrit :


J'ai enfin fini Les Particules Elémentaires et... gros kif. J'ai adoré.
La dernier bouquin qui m'a laissé dans un état comparable c'était Ubik, de K. Dick, y a longtemps. Je ne lis pas assez de bons romans je crois.

Sylvain Tesson, à tout hasard, quelqu'un connait ?


Tesson, les chemins noirs, est sur ma liste ... quand j'aurai fini le tome 3 de Vernon Subutex.
Subutex c'est pas terrible, grosses ficelles,des personnages improbables et caricaturaux qu'on trouve dans les mauvais films, mais tellement facile à lire. Et puis j'ai lu les 2 premiers je ne vais pas fair l'impasse sur le dernier.
Skelter : "Et dans 100 grammes de cacahuètes t'as autant voire plus de cacahuètes que dans 100g de viande."
Redstein
Ça ne vaut pas la peine de commencer, alors ?
'Human beings. You always manage to find the boring alternative, don't you?'


http://fermons-les-abattoirs.org

- Quand Redstein montre l'abattoir, l'imbécile regarde Redstein - (©Masha)
El Phaco
Je replonge dans L'univers élégant de Greene. Quand on a plus fait de maths ou de physique depuis des lustres, c'est un peu violent, mais ça demeure passionnant !
"Information is not knowledge. Knowledge is not wisdom. Wisdom is not truth. Truth is not beauty. Beauty is not love. Love is not music. Music is the best..."
Frank Zappa

Tout ce que rêvez de savoir sur la Phacocaster Lionel Rouvier : https://www.guitariste.com/for(...)10641

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Invité
El Phaco a écrit :
Je replonge dans L'univers élégant de Greene. Quand on a plus fait de maths ou de physique depuis des lustres, c'est un peu violent, mais ça demeure passionnant !


Sinon t'as l'équivalent en vidéos sur le net - présentation par Greene, avec des jolies images ... et des interviews de grands physiciens
El Phaco
Oui, j'ai découvert ça aujourd'hui en cherchant sur le net si des rééditions augmentées avait paru. Je me les materai à la maison, quand j'aurais fini de regarder Full Metal Alchemist - faut bien se détendre les neurones aussi !
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Leozinho
jules_albert a écrit :
je m'excuse par avance pour le pavé que je vais poster.


merci !

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