Vous et les livres...

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Le Heyd
En ce moment je suis là-dessus :



Très intéressant et bien écrit. Bourré d'anecdotes sympathiques. De plus ça ne parle pas que de Lennon, majoritairement évidemment, mais aussi de tout son entourage pour mieux situer et comprendre ce mec complexe, au caractère... spécial. Donc on apprend aussi des choses sur tout ceux qui ont joué un rôle dans sa vie, les Quarrymen, les autres Beatles, sa mère Julia, sa tante Mimi, d'autres membres de sa famille, Stu Sutcliffe, Pete Best, Epstein, tout ceux de Hambourg, du Cavern Club, Gerry (and the Pacemakers), vraiment tout le monde qu'il a fréquenté de près ou de loin... De plus on a des précisions historiques pour le contexte de plusieurs événements. Bref, cette biographie est une franche réussite! Je le conseille fortement!
Ben.oît a écrit :
"Critiqueur social" n'est pas gênant, j'aime beaucoup lire des avis de tous bords, c'est surtout "Condescendant" et "chiant" qui ne me donne pas envie de revenir sur ce sujet.

Pourtant les deux intervenants semblent connaitre quelques bouquins intéressants qu’il serait bon de nous faire partager, mais c’est fait de façon assez condescendante et donc pour moi, très chiante.


Puisqu’on en est à parler de livres, parlons du devenir de la lecture, en essayant de ne pas être trop condescendant, tout en étant très chiant quand même. D’après des estimations déjà anciennes, le vocabulaire et la compréhension grammaticale d’une large majorité d’Américains ne progresseraient plus au-delà d’un âge moyen de douze ou treize ans (Et quelles années ! Passées à quoi !) Ainsi beaucoup d’entre eux auraient le plus grand mal à comprendre une proposition subordonnée. En France aussi, nous sommes passés de l’ancien analphabétisme (incompatible avec la participation au fonctionnement d’une économie moderne), à l’analphabétisme de l’ignorance augmentée. Ce nouvel analphabétisme ressemble à l’ancien par certains traits : perte de l’orthographe, appauvrissement extrême du vocabulaire et de la syntaxe (cf. Jaime Semprun, Défense et illustration de la novlangue française). Pourtant le langage parlé est dans ce cas également frappé, et il s’agit donc d’une décomposition du langage, à travers laquelle s’abolit cette fameuse distance entre le français parlé et le français écrit, à propos de laquelle on a proféré tant de bêtises, et à partir de laquelle quelques écrivains (Céline, Queneau, et la suite) se sont facilement fabriqué une douteuse originalité stylistique. La richesse du français parlé, depuis les divers argots jusqu’au simple langage populaire, s’est abîmée dans l’épouvantable melting pot des jargons journalistiques, technocratiques, publicitaires, etc. On voit là, comme on peut les voir également dans la disparition de la chanson populaire, les effets de la perte de toute autonomie collective par rapport à la marchandise et à l’État. Les termes pseudo-argotiques lancés chaque saison, loin d’exprimer une rupture de ban avec la norme sociale, proclament servilement la fausse complicité dans la conformité, dans la familiarité avec la marchandise.

C’est à l’intérieur de la perte générale du jugement, et donc du langage, du vocabulaire, que s’inscrit le sort particulier de la lecture. Quoiqu’il sache lire au sens de l’Unesco, la barrière qui sépare le spectateur, saturé d’images, de bruits et de mensonges, des écrits importants, de l’humour de Swift par exemple, est tout aussi réelle que la stricte incapacité à déchiffrer un texte. Le livre a été le principal instrument matériel de l’instauration d’une culture profane. D’abord enfermé dans les monastères, puis multiplié dans les bibliothèques universitaires, le livre, quand il se répand dans le monde grâce à l’imprimerie, rend accessible à chacun la mémoire de ce qu’on fait, ressenti et pensé les hommes qui l’ont précédé : la conscience historique moderne qui se donne pour horizon les intérêts universels de l’humanité est en ceci fille du livre. Le livre a en tout cas été une arme à longue portée dans les luttes historiques de l’époque moderne et, sur la durée, on peut dire qu’il a surtout servi aux forces de l’émancipation. En effet, maniable et reproductible à volonté, le livre donne à l’écrit la plus grande publicité, une véritable existence collective tout en généralisant la liberté de la réflexion individuelle, du jugement sur pièce de la pensée, précédemment réservée à une infime minorité.


On peut dire rapidement de la pensée déposée dans un écrit qu'elle a partie liée avec le temps. Elle doit admettre que sa vérité est en avant d'elle, dans une vérification possible. Elle se comprend elle-même dans la continuité d'une histoire de la conscience, comme mémoire et comme projet. Ceci vaut pour tout écrit de quelque valeur, quel que soit le genre.

En revanche ce qui caractérise la littérature abrutissante (j‘en ai déjà touché un mot il y a quelques semaines), au-delà de tout critère esthétique, c'est précisément qu'e consommée pour distraire une fraction du temps, elle reste lettre morte, sans projet, sans poésie parce que sans temps devant elle. Il ne s'agit plus alors que de plus ou moins grande virtuosité dans l'usage d'une convention figée, et cela peut aller des romans à l'eau de rose style Harlequin aux raffinements à la Perec.

