biosmog, tu as mentionné trotsky et lénine, et c'est sûrement là que commence notre désaccord puisque la ligne du monde diplomatique penche plutôt vers le trotsko-léninisme (voire le stalinisme, ce qui explique les sympathies pour des régimes aussi infâmes que celui de fidel castro) que vers les idées anarchistes. c'est le moins que l'on puisse dire.
cependant, il faut savoir que le léninisme est une idéologie autoritaire d'essence bourgeoise qui nie la liberté de la classe ouvrière. pour le léninisme, la classe ouvrière est une abstraction. le vrai sujet de l'histoire pour les léninistes n'est pas le prolétariat, mais le parti. le parti est le critère absolu de la vérité dictant ses écritures saintes. à l'intérieur du parti le salut, en dehors la damnation éternelle. cet avant-gardisme halluciné est le trait le plus antiprolétarien du léninisme, trait qui est étranger à marx, et qui provient de la franc-maçonnerie et du carbonarisme.
pour marx le parti était l'ensemble des forces qui luttaient pour l'auto-organisation de la classe ouvrière, et pas une organisation autoritaire et hiérarchisée.
les léninistes méprisent les formes d'organisation et de lutte prolétariennes : les assemblées, les comités élus et révocables, l'autodéfense, les conseils... ils les méprisent parce que ces formes d'organisation ignorent les partis et dissolvent l'état, y compris l'état "prolétarien".
pour exemple, en 1936, les léninistes en espagne vont nier qu'il y ait une révolution prolétarienne et vont tout faire pour la détruire en s'alliant avec les partis bourgeois républicains. les soviétiques vont intervenir en espagne pour mener la répression contre les anarchistes et les poumistes qui sont accusés calomnieusement par les staliniens d'être des nazis (alors que poumistes et anarchistes sont en première ligne au front contre l'armée de franco). les staliniens ne cesseront d'insufler du défaitisme parmi les masses afin de leur faire accepter leur commandement au lieu de l'autogestion.
en ukraine, les makhnovistes sont écrasés par l'armée rouge, de même que la révolte de kronstadt.
des idéologues néo-léninistes comme hardt et negri sont applaudis par le monde diplomatique. le léninisme à travers negri et ses acolytes, comme auparavant à travers le stalinisme (forme extrême du léninisme), effectue un retour au mode de pensée de la bourgeoisie (concrètement à sa phase de globalisation totalitaire) dans sa défense du parlementarisme, des compromis politiques et du spectacle des mouvements altermondialistes.
le negrisme soutient les fractions faibles, perdantes, de la domination, la bureaucratie politico-administrative, l'appareil syndical et les classes moyennes qui souhaitent un capitalisme sous tutelle de l'état.
le léninisme n'a jamais fait autre chose, il a toujours défendu des intérêts contraires au prolétariat.
dans la russie de 1905, il n'y avait pas de bourgeoisie capable de lutter contre le tsarisme et l'église. ce sont les intellectuels russes qui se sont chargés de cette tâche trouvant dans le marxisme une réponse à leurs aspirations nationalistes. le marxisme russe adopte alors un caractère différent du marxisme orthodoxe puisqu'en russie la tâche historique à remplir était celui de la bourgeoisie trop faible : abolition de l'absolutisme et construction d'un capitalisme national.
la théorie de marx adaptée par kautsky et bernstein identifiait la révolution avec le développement des forces productives et de l'état démocratique correspondant, ce qui favorisait une praxis réformiste qui pouvait fonctionner en allemagne, mais pas en russie.
bien que lénine adhérait intégralement au révisionnisme social-démocrate de kautsky et bernstein, il savait que la tâche des sociaux-démocrates bolcheviques ne pouvait être menée à bien sans une révolution. une révolution bourgeoise sans bourgeoisie.
la révolte ouvrière de 1905 avait affaibli le tsarisme et la révolution de février 1917 porta le coup de grâce.
bien que ce fut une révolution ouvrière et paysanne, elle n'avait pas de programme révolutionnaire ni de consignes particulières, ce qui fait que ce sont les représentants de la bourgeoisie qui prirent le commandement. la bourgeoisie ne sut pas ètre à la hauteur des événements tandis que le prolétariat s'instruisait politiquement et prenait conscience de ses objectifs : en peu de temps la révolution perdit son caractère bourgeois et adoptait un air résolument prolétarien.
pendant juillet et août, lénine défend encore un régime bourgeois avec une présence ouvrière, mais constatant l'avancée des soviets (conseils ouvriers), il change d'orientation et lance la consigne du pouvoir aux soviets, allant même jusqu'à théoriser sur l'extinction de l'état.
