shenton a écrit :
c'est sur que je n'ai pas passé en revue toute l'evolution de la musique, d'une part parceque je ne la connais pas suffisemment d'autre par parcequ'il faudrait sans doute un livre entier,
mais il me semble que des qu'on passe dans un systeme polyphonique , on arrive rapidement dans le systeme tonal. le contrepoint de la musique baroque est en effet un principe de superposition melodique, mais il s'agit surtout d'un systeme d'ecriture et quand on fait des analyses, on constate qu'on est en general dans un systeme parfaitement harmonique tonal.
Pas tant que ça justement ! Les premières traces de polyphonie remontent au XIIè siècle (l'école de Notre-Dame avec Léonin, Pérotin etc) et les musicologues considèrent généralement que la tonalité se constitue en partie au cours du XVIIè siècle, donc pendant la période baroque que tu évoques (qui reste tout de même un cas limite pour savoir s'il faut parler de modal ou de tonal, disons que ça dépend !)
Ca a donc mis un certain temps quand même.
Le point de vue adopté par bon nombre de musicologues (discutable dans une certaine limite) est d'observer ce qui "gouverne" une pièce pour lui attribuer l'étiquette modal ou tonal (cela est valable pour la musique ancienne, c'est un peu différent pour les musiques plus récentes). Donc pour eux, un morceau est tonal lorsque les accords et leurs fonctions "plient" les mélodies à leurs exigences : cet accord arrive là, donc je ne fais plus de que je veux mélodiquement ...
Inversement, un morceau est modal lorsque les mélodies semblent déterminer les accords, leur durée, leur place avec souvent quelques passages "illogiques" d'un point de vue strictement fonctionnel : je pars de cette mélodie, je rajoute mes autres lignes mélodiques, mes règles de contrepoint sont respectées, mes enchaînements d'accords sont certes bien jolis, mais je me fous de leur place et de leur fonction dans la pièce ...
Tu peux donc te retrouver avec plusieurs "cadences parfaites" (je mets ça entre guillemets), ça ne sera pas nécessairement tonal pour un musicologue.
J'espère ne pas passer pour un pinailleur, d'autant plus que cette conception n'apporte pas grand chose au musicien actuel, mais ça me semble intéressant tout de même
Mais ça permet peut-être de mieux cerner le "modalisme" de Ravel, la tonalité reste la base de construction, mais on lui intègre des passages modaux, disposés ici et là comme des plages plus ou moins autonomes.
Tu peux par exemple écouter le 2è mouvement de la sonate pour violon et piano.
Pendant environ 1:30, le morceau repose sur une couleur bien identifiable, un mode est clairement mis en valeur. Mais cette partie modale, ce modalisme évolue dans une construction tonale plus vaste (je suis pas allé vérifier la partition mais le simple mot "sonate" suggère une vue d'ensemble tonale)