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jules_albert




avant la bureaucratisation du monde de bruno rizzi (1939), il y avait l'uniformisation du monde par stefan zweig : https://leblogderolandjaccard.(...)bres/

« Malgré tout le bonheur que m’a procuré, à titre personnel, chaque voyage entrepris ces dernières années, une impression tenace s’est imprimée dans mon esprit : une horreur silencieuse devant la monotonie du monde. » - Stefan Zweig, 1925

https://www.editions-allia.com(...)monde

Dans ces pages habitées d’une lumineuse mélancolie, il décrit déjà l’avènement de l’instantanéité et de la simultanéité, à travers la mode, le cinéma, la radio ou même la danse. Facilité par des bouleversements techniques profonds, ce culte de l’éphémère joue un rôle central dans l’unifor­misation critiquée par Zweig.

S’il dénonce la gravité d’un tel processus­, c’est tout simplement qu’il en va de notre liberté. À une époque où le fascisme commence à poindre, Zweig nous met en garde contre une autre forme de tyrannie. Car il n’y a qu’un pas de l’uniformisation des modes de vie à la servitude volontaire des individus. En écho à la massification de la vie sociale, cette uniformisation ouvre finalement la porte à toutes les dérives autoritaires du pouvoir, dont Zweig perçoit le risque avec sensibilité. Dernier recours pour les individualités récalcitrantes : fuir en elles-mêmes, pour oublier l’oppression du collectif.


sur le même thème mais plus récent (1997), l'abîme se repeuple.
Sans valeur marchande : https://debord-encore.blogspot(...).html

La peste citoyenne. La classe moyenne et ses angoisses : http://parolesdesjours.free.fr(...)e.pdf
Lao
  • Lao
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  • #5207
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    Lao
    le 22 Janv 2021, 20:53
A propos de Zweig mais rien à voir, je suis en train de lire L'été de cristal de Philip Kerr, un roman policier dans le Berlin entre l'accession d'Hitler au pouvoir et l'anschluss. Glaçant.
Pourquoi tant de haine ?
"Tant qu’on n’aura pas diffusé très largement à travers les hommes de cette planète la façon dont fonctionne leur cerveau, la façon dont ils l’utilisent et tant que l’on n’aura pas dit que jusqu’ici que cela a toujours été pour dominer l’autre, il y a peu de chance qu’il y ait quoi que ce soit qui change. " Henri Laborit.
Blow Up
Citation:
Si j'ai bien compris Debord, le " spectacle " signifierait que, pour les hommes, c'est la fin des haricots. Leur être, falsifié par la marchandise, se serait éloigné dans une représentation, condamné à ne revenir que sous les formes dégradées et dégradantes de l'avoir et du paraître. Quel fut, au juste, cet être ? Debord ne le précisa jamais. Et pour cause. Semblable à Rousseau, sous couvert d'énoncer la " critique radicale " d'un monde privé d'humanité, l'essentiel fut pour lui de stigmatiser ses contemporains et de leur donner des leçons. " Le seul fait de se plaindre rend la vie supportable ", disait Nietzsche. J'aurais pu intituler ce petit livre : Guy Debord, un intellectuel du ressentiment.




"Macron est de gauche" BluesBarbu le 20/02/2021
Mr Park
Lao a écrit :
A propos de Zweig mais rien à voir, je suis en train de lire L'été de cristal de Philip Kerr, un roman policier dans le Berlin entre l'accession d'Hitler au pouvoir et l'anschluss. Glaçant.


J'ai lu ça, ça fait partie de la trilogie berlinoise, essaye de trouver les 2 autres, ils sont très bien
jimfire
D'ailleurs les autres tomes de Gunther sont très bons aussi.... En fait Kerr est très bon
Lao
  • Lao
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  • #5211
  • Publié par
    Lao
    le 23 Janv 2021, 16:50
J'ai les 2 autres tomes donc ils seront ajoutés à ma liste ....
jules_albert

sublime évocation de paris par guy debord en 1978.