mais l'idée d'un pouvoir horizontal n'est pas léniniste car lénine avait organisé son parti sur le modèle militaire bourgeois, vertical, centralisé, la prise de décision venant toujours d'en-haut avec une direction et la base fortement séparées. si lénine était favorable aux soviets c'était pour les instrumentaliser et prendre le pouvoir.
la tâche principale de lénine ne fut pas le développement et le renforecement des soviets qui n'avaient pas de place dans son système, mais la conversion du parti bolchevique en appareil d'état bureaucratique, l'introduction de l'autoritarisme bourgeois dans l'exercice et la représentation du pouvoir.
les soviets, protagonistes de la révolution d'octobre, furent vite relégués au second plan, dépouillés de leur pouvoir par l'état "prolétarien" que les soviets n'avaient pas su détruire. les bolcheviques ont combattu contre le contrôle ouvrier, contre l'implantation de la révolution dans les usines et en général contre toutes les manifestations de la volonté souveraine ouvrière dans les organismes de démocratie directe et ceci au nom de la "dictature du prolétariat".
en 1920, les bolcheviques en avaient fini avec la révolution prolétarienne et les soviets n'étaient plus que des organismes amputés et purement décoratifs. les derniers bastions de la révolution, les marins de kronstadt et l'armée makhnoviste furent massacrés un peu plus tard.
en même temps qu'ils détruisaient les soviets, des émissaires bolcheviques débarquaient en allemagne (où le conseillisme avait gagné les masses ouvrières et les conseils sur le point de devenir des organes effectifs de pouvoir prolétarien) afin de poignarder la révolution dans le dos. partout, les bolcheviques semèrent le discrédit sur les consignes des conseils ouvriers et impulsèrent le retour au syndicalisme corrompu et au parti social-démocrate.
la révolution allemande des conseils fut vaincue par la calomnie, l'intrigue et l'isolement provoqués par les bolcheviques. rosa luxemburg y perdit la vie, massacrée par les sociaux-démocrates. sur les cendres de cette révolution, l'état allemand et la vieille social-démocratie purent se reconstituer avec la bénédiction de lénine.
lénine ne cessa pas de combattre les partisans du système des conseils en les insultant dans sa brochure "le gauchisme, maladie infantile du communisme". là il laissa tomber le masque : usant de la calomnie et du mensonge contre les communistes de gauche et les conseils, lénine y défend son pseudo-socialisme panrusse, qui porté à la pratique par staline se révèlera être un nouveau type de fascisme.
pour lénine, la libération des opprimés ne passait pas par la destruction du pouvoir, de la terreur, de la peur, des menaces. tous ceux qui veulent édifier un ordre bourgeois trouveront les meilleures conditions pour le faire dans la séparation absolue entre masse et dirigeants, avant-garde et classe, parti et syndicats. lénine voulait une révolution bourgeoise en russie et avait formé son parti dans ce but-là, mais la révolution russe adopta un caractère ouvrier et perturba ses plans. lénine dut vaincre avec les soviets pour ensuite vaincre contre eux.
le communisme des conseills fut balayé laissant la voie ouverte à la nep et aux plans quinquennaux de staline qui donnèrent naissance à une nouvelle forme de capitalisme où une nouvelle classe, la bureaucratie, jouait le rôle de la bourgeoisie. il s'agissait du capitalisme d'état.
en europe, les masses furent découragées, démoralisées et poussées vers la défaite perdant ainsi confiance en elles-mêmes ce qui conduisit à la soumission et au nazisme. hitler parvint facilement au pouvoir grâce au fait que les sociaux-démocrates et les staliniens avaient tellement corrompu le prolétariat que celui-ci se laissa aller sans réaction.
"fascisme brun, fascisme rouge" fut le titre d'une brochure mémorable d'otto rülhe qui démontrait que le fascisme stalinien d'hier était simplement le fascisme léniniste d'avant-hier.
la critique classique du léninisme menée par rosa luxemburg, karl korsch, les conseillistes (pannekoek, gorter, rülhe) et les anarchistes (rocker, voline, archinoff) laisse un bon nombre de vérités :
- les bases de l'action qui inclinera la balance sociale du côté opposé à celui du capitalisme ne se trouvent pas dans les méthodes d'organisation de type syndicale ou des partis politiques, ni dans les parlements, ni dans les institutions de l'état, ni dans des organisations compromises avec la domination.
- les masses opprimées sont isolées, dispersées, sans alliances.
- les activistes mettre par dessus tout la capacité d'association, le renforcement de la volonté d'agir et le développement de la conscience critique, par dessus même les intérêts immédiats.
- les masses ont à choisir entre avoir peur ou faire peur.
je conclus, en affirmant que ce revenu de base est ancré sur le modèle productiviste, conforme à l'idéal de croissance économique et industrielle qui a mené le monde au bourbier actuel.
(le texte est un peu long, mais il était nécessaire de situer historiquement les positions de chacun)