casseoreille a écrit :
Mon service militaire remonte à un demi-siècle, j'étais Chasseur au 6ème Bataillon de Chasseurs Alpins à Grenoble. J'en ai bavé pendant 4 mois de classe à obéir aux ordres de sous-officiers qui prenaient leurs premiers verres de blanc au foyer dès huit heures du matin! Je n'aimais pas les armes, manque de chance, dans un tir au fusil à 200 mètres j'ai eu la malchance de placer mes cinq balles bien groupées en pleine cible, ce qui m'a valu deux fois plus de séances de tirs pour devenir soi-disant un tireur d'élite.
Puis on m'a envoyé quatre mois à Brétigny sur Orge, pour suivre une formation de secrétaire comptable des Corps de Troupe, et par chance la cuisine était toute autre que celle du bataillon où l'on nous servait de la "bouffe" à cochons. En effet, ce régiment assurait également une formation de cuisiniers et j'ai cru rêver en dégustant mon premier repas.
Mais il a fallu rentrer au Corps, pour assurer la fonction de secrétaire du Commandant, et là, j'ai brassé des papiers, tapé à la machine à écrire les punitions qui tombaient sur mes potes comme sur moi-même lorsque j'oubliais d'envoyer un télégramme. Bref, au total 18 mois à attendre la quille, à devoir apporter des provisions lors des permissions pour parvenir à manger suffisamment.
Ma fonction proche du Grand Chef, me permettait de dire quelques vérités aux sous-officiers qui m'avaient malmenés au cours de mes classes. C'est ainsi que j'ai pu leur dire une phrase qui est restée ancrée dans ma mémoire et qui est partie comme çà sans que je réfléchisse vraiment à ce que je leur disais:
"L'Armée est très utile à notre pays, elle est la poubelle de notre Société!" Les Sous-Officiers n'ont pas apprécié mais je l'ai dit naturellement, franchement, c'était ce que mon subconscient ressentait exactement.
Voilà ce que je pense encore aujourd'hui de l'Armée, où l'on abaisse les gens, les faisant ramper dans la boue par plaisir sadique, organisant une marche très dure en montagne juste le lendemain de la première permission, alors que les plus éloignés avaient voyagé toute la nuit. Quatre mois de classes à supporter leurs ordres "braillés" dans un langage grossier et dévalorisant.
Quelle joie de quitter l'Armée après avoir perdu 18 mois de sa vie, retour amaigri, affaibli, car bien entendu je participais à toutes les manoeuvres, avec sac à dos lourdement chargé, mitraillette AA52 arme lourde, et machine à écrire, fixée sur le sac à dos. A cette époque nous étions entrés étudiants, traités comme des bêtes, et relâchés exténués!
Si les Boches décidaient de nous retomber dessus une 4ème fois, on serait bien beau avec de pareilles c....... molles.