éric hazan, balzac, paris







à paraître en mars, le tumulte de paris

Ce livre a été entrepris pour défendre Paris dont on dit aujourd’hui tant de mal – ville muséifiée, atone, embourgeoisée, etc. Le plus fort, c’est que ces propos ne sont pas tenus exclusivement par les ennemis habituels de Paris, ceux qui s’en tiennent à distance, qui ont peur de ses explosions périodiques. Mais ceux que Paris a abrités, éduqués, cultivés, ceux qui lui sont largement redevables de ce qu’ils sont devenus, ceux-là participent au dénigrement de leur ville nourricière. C’est peut-être qu’il y a une part justifiée dans cette façon de déboulonner Paris, de ruiner le mythe.
Depuis les funestes années Pompidou le Paris populaire est grignoté, soit par des destructions (le Vel d’Hiv où avait lieu la grande kermesse populaire des Six Jours avec Édith Piaf et Marcel Cerdan, la place des Fêtes où les habitués de restaurants avaient encore leur rond de serviette en 1960, la rue Watt et ses alentours, chère aux situationnistes), soit plus insidieusement par une sorte de colonisation interne qui finit par pousser les premiers habitants, les indigènes, chassés par la hausse des loyers, à s’établir plus loin, à Saint-Denis s’ils ont de la chance, ou à Garges les Gonesse, à Goussainville ou dieu sait où. Si le capitalisme continue à prospérer, le processus finira par vider Paris de tous ses pauvres et s’étendra à la première couronne où ils auront migré. Mais si nous sommes à la fin d’un cycle commencé avec Thermidor – bien des signes permettent de l’espérer – alors tout va redevenir possible, y compris le retour des exclus, des entassés, des méprisés. En attendant, il faut garder une main sur la ville, en connaître l’histoire et les détours pour que le moment venu elle puisse reprendre ses couleurs et sa gloire.
Tel est l’objet de ce livre. Il a un modèle : le "Tableau de Paris" de Louis-Sébastien Mercier, dont les derniers volumes furent publiés en 1788. Sans chercher à égaler cette œuvre admirable, je lui ai emprunté l’idée de textes courts, discontinus, sur des sujets variant d’une page à l’autre voire à l’intérieur de la même page. Je les ai peu retravaillés et les ai laissés dans l’ordre où ils ont été écrits.




Citation:
Si j'ai bien compris Debord, le " spectacle " signifierait que, pour les hommes, c'est la fin des haricots. Leur être, falsifié par la marchandise, se serait éloigné dans une représentation, condamné à ne revenir que sous les formes dégradées et dégradantes de l'avoir et du paraître. Quel fut, au juste, cet être ? Debord ne le précisa jamais. Et pour cause. Semblable à Rousseau, sous couvert d'énoncer la " critique radicale " d'un monde privé d'humanité, l'essentiel fut pour lui de stigmatiser ses contemporains et de leur donner des leçons. " Le seul fait de se plaindre rend la vie supportable ", disait Nietzsche. J'aurais pu intituler ce petit livre : Guy Debord, un intellectuel du ressentiment.

j'aime bien schiffter, même s'il passe complètement à côté du sujet (c'est ce qui arrive lorsqu'on traite des thèmes dont on est trop éloignés, ce qui est le cas de schiffter par rapport à la critique révolutionnaire).

mais il lui arrive d'énoncer des choses avec justesse, par exemple sur l'empathie hypocrite et les faux bons sentiments si courants de nos jours :

Le « gnangnan » qualifie une forme d'altruisme dont le ressort est l'indignation mêlée de sensiblerie contre une forme de tragique frappant les foules humaines et rebaptisée le « Mal » (terrorisme, catastrophe naturelle, guerre civile, épidémie, etc.). Donnant lieu à bien des « blablas » moraux, politiques, religieux, médiatiques, entre autres, le « gnangnan » permet aux individus tournés en temps ordinaire vers l'hédonisme égoïste et consumériste de se sentir bons, justes et indispensables — du côté du Bien.



autre nouveauté :
Sans valeur marchande : https://debord-encore.blogspot(...).html

La peste citoyenne. La classe moyenne et ses angoisses : http://parolesdesjours.free.fr(...)e.pdf
Sola
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  • #5213
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    Sola
    le 11 Fév 2021, 21:05
J'ai envie de lire ça:

https://www.decitre.fr/livres/(...).html

J'ai entendu l'auteur à la télé, je l'ecouterais des heures durant. Très intéressant et très belle voix.
Le bonheur rangé dans une armoire
Mr Park
Sola a écrit :
J'ai envie de lire ça:

https://www.decitre.fr/livres/(...).html

J'ai entendu l'auteur à la télé, je l'ecouterais des heures durant. Très intéressant et très belle voix.


