Il est d'abord à noter que les pédales testées ici sont toutes purement analogiques, et que la miniaturisation ne se fait pas au détriment des composants. Seuls un savant agencement des composants sur un circuit imprimé multicouches, le décentrage des connecteurs jack d'entrée et de sortie ainsi que l'absence de compartiment pour la traditionnelle pile 9v ont permis ce drastique gain de place.
Pour ce qui est de leurs caractéristiques communes, les pédales Mooer ont un système de switching true bypass, un connecteur d'alimentation 9v situé à l'arrière, ce qui permet de les placer très proches les unes des autres sur un pedalboard. Elles possèdent chacune une couleur différente et un lettrage très fortement calqué (mais que fait la police?) sur les modèles originaux dont elles sont inspirées. Un gros potentiomètre permet généralement d'ajuster le gain, deux autres très discrets se chargent du volume et de la tonalité. Un mini-switch à deux ou trois positions, selon les modèles, offre plusieurs possibilités de comportement et/ou d'égalisation générale. Le tout dans un boîtier en métal qui paraît plutôt solide.
La Green Mile est un clone plutôt bien pensé de Tubescreamer TS9. Elle réunit les caractéristiques originales : un overdrive un peu voilé, respectant le timbre naturel de l'instrument utilisé. Le mode « Warm » sur le mini-switch sélectionne le comportement traditionnel d'une TS-9, avec une plage de gain similaire allant du léger crunch jusqu'au lead franc et permettant de magnifiques feedbacks à l'ampli, tout en gardant cette sensation de mix entre un son saturé et un son clair. Comparée avec une vraie TS-9, elle livre légèrement moins de basses fréquences, compresse moins, elle est plus tranchante et produit moins de bruit de fond. Elle ne sera pas la meilleure candidate pour ceux qui aiment le son « Tubescreamer » seul, mais se révélera parfaite pour ceux qui souhaitent l'utiliser comme booster : rajouter du gain sur un son crunch à l'ampli, et réveiller certaines fréquences manquantes, rajouter du corps et de la granularité à une distorsion, sans risquer un trop plein de graves gênants. Ce pour quoi la famille TS est réputée, somme toute ! La position « Hot » du mini-switch fait se comporter la pédale d'une toute autre manière, la transformant en une machine à blues boueux assez terrible. Exit la sensation de clarté originelle de type TS, nous avons maintenant affaire à un drive rappelant un circuit tweed boosté riche en graves, lorgnant vers le léger fuzz dans les basses fréquences. Sur cette position, la Green Mile va moins loin dans le gain, mais plus loin en volume. Nous avons ici une vraie pédale 2 en 1 : un dirty boost limpide et chaud, et une OD blues graisseuse qui marche toute seule. Bien joué !
La Hustle Drive, basée sur la très prisée OCD de Fulltone, est un overdrive très linéaire, beaucoup plus ouvert que la Green Mile. L'intérêt, à l'instar de cette dernière, est qu'elle offre deux utilisations possibles car sa plage de gain varie du vrai clean à la quasi distorsion. En clean boost, il est très facile de stimuler les fréquences nécessaires à une rythmique bien saillante, soit en laissant parler le haut du spectre (avec le mini-switch en mode High Pass) ou une EQ droite (mini-switch en mode Low Pass). La Hustle Drive est parfaite pour un son rythmique à la Malcolm Young ou des accords pleins et tranchants à la Joe Strummer. A fort gain, elle délivre un overdrive agressif avec des petits airs de distorsion, et une bande de fréquences très pleine : pas de perte de graves, pas d'aigus envahissants, pile au milieu quoi ! Ayant parlé de cette pédale avec quelques fans de l'OCD de mon entourage, il s'avère que ceux-ci ont été bluffés, et selon leurs dires la Hustle Drive se révèlerait même meilleure que les premières éditions de l'OCD, et comparable à la version 4.
Voici la troisième pédale « low gain » de ce test, et celle qui lorgne le plus vers la distorsion. La Blues Mood, elle, est une mini réplique la Blues Driver, intégrant la fameuse modification par Keeley Electronics, qui a conquis des guitaristes aussi divers que Jon Herrington, The Edge et John Mayer. C'est un overdrive très dynamique et énervé, respectant à merveille les attaques du médiator, laissant parler davantage les basses et hautes fréquences que les médiums, bien présents toutefois. Comme les deux précédentes, elle peut servir de booster, mais elle est plus apte que les deux autres à délivrer une saturation passe partout. A faible gain, elle rappelle la Green Mile mais avec un caractère un peu marshallien. A fort gain, elle est très granuleuse et a des allures de Boss DS-1, sans le côté fuzzy. Le mini-switch, lui, semble agir en pré-gain et lorsqu'on bascule sur la position bright, active un très léger treble boost, délivrant un soupçon de gain et de brillance en plus. Du sérieux !
