hilaryhahn a écrit :
MorpheusNeon a écrit :
Un Grand Homme.
Un meurtrier sanguinaire
je ne veux pas trop défendre robespierre car il fit guillotiner anacharsis cloots, l'homme le plus extrémiste de la révolution
bourgeoise en france, "ennemi personnel de jésus-christ", internationaliste qui voulait exterminer tous les tyrans jusqu'en chine et faire de paris le chef-lieu du monde. robespierre le fit exécuter en tant qu'"exagéré". mais enfin, voici tout de même quelques remarques :
la france ne peut enseigner véritablement son passé parce qu'elle sait qu'il vaut mieux que ce qu'elle est devenue. elle sait qu'il n'y a aucune filiation possible entre sa misère présente et ce passé devenu mythique, et presque oublié. cette société n'a plus rien à offrir à ses enfants, pas même l'abondance américaine, la simili-variété, les commodités factices, l'illusion de la grandeur nationale, etc.
chacun s'y sent veule, perdu, misérable. c'est bien normal : la france est l'amérique du pauvre. elle ne peut même pas enseigner la grandeur de son passé, comme le succédané de la misère présente; ou seulement accessoirement, pour des célébrations aussi excitantes que le nième centenaire de la mort de jeanne d'arc ou de la victoire de la
réaction bourgeoise. cette révolution française qui n'est plus évoquée que sur le mode du révisionnisme à la furet et dont on a décrété qu'elle avait été malencontreusement gâchée par la présence de révolutionnaires... les penseurs ayant organisé le bicentennaire, ne trouvant plus d'utilité à soutenir la moindre perspective sur leur société enfin arrivée dans la voie de garage de la perfection qu'on connaît, niaient que 1789 ait pu être une révolution sociale. cela devient plutôt une importante expérience institutionelle, malheureusement gâchée d'une part de génocide ! une telle intention conduit normalement à valoriser siéyès pour négliger jacques roux, babeuf, cloots, saint-just, et même robespierre, sans parler des masses... quand la révolution française était censée avoir voulu aboutir plutôt à la IIIe république, elle valorisait principalement danton et carnot.
la sécurité, si l'on entend par là une situation de paix perpétuelle, dans laquelle chacun peut jouir des charmes de la vie, sans craindre les convoitises d'un tiers ou l'irruption dans sa vie de quelque ennui, une telle sécurité n'a jamais régné totalement et durablement dans aucun pays. et, en france, pour des raisons historiques précises et assez bien connues,
moins que partout ailleurs. la france a presque toujours été un pays de
troubles, et pas seulement à cause de la "délinquance". et même celle-ci n'a jamais été par le passé qu'une sorte de moindre mal.
peut-être tuait-on, pour s'emparer de leur argent, autant de vieilles femmes seules ou abandonnées qu'on le fait aujourd'hui, mais cela n'était pas monté en épingle comme un des syndromes de l'insécurité. on avait d'autres soucis plus graves et plus réels. les français étaient sans cesse inquiets quant à leur condition, celle qu'ils occupaient ou celle qu'ils voulaient atteindre; et c'est pourquoi ils se sont souvent divisés, sinon en plusieurs partis, au moins toujours en deux irréconciliables. là où l'un soutenait que la situation était excellente, tout s'y présentant ainsi que dans le meilleur des mondes, et cherchait à la faire durer, l'autre affirmait le contraire et travaillait à changer un état de choses qui ne lui convenait pas. ce n'était pas la guerre civile permanente, certes.
mais la guerre civile depuis les lointaines jacqueries jusqu'à mai 68, a toujours rendu la vie peu sûre aux français (sans parler des guerres extérieures) et ne laissait jamais bien longtemps fixes les états et les intérêts. et même, comparativement à l'étape présente, où chacun peut mourir à sa table des suites de l'ingestion d'aliments radioactifs, les jacques, les frondeurs, les révoltés et les révolutionnaires de tous bords n'hésitaient pas à mettre en jeu leur sécurité pour plus de libeté, là où le français moderne veut risquer jusqu'à ce nom de liberté pour plus de sécurité. c'est qu'alors aucun parti en france n'attendait que l'autre lui cédât de bon gré ce pour quoi il luttait. tout se prenait ou s'arrachait par la force car "celui qui peut user de la force n'a pas besoin de recourir à la justice". en d'autres termes, on jugeait déshonorant en matière politique de quémander quoi que ce soit. c'est pourquoi l'histoire de france retentit de tant d'épisodes de violence. en cette matière elle n'a jamais donné au reste du monde des leçons de modération, mais bien plutôt d'excès. je ne veux évidemment pas prétendre que le peuple français aimait la violence en soi, et pour elle-même. mais il se rendait à cette extrémité par nécessité, ainsi que l'explique tocqueville : "le peuple se trouvait presque toujours hors d'état de résister à l'oppression autrement que par la violence. la plupart des moyens de défense étaient hors de sa portée; pour s'en aider il fallait avoir dans la société une place d'où l'on pût être vu et une voix en état de se faire entendre."
tocqueville, au demeurant penseur modéré (un modéré est un réactionnaire plus ou moins tempéré), et très éloigné de tout éloge de la violence, en admet cependant les vertus d'accoucheuse brutale, mais efficace. il note ainsi que la révolution "n'était que le complément du plus long travail, la terminaison soudaine et violente d'une oeuvre à laquelle dix générations d'hommes avaient travaillé. si elle n'eût pas eu lieu, le vieil édifice social n'en serait pas moins tombé partout, ici plus tôt, là plus tard; seulement il aurait continué à tomber pièce à pièce au lieu de s'effondrer tout à coup. la révolution a achevé soudainement par un effort convulsif et douloureux, sans transition, sans précaution, sans égards, ce qui se serait achevé peu à peu de soi-même à la longue".
