en parlant de science fiction, il y a aussi
334 de thomas disch (publié en 1972), qui est un livre perturbant... il n'y est pas question d'eugénésie comme dans "le meilleur des mondes" ou d'imposition violente comme dans "1984", ni de censure comme dans "fahrenheit 451", c'est quelque chose de pire, la mort de toute espérance. tout le livre est inondé par un désespoir apocalyptique...
c'est le genre de s.f. que j'apprécie, une s.f. qui montre le côté abominable du progrès technologique. thomas disch est donc le contraire du technophile asimov : ses personnages n'ont rien en commun avec le héros scientifique omniscient d'asimov, plus grand, plus fort et plus intelligent que tout le monde, membre respecté de la société qui vient à bout de tous les problèmes que les autres sont trop idiots pour résoudre par eux-mêmes.
334 parle d'autre chose, de ceux qui n'ont pas le droit de se reproduire parce qu'ils sont trop bas dans l'échelle sociale, de ceux qui dorment dans des cages d'escaliers, des impuissants sexuels, des gens obèses en raison des médicaments et autres produits nocifs qu'ils consomment, des drogués, bref, des oubliés de la société technomarchande.
mais il évoque aussi ce bruit de fond de l'âge électrostatique dans quoi nous baignons déjà, ce "hum" mystérieux (baudouin de bodinat : "Ce discret, presque indiscernable bourdonnement que font les générateurs d'illusion de la vie merveilleusement améliorée, à quoi on n'était pas censé prêter attention") : "Un silence de mort s'installa... C'est alors qu'elle entendit l'autre bruit, un grondement lointain, impossible à localiser, comme l'imperceptible signe avant-coureur de la cataracte qui se rapproche. Depuis lors, le bruit de ces rapides l'avait suivie partout..."
thomas disch, 334