Zorzi a écrit :
rapideyemove a écrit :
Zorzi a écrit :
Tu t'emballes un peu, REM. Est-ce l'effet Zepot et ses compliments sucrés ? Si tu avais vu le corps ensanglanté de cet homme abattu dans sa voiture, je ne sais pas si tu aurais eu des envies de rédaction.
Alors c'est que je me suis mal fait comprendre, deviner.
Et ce n'était en rien une rédaction, une page à faire, pour tourner en rond comme un chien de cirque.
Mais un hommage réel, endurant.
C'était aussi, pour répondre et prolonger la juste objection d'
ES125er concernant la foi de l'homme martyrisé et l'absence de discernement quand on attaque aveuglément une religion, l'exploration et la remémoration d'une expérience qui tentaient de montrer à quelle hauteur pouvait monter le chant soufi, avec celui qui porte le Qawwalî et le donne, au devant de ce que j'appelle, faute de mieux, la barbarie et contre elle, sans autre solution, j'entends absolument.
Non, vraiment, aucune phrase de prestidigitateur pour dissimuler derrière des mots en fanfare, les cadavres outragés quels qu'ils fussent, terminés au couteau jusqu'à l'obscénité et jetés dans un puisard ou abattus en pleine rue, dans une voiture.
Ta subtilité est beaucoup moins hâtive d'habitude,
Zorzi.
Alors que, au plus vrai, nous parlions bien de la même chose, si nous voulons bien y penser, au fond.
Quant
«aux compliments sucrés», disons que je conserve la leçon de Nusrat, je me méfie résolument du diabète...
Pour plusieurs raisons que je tairai, je suis particulièrement bouleversé et concerné par cet assassinat ignoble. Dans le monde dans lequel je vis, on rédige toutes sortes de choses décoratives sur les artistes et là, en fin de saison, je suis en OD. Je ne doute pas de ta sincérité mais il est difficile de ne pas trouver une certaine emphase dans certaines formulations comme dans ce paragraphe au-dessus qui va de de "Non, vraiment" à "dans une voiture".
Quant à la petite pique qui m'est destinée, elle est plus révélatrice de celle que tu as ressentie à ma réaction. Je ne suis ni belliqueux ni ironique et j'apprécie tes interventions sinon je n'aurais pas pris la peine de te répondre. A bientôt j'espère.
Dans le paragraphe que tu relèves, j'étais au plus clair dans un mouvement de colère noire.
Pas à ton à ton égard, ça va de soi.
Mais aucune emphase, non.
Juste la réalité d'une chose vue, il y a je crois plus d'un an, pas de manière préméditée et qui continue de me poursuivre : l'assassinat en Syrie, comme je le résume, d'un jeune journaliste américain, dépouille jetée ensuite dans un puisard en béton.
Et je parle à dessein de ces cadavres outragés, comme on peut en voir l'exposé abject, immonde, avec tout un luxe de considérations anatomiques, dans les 8 pages publiées à la gloire de l'œuvre de l'imbécile parisien qui a pour nom Marc–Édouard Nabe, dans le journal en français de Daesh, parce que le crétin marquait sa profonde compréhension de leurs objectifs.
Et je fais bref.
Alors, de l'emphase, non, à nouveau, au dernier degré comme au premier.
De l'euphémisme, à la rigueur.
Enfin, rassure–toi, je ne te servais pas de pique.
Juste une interrogation amusée, surprise.
Parce que, vois–tu, l'objection que tu marquais, même mal ciblée (enfin de mon point de vue), de tirer de la phrase avec effet de manches sur du vrai drame, de la vraie tragédie en bloc, concrète, sans détour, en faisant miroiter ses plumes de style en toc le long des allées du bazar de l'émotion à deux sous, une petite larme à l'œil, un petit hoquet du nez humide, et hop, on rentre tranquille, apaisé, dormir sur ses deux oreilles, à la maison, comme après le cinéma du samedi soir ; eh bien,cette objection, je la comprends et la partage.
J'étais simplement surpris, je l'ai dit, de cette appréciation bien hâtive que tu faisais de mes paroles ; or, comme je partage au jugé ce souci, j'ai pris cette appréciation hâtive pour une assimilation carabinée de mes paroles à celle des trafiquants d'émotion qui, comme le disait Vautrin envieux à Rastignac, brillent en société, la manipulent et en profitent parce qu'ils connaissent bien tous les labyrinthes de l'autre langue codée de la fauche et de la zone, celle des escrocs et des voleurs les plus rapaces,
«l'argot du cœur».
Cheminer des mots sur ces morts, les cheminer pour eux, jusqu'à la fragilité infime d'un hommage (j'ai la faiblesse de le croire), dans une langue à soi, qui n'entend pas être confondue avec la communication bravache et braillarde du comptoir, est sans doute une autre affaire.
Il ne s'y rencontre alors aucun sophisme.
Peut-être une prosodie, un phrasé, une pause ou un silence.
Pas le dernier mot.
À la revoyure,
Zorzi, bien sûr, cela va sans dire
.
Et respect, r.e.s.p.e.c.t, mon
Colonel, avec Otis ou Aretha, à l'œil, ou du moins à l'oreille.
«Wir leben unter finsteren Himmeln, und –es gibt wenig Menschen. Darum gibt es wohl auch so wenig Gedichte. Die Hoffnungen, die ich noch habe, sind nicht groß. Ich versuche, mir das mir Verbliebene zu erhalten. »
Paul Celan, 18 mai 1960, Lettre à Hans Bender.