comme passant outre à sa sensibilité personnelle, tocqueville semble plus porté à préférer cette "fin effroyable" qu'à supporter un "effroi sans fin", un monde qui agonise, s'écroule morceau par morceau sans qu'il soit permis d'espérer en voir la fin, comme iladvient précisément du monde que nous avons sous les yeux.
les français d'aujourd'hui, répondant de plus en plus massivement que nous vivons dans une société périlleuse, veulent se mettre à l'abri des périls. mais ils se trompent presque toujours lorsqu'il s'agit de désigner exactement ces périls; et quand ils ne les ignorent pas par simple bêtise, c'est par peur de les regarder en face. alors ils se rangent plus volontiers à l'opinion de leurs dirigeants, qui leur épargnent le souci de réfléchir sur la nature de ces périls et les moyens de les prévenir. et les français, fatigués par les longs débats sur la sécurité, consentent volontiers qu'on les dupe, pourvu qu'on les repose. ainsi, aussitôt entré en fonctions, le premier ministre de la cohabitation annonce un train de mesures pour protéger les français contre le terrorisme, ce fléau "qui menace nos sociétés industrielles". quand ils s'avisent que cette sécurité accrue et étendue se fera au prix d'une intensification de l'activité policière, non seulement pour surveiller les terroristes vrais ou supposés, mais aussi
tous les français, ils font mine de se rebiffer. mais ils avalent la couleuvre; et même plusieurs, les unes après les autres. hier ils raillaient le fait que d'autres nations aient pu faire de la délation un métier rémunéré. ce métier est aujourd'hui reconnu en france et cela n'émeut personne outre mesure.
on annonce aux français qu'ils circuleront bientôt avec des cartes infalsifiables, et ils acceptent le diktat, et l'idée sous-jacente qu'on les tient tous pour des faussaires. comme margaret thatcher, ils croyaient que, dieu merci, george orwell, s'il avait eu raison pour les pays de l'est, s'était complètement trompé dans ses prévisions en ce qui "nous" concerne. tous, ou presque tous, s'alignant sur le point de vue de la presse, ressentent comme un mal les dernières mesures de sécurité qui en préparent de pires, en paraissent incommodés mais restent persuadés en fin de compte de leur nécessité. on leur a dit que "plus de sécurité" c'est pour leur "bien-être" et ils se taisent. car les français ne connaissent plus guère que cette espèce de passion du bien-être, la mère de leur servitude, et qui s'accomode si bien avec les derniers vestiges des vertus privées, l'amour de la famille, la monotonie des moeurs, le respect de toutes les croyances et de l'ordre établi : tout ce qui fait des hommes rangés et de lâches citoyens. ils sont de plus en plus convaincus que le gouvernement seul peut assurer cet ordre public sans lequel leur confort et leur tranquilité sont perpétuellement menacés. ils veulent des policiers partout. le policier n'est plus seulement le défenseur de l'ordre, c'est l'ordre lui-même. aussi chacun voudrait en avoir une escouade à sa porte.
de la violence comme de la liberté, les français qui ont jadis usé avec bonheur de l'une et de l'autre, ont aujourd'hui perdu jusqu'à la notion ou n'ont jamais à l'esprit que celle qu'on leur fabrique sur mesure, au gré des temps. ils croient tous les mensonges qu'on leur débite sur ce sujet, et d'autant plus volontiers que ces mensonges sont rassurants, c'est-à-dire plus plaisants à leurs oreilles que la moindre vérité.
en matière de violence, et sur l'opinion qu'il faut en avoir, leur émotion atteint des proportions démesurées lorsque par exemple on évoque devant eux les bombes, à paris ou ailleurs. ces bombes, si mal réglées et si mal posées qu'elles tuent, quand il leur arrive d'être mortelles, même leurs manipulateurs, ont eu le mérite de provoquer le climat de terreur que les "terroristes" classiques n'ont pas pu installer. cette violence, dont personne n'a vu comment elle a ébranlé ou pu ébranler durant une minute ce régime, l'a, au contraire, fortifié.
les français s'effrayent du bruit des bombes. mais ils écoutent sans broncher et subissent comme une fatalité les interminables listes nécrologiques qu'on dresse sur leurs "routes de vacances", supportent stoïquement qu'on les assassine dans les hôpitaux, acceptent qu'on les mette à la porte de leurs maisons et de leurs villes, endurent les avanies que leur infligent toutes sortes de hiérarchies, voient détruire leur environnement et leurs sites comme s'ils ne leur appartenaient pas. bref, ils assistent, en spectateurs étrangers, à l'anéantissement de leur propre cité et de ses habitants, anéantissement mené par des moyens plus massivement meurtriers et destructeurs que toutes les bombes spectaculaires.
les français supportent aisément tous les excès qu'ils
subissent réellement, et s'indignent devant ceux qu'on leur
montre. ils sont comme ces français que raillait déjà pétrus borel : "ils n'ont rien compris à la haute mission de saint-just : ils lui reprochent quelques nécessités, et puis ils admirent les carnages de bonaparte... et ses huit millions d'hommes tués."
bibliographie : mezioud ouldamer, le cauchemar immigré dans la décomposition de la france