jules_albert a écrit :
La S.-F., fille de l'utopie fécondée par l'optimisme scientiste, a été, un temps, la simple apologie de la société industrielle, ou sa critique inavouée. Les deux tendances se sont prolongées et ont coexisté fort tard. Coexistant parfois chez le même auteur, généralement alors un critique réactionnaire (Simak).
Un virage est près ces temps-ci, parce que l'apologie devient intenable, et la critique désarmée, impossible. La S.-F. devient le champ d'expression de la pure aliénation mentale. Le fou Farmer, le drogué P.K. Dick s'engagent épileptiquement sur les traces du théosophe Van Vogt.
La vitalité de la S.-F., vitalité provisoire et dont nous verrons la fin, tient à son inconscience d'elle-même, de plus en plus difficilement maintenue. Debord dit superbement : "Quand l'art devenu indépendant représente son monde avec des couleurs éclatantes, un moment de la vie a vieilli, et il ne se laisse pas rajeunir avec des couleurs éclatantes. Il se laisse seulement évoquer dans le souvenir. La grandeur de l'art ne commence à paraître qu'à la retombée de la vie."
La science-fiction est une forme populaire tardive, et sa vertu tient dans son inconscience : dès qu'elle devient consciente de sa propre actualité (Orwell, Huxley),
nous sortons de la science-fiction.
L'inconscience maintenue de la S.-F. se marque dans son style. La S.-F. existe tant que les écrivains de ce genre ne réfléchissent absolument pas sur l'écriture, mais essaient seulement d'être clairs, quand bien même l'objet décrit se complique. Bien entendu, ils ne sont pas clairs : leur inconscience est une fausse conscience.
Ils ne savent guère qu'ils parlent d'aujourd'hui, ils croient parler de choses imaginaires, et ils décrivent ces choses avec application.
La S.-F. revendique pathétiquement sa propre puérilité, comme Minnelli dans le film
The Courtship of Eddie's father. De même que le cinéaste prenait parti pour l'enfant idéologisé par les bandes dessinées, Farmer, dans
Le Faiseur d'Univers, propose une réserve de mythes puérils, dont il affirme l'agrément (mythologie grecque, chevaliers teutoniques, Tarzan).
J.-P. Manchette, 1970.
J'avoue n'être pas tout à fait (même pas du tout) d'accord avec cela...
Car cela est vraiment trop réducteur.
Il y a parfois plusieurs niveaux de lecture dans la SF, comme dans toute littérature il ne suffit pas de lire, il faut savoir lire entre les lignes... Réfléchir.
La plupart des écrivains de SF savent parfaitement qu'ils décrivent les travers et les risques de choix des humains et cela au présent !
Le futur se prépare maintenant et la plupart des auteurs SF nous mettent en garde dès aujourd'hui des probabilités possibles du futur. C'est donc au présent que nous devons y réfléchir.
Ce n'est absolument pas un genre mineur, et c'est même le contraire, la SF nous pose la question que l'on devrait tous se poser:
Quel monde voulons-nous demain ?
C'est donc très sérieur !
Alors La SF puérile ?
Lisez par exemple: De Van Vogt, "Le Monde des Non A", cela n'a rien de puéril, Bien au contraire !
Quand à Philip K Dick, certes il avait de gros soucis psychologiques, mais c'est vraiment manquer d'argument que de le critiquer sur ses démons intérieurs plutôt que sur son oeuvre,... Cela n'est pas très courageux comme critique !!!! (mais voir ci-dessous le lien YT)
Etre "Ecrivain", n'est-ce pas déjà une certaine forme de sensibilité exacerbée analogue à une éponge émotionnelle qui retranscrit ou restitue de la réflexion, de l'émotion, de l'interrogation ?
C'est une forme artistique comme une autre, alors dire que c'est une aliénation mentale revient à dire que tous les artistes sont des aliénés.....Non des être humains.
Bon, je pourrais reprendre chaque phrase et démontrer la mince profondeur de cette vision tellement surfacique de la SF.
La SF est là pour nous poser des questions, elle nous laisse le choix de trouver les réponses.
Notre monde manque cruellement d'interrogation, de réflexion... Vers quoi voulons-nous aller ?
Les actualités récentes nous montrent que ce type de questions est très crucial !
De la réflexion, de l'interrogation, de l'esprit d'analyse afin d'entrevoir des possibilités de solutions.
La SF nous met en garde contre notre propre auto-destruction, puisse l'Humanité y prêter un peu attention... C'est hélas, loin d'être gagné...
Donc rendons à César ce qui appartient à césar: La SF peut sauver l'Humanité ! Rien que cela. Voilà encore une fois pourquoi la SF n'est pas un genre mineur...
Et quand à dire que lorsque le texte devient conscient cela n'est plus de la SF, c'est vraiment de la mauvaise foi ! Car c'est s'approprier la substantifique moelle de la SF et la confiner dans un autre genre littéraire... Cela revient à dire que lorsque le texte est bien alors cela ne peut plus être de la SF... C'est s'approprier à son propre compte du travail des auteurs de SF !
Il y a tant à dire... La SF c'est aussi l'imagination de tous les champs du possible !
Et cela me fait songer à ceci (et ce sera le mot de la fin) :
L'imagination est plus importante que le savoir. Le savoir est limité alors que l'imagination englobe le monde entier, stimule le progrès, suscite l'évolution.
Albert Einstein
Voir un doc sur P K Dick:
PEACE & LOVE