Tiens, j'en ai entendu parler aussi, via une vidéo Brut je pense. Bien perché le gars, passionnant!
Lao
  • Lao
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  • #5215
  • Publié par
    Lao
    le 21 Fév 2021, 19:02
Ce qui est terrible c'est que quand je lis du Gotlib, j'imagine les dessins de Gotlib.
Marcel (jactances) a écrit :
La charité.

Lorsqu'on est le spectateur impuissant des misères du monde, il y a de quoi se poser mille questions à propos de cet animal dont la Sainte Bible affirme qu'il serait le plus sublime de toute la création : l'être Humain. Au crépuscule d'une existence entièrement vouée à l'Humanisme, l'homme de bonne volonté peut être saisi de doutes quant au bien-fondé d'une telle soi-disant perfection.

Oui. Les plus fermes assurances peuvent vaciller chez ceux-là même qui ont toujours eu la plus aveugle confiance en la bonté de leurs frères. Quand bien même celle-ci se dissimule parfois sous le sombre vernis de la barbarie, du vice, du stupre, du lucre et de la mauvaiseté (ça existe, j'ai vérifié dans le dico. Remarquez qu'il y a marqué "vieux".). Moi qui, dans ma naïve candeur, ai toute ma vie donné carte blanche à la grandeur et aux vertus de mon prochain, voici que soudain j'hésite.

Justement, je pensais à ça l'autre jour en me rendant à une station de radio dans le but d'y accorder une interview qui a d'ailleurs été diffusée sur ondes courtes samedi dernier à deux heures du matin. Parfois, au volant de ma voiture, je me mets à penser. Il m'arrive alors d'être brutalement saisi par d'intenses questionnements existentiels. C'est parce que je n'ai pas d'auto-radio. Or donc, que je me disais comme ça, le Christ, lorsqu'il a racheté tous les péchés du monde, se serait-il fait gruger ?

Cette question m'emplit d'une angoisse qui, me saisissant de ses griffes d'acier, donna naissance à une épouvantable douleur abdominale que j'attribuai à la gravité du problème.

Une fois garé, je me rendis compte qu'en fait, la douleur avait pour véritable origine une terrible envie de pisser (A noter que cela ne faisait que déplacer le problème sans pour autant l'occulter, mais là n'est pas la question).

Je me voyais mal, arrivant dans le studio radio qui m'avait si aimablement convié, et demandant à brûle-pourpoint où se trouvaient les cabinets, au moment précis où l'on me demanderait si j'aimerais boire un café. (quand on va à une radio quelle qu'elle soit, la première chose qu'on vous demande est "Vous voulez un café ? Déca ? Léger ? Serré ? Au lait ? Sucré ? Non sucré ?") Je parvins à me retenir et comme j'étais un peu en avance, j'entrai précipitamment dans le premier bistro venu où je demandai d'une voix rauque un Vittel-menthe et où se trouvaient les toilettes.

Le tavernier qui tapait le carton avec des potes pointa son index sans un mot et je me ruai dans la direction indiquée. Je pus ainsi mettre fin à ma torture avec le soulagement d'une miction accomplie. De retour au bar je m'apprêtai à refaire le plein en avalant la consommation commandée, laquelle, à ma grande surprise, n'était pas sur le zinc. Le patron, réinstallé à sa partie de belote, ne me prêta aucune attention. Je me rappelai à son bon souvenir d'un discret "S'il vous plaît...".

"Ah oui. Il voulait quoi, déjà ?" me demanda-t-il, ajoutant "Dix de der !" en posant sa dernière carte. Puis il se leva et vint vers moi. "Un Vittel-menthe, un café, un ballon de rosé. Ce que vous voulez, répondis-je avec un rire faussement jovial, c'était juste pour les toilettes !"