Passons maintenant aux modèles high gain. La Black Secret reprend les caractéristiques de la ProCo Rat. Bien que déjà sur le marché dans les années 80, la Rat contribuera grandement à la signature sonore des 90's et de la vague grunge. La série Rat a séduit à la fois des bassistes (Krist Novoselic de Nirvana) et des guitaristes (Dave Grohl, Johnny Greewood, Jeff Beck) avec son grain très brut, presque brouillon, ne respectant pas vraiment le timbre de la guitare, mais délivrant un son puissant très adapté au power rock sans fioriture. La série Rat comprend de nombreux modèles à gains variables, tout en restant dans le même esprit. La Black Secret en combine deux dans son petit châssis : la Vintage Rat (qui est la réédition de l'originale datant de 1991) et la Turbo Rat, qui délivre plus de niveau de sortie et est un poil creusée dans les médiums. Le mini-switch permet de passer d'un modèle à l'autre. Le potentiomètre de tonalité agit comme un filtre qui voile progressivement les aigus. Même si le caractère brut de la Black Secret la destine de prime abord à des rythmiques grungy et velues, elles est aussi très chantante, il suffit d'écouter ce qu'en a fait Jeff Beck tout au long de l'album Guitar Shop ! La Mooer, une fois de plus, est bluffante de ressemblance avec l'originale.
Nous avons ici un clone fidèle de la Riot de Suhr. Vous pouvez comparer ce test avec le test de l'originale de Suhr, paru il y a quelques mois sur Guitariste.com... C'est une pédale high gain au son très californien, très propre et qui ne bave jamais, très prisée par les guitaristes de jazz fusion. A l'instar de l'originale, le mini-switch offre trois possibilités de voicing. A l'oreille, le mode Classic compresse un peu plus le son et offre un léger boost dans les hautes fréquences, ce qui donne un petit côté vintage. Le mode Tight propose une bosse dans les médiums, et le mode Neutral, vous l'aurez deviné, une égalisation neutre. On peut reprocher à la Solo un léger trop plein de bas médiums et un manque de présence, mais c'est une histoire de goût. Il faut avoir un jeu très propre pour la faire sonner. Je n'ai personnellement pas accroché sur le caractère linéaire de la Suhr Riot, et la Solo m'évoque la même chose. Il faut y voir un gage de fidélité dans le sérieux de la copie Mooer !
Le circuit de l'Ultra Drive est basé sur la mythique Boss DS-1 (Joe Satriani, Steve Vai, Tom Morello etc...) modifiée par Keeley Electronics. Le mini-switch permet de naviguer entre trois modes : Original : reprenant le voicing de la première mouture de Boss, le mode Extra avec la mod de Keeley : plus de volume et de corps et enfin le mode Ultra, offrant plus de gain. Tout de suite, l'esprit du grain typique de la DS-1 est présent : un drive compressé, riche en harmoniques et granuleux à souhaits qui a tendance à virer vers le fuzz. Mais je lui ai trouvé quelques défauts par rapport à l'originale et à d'autres déclinaisons que je possède et utilise beaucoup (comme la Vox Satchurator). Lorsqu'utilisée avec des micros doubles un peu sombres, comme c'est le cas dans la vidéo avec une Gretsch, le côté fuzz de l'Ultra Drive est vraiment trop prononcé. Aussi, je lui ai trouvé un petit peak de médiums assez désagréable et difficile à gérer lors d'une utilisation en live, et tous les autres membres du groupe en ont fait la remarque... Dommage, car sur le papier l'Ultra Drive a tout pour plaire, et le grain de la pédale est très réussi. Il s'en suffirait peut être de peu pour que ces défauts soient corrigés dans une version ultérieure...
Enfin, pour terminer, voici la FOG, une pédale de fuzz supermassive pour guitare et basse, basée sur la ZVEX Wooly Mammoth. Attention, nous n'avons pas là une fuzz hendrixienne pour deux sous ! C'est du matériel à ne pas mettre entre toutes les mains, c'est dangereux et l'on peut se blesser quand on n’a pas l'habitude. Avec la FOG, on se retrouve à piloter un quasi synthé à ondes carrées, le caractère de la guitare utilisée disparaît TOTALEMENT ! Avec la possibilité de régler avec précision le seuil de déclenchement d'un noise gate avec le potentiomètre Squeeze, cette fuzz est une superbe machine à riff monophonique. Ayant possédé auparavant une ZVEX, je peux affirmer que la FOG procure la même joie. Cette pédale ravira les fans de QOTSA à l'époque de Song For The Deaf !
Verdict...
Une bonne partie des pédales Mooer, dont celles testées ici, ont été développées par Runbo Guo, grand sorcier chinois de l'électronique au service des guitaristes. On pouvait donc s'attendre à de la grande qualité. Reste à savoir si les quelques trente cinq autres modèles de la gamme sont aussi bons que ces drives. Les Mooer, hormis le sérieux de leur rendu sonore, semblent relativement solides. On regrettera l'absence d'un compartiment pour pile 9V, et il peut être parfois un peu difficile de d'ajuster les mini-potentiomètres noirs dans la pénombre d'une scène, mais on ne peut pas tout avoir... En effet à environ 60€, je ne vois aucune contre indication à ajouter quelques Mooer à son pedalboard.
Les plus
La taille
La ressemblance aux originaux
Ca fait longtemps qu'on n’est pas sorti d'un magasin avec trois 3 pédales pour le prix d'1 !
Les moins
Pas de compartiment pile
L'Ultra Drive décevante
Rien d'autre !