wil78 a écrit :
Je trouve que la théorie contient un paradoxe pour moi:
1) si j'ecoute Patrick, la théorie ne precede pas la musique. En fait elle cherche à mettre des termes sur des usages.
2) le problème c'est que dans les faits si on s'interesse à la theorie c'est souvent avant de jouer pour...jouer justement.
En fait, la compréhension de n'importe quel phénomène passe par son expérimentation. Un exemple un peu "scientifique" est le concept d'accélération. On peut décrire l'accélération à partir de la dérivée seconde, mais cette "théorisation" apporte peu d'information si on n'a jamais été plaqué au siège de sa voiture en appuyant sur le champigon. Pourtant, il est absolument impossible de construire une voiture de course sans user un minimum du calcul différentiel.
De cette simple observation, on peut déduire que la compréhension (la théorie) ne précède pas l'expérimentation (la pratique). Et quid de la musique?
La théorie permet d'apporter des réponses à tous les niveaux de l'apprentissage. Cela sous-entend que :
1 - il n'y a pas de théorie sans apprentissage, et que donc la pratique précède la compréhension
2 - la théorie a une vocation "totalitaire", non pas dans un sens castrateur, mais dans le sens où elle cherche à être exhaustive.
Pour reprendre l'analogie avec l'apprentissage des langues :
- apprendre la théorie sans pratiquer revient à apprendre une langue uniquement à partir de sa grammaire. De nombreux linguistes apprennent les langues uniquement sous l'aspect grammatical. Cela peut sembler artificiel, mais c'est ainsi.
- le meilleur moyen d'apprendre les rudiments d'une langue étrangère est de passer par une assimilation préalable des concepts grammaticaux. Les plus grands progrès apparaissent lorsque cet apprentissage "théorique" est combiné à une immersion et une pratique linguistique. Il se trouve que j'ai vécu dans de nombreux pays, et que cette règle d'apprentissage s'est avérée optimale.
- on peut apprendre une langue sans apprentissage direct : c'est l'apprentissage passif, ou immersion. Il faut savoir qu'il fonctionne fort bien chez les jeunes enfants et beaucoup moins bien chez les adultes. D'autre part, "l'oreille linguistique" de l'enfant se ferme à à la dixième année. Ce qui signifie que notre oreille s'est refermée depuis bien longtemps sur des accents : nous sommes "sourds" à de nombreuses intonations.
La conclusion de cette analogie est que :
1 - la compréhension (la théorie) ne précède jamais la pratique, mais qu'elle accélère le processus d'apprentissage.
2 - on peut apprendre une musique sans cours ni théorie par une méthode d'immersion : c'est le cas d'un jeune noir américain qui va "groover" dès l'âge de 6 ans sur des rythmes rap.
3 - plus on avance dans l'âge, plus nos facultés d'analyse nous permettent de compenser un apprentissage basé sur les sens uniquement.
Et pour finir : la musique est, à mon sens, l'art le plus facilement sujet à la théorie. Et pour une raison assez simple : c'est l'art qui repose sur la combinaison du plus petit nombre de signaux fondamentaux (douze notes, valeurs rythmiques très simples, etc...). La musique est l'art le plus facilement sujet à une "binarisation". Il en découle que la théorie de la musique est elle aussi beaucoup plus aisée que dans les autres arts.