Le saint homme, me fixant d'un regard plein de compassion et de miséricorde, eut alors cette parole qu'on aurait dite tirée des Evangiles : " Ah bon ! Ben fallait le dire ! Je vais quand même pas le forcer à consommer rien que parce qu'il avait besoin de tirer un bock !" Puis il ajouta du ton d'un pépère grondant gentiment un gosse qui dit une grosse bêtise :
"Allez, allez. Voulez-vous bien vous sauver !"

Moi qui commençais à douter du genre humain, je ne pus réprimer une larme devant une telle générosité apostolique. Avant de refermer la porte, je jetai un dernier coup d’œil dans la salle. Le patron avait rejoint ses partenaires de belote. Les cartes ayant été distribuées, il ramassa son jeu, le consulta en connaisseur et annonça d'une voix rocailleuse : "Je prends à cœur et j'annonce une tierce belotée." Et cependant qu'il prononçait cette humble parole, je crus voir comme un halo de lumière nimber son visage.

Elle est à toi cette chanson, toi le patron qui sans façon m'a permis d'aller lancequiner un godet quand ma vessie était gonflée. Ce n'était rien qu'un cabinet mais il m'avait vidé le corps, et dans mon âme il brûle encore à la manière d'un grand palais.
Lao
  • Lao
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  • #5216
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    Lao
    le 27 Fév 2021, 16:56
Le roman que je viens de lire porte sur un sujet qui a rempli des centaines de pages de polémiques sur backstage. Mais rien ne vaut la plume d'un bon écrivain, surtout en gain de temps.

Septembre 2005. l'année des émeutes de Clichy sous bois, l'année où le petit à talonnettes brandit la menace du Karcher. 93, ses HLMs, caves et escaliers, zones et ruines industrielles, les trafics de drogue, bagarres entre bandes rivales et influence grandissante des salafistes, petits malfrats vivant de proxénétisme, racisme quotidien et communautarisé, ....Des territoires que la République se doit de reprendre au plus vite à la barbarie.
Ce livre raconte les débuts en tant que prof d'une jeune diplômée d'un IUFM, dans un collège Pierre-de-Ronsard où les jeunes sont victimes de croyances, d'idées préconçues transmises et d'a priori.
Thierry Jonquet, trop tôt disparu, a un talent fou pour rendre toutes ces histoires humaines, crédibles et cohérentes avec ce milieu qu'il connaît très bien.
Pourquoi tant de haine ?
"Tant qu’on n’aura pas diffusé très largement à travers les hommes de cette planète la façon dont fonctionne leur cerveau, la façon dont ils l’utilisent et tant que l’on n’aura pas dit que jusqu’ici que cela a toujours été pour dominer l’autre, il y a peu de chance qu’il y ait quoi que ce soit qui change. " Henri Laborit.
Kandide
Quelqu'un a lu ?

Les hommes lents de Laurent Vidal
Adam Bopel
Lao a écrit :
Le roman que je viens de lire porte sur un sujet qui a rempli des centaines de pages de polémiques sur backstage. Mais rien ne vaut la plume d'un bon écrivain, surtout en gain de temps.
...

Ne connaissant le bonhomme que de réputation et étant un peu masochiste, je viens de commander ce livre
skynet
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Ça a l’air bien, mais je l’ai pas trouvé sur Kobo (ou je suis abonné)
Lao
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  • #5220
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    Lao
    le 12 Mar 2021, 13:19
Jonquet est un de mes écrivains préférés. La plupart de ces bouquins relèvent du polar mais il ne s'est pas adonné à cette mode d'écrire de gros pavés que l'on voit chez d'autres écrivains français du même style comme Thilliez, Chattam, .... Ses récits sont vraiment basés sur la description de ses personnages et "son style de peinture" est, de mon point de vue, admirable, lucide et intelligent.

En plus du roman cité au dessus, ceux qui m'ont vraiment marqué :

Mygale, repris par Almodovar (la piel que habito), un des plus durs mais quel talent pour amener le lecteur à découvrir le drame ! Par contre si on a vu le film (ce qui n'est pas mon cas), la surprise doit être moins grande.

La bête et la belle : 99% des lecteurs se font avoir et tombent des nues dans les deux dernières pages - pour moi c'est presque aussi fort que du Philip K. Dick.

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