Le livre, comme « manière spéciale de vivre »(Flaubert), peut aussi être, pour celui qui le lit comme pour celui qui l'écrit, une manière de ne pas vivre, de se résigner, comme le montrent abondamment littérateurs et intellectuels : ou plutôt comme ils le montraient, car les spécialistes de l'écrit sont aujourd'hui bien en peine de concurrencer les substituts artificiels à la vie.

Bref, le livre n’est qu’un moyen, mais il a été le moyen d’une société dont la culture représentait la dimension historique partiellement consciente : mais c’est encore trop pour le rêve dominant d’une glaciation définitive gérée par les mémoires automatiques des machines et de leurs logiciels. Avec la solution finale du problème du langage, la vie des mots cède la place à la circulation des signaux. Dans le temps schizophrénique occupé par les loisirs programmés, succession d’instants émiettés sans résultat ni processus, se perd la capacité à lire, à habiter la mémoire déposée dans un livre et à l’accorder à son temps propre.

Ainsi un produit de l’édition moderne, qui n’est pas fait pour être lu, rencontre-t-il chez ses acheteurs une incapacité à lire qui le justifie pleinement. Et, circulairement, la disparition du temps de la lecture dans la vie quotidienne du consommateur, renforce la tendance à la liquidation de la mémoire écrite.
Raphc
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jules_albert
kleuck a écrit :
K.Lagan a écrit :
kleuck a écrit :

Heuuuuu, j'adore le film de Scott, mais il n'a pas grand rapport avec le bouquin hein.


Hé ! Euh si si amigo, il est indéniable qu'il en est très grandement inspiré. Cf interviews avec les scénaristes du film (Peoples, aussi derrière 12 Monkeys et un certain Mr Fancher.

Il n'a pas adapté le bouquin pour rien, mais pour l'aspect schizo de K.Dick (que les producteurs ont limité lors de la sortie initiale avec l'accord et le poids d"Harrisson Ford qui ne voulait pas qu'on puisse penser que le héros puisse être autre chose qu'humain -quel manque de discernement, c'est juste le fond de l’histoire)
En attendant, ni le décor, ni le contexte (inversé) ni l'histoire, ni les personnages (ils ont bien le même nom, mais pas le même fond), ni même le thème central du bouquin (qui est plus le Mercerisme/l'empathie) ne se retrouve dans le film.
L'armée des 12 singes est un plus à mettre en rapport avec Chris Marker (c'est un calque, avoué de "La jetée") qu'avec K.Dick.

euh, je pensais plutôt que le thème central du bouquin était l'artificialisation cauchemardesque de la vie sur terre suite à une catastrophe nucléaire, l'impossiblité de vivre sur terre et la relation des humains avec les machines.
justement j'ai pu voir l'adaptation de ridley scott hier soir et ça ne m'a pas plu. ça ne m'a pas plu car trop d'éléments essentiels du livre ont été laissés de côté : par exemple, la ville ressemble plus à une sorte de gotham city qu'à une ville frappée par une catastrophe nucléaire. tout l'aspect de la pollution radioactive est ignoré dans le film, ce qui n'est pas une surprise : l'industrie du cinéma n'est pas là pour alerter sur ce genre de péril...

l'obsession pour les animaux si présente dans le livre en raison de la disparition de presque toute vie animale (c'est en ça que le livre est visionnaire) est également passée à la trappe dans le film.

le film se limite souvent à une course-poursuite entre le blade runner et les robots, avec certes quelques moments qui rappellent la mélancholie du livre de p.k. dick, mais ces moments sont trop rares dans ce film qui a voulu privilégier les scènes d'action au détriment de la richesse du roman.

il me semble que les cinéastes en général ont toujours intérêt à partir de romans médiocres pour faire leurs films, car avec les grandes oeuvres littéraires le cinéma est condamné à décevoir.
Sans valeur marchande : https://debord-encore.blogspot(...).html

La peste citoyenne. La classe moyenne et ses angoisses : http://parolesdesjours.free.fr(...)e.pdf
Ben.oît
jeroveh a écrit :
Ben.oît a écrit :
...
....


Jeroveh, Jules Albert et les autres, ma remarque n'engage que moi. C'est à dire un avatar insignifiant à l'autre bout de son câble. Je ne suis rangé aux cotés de personne (ni Bobo comme il a été évoqué ou qui sais-je...).

De très nombreuses de vos interventions ne sont pas à mon goût. Pas plus que certains échanges de part et d'autre, au sujet des bouquins de chacun avec une véhémence qui me choque tout autant que la condescendance ("Ma vie in Bisounours land" Tome I à XII à lire!).

Je comprends que ma remarque ne soit pas agréable mais vous savez ce que vous valez, je ne pensais même pas que cette remarque serait lue. J'espère bien qu'elle vous passse au dessus, tout comme la condescendance de tout un chacun ici peu me passer très au dessus. Il suffit juste de fermer le sujet qui en serait empreint.
Es könnte auch anders sein
Dodo13
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J'ai lu le livre sans nom. On en a déjà peut être parlé ici mais j'ai bien aimé. Un livre d'action assez déjanté, très divertissant. Un peu lassant par moment à cause du niveau d'écriture (on a presque plus l'impression de regarder un blockbuster américain que de lire un livre), et du coup j'hésite un peu à m'attaquer aux suites...

J'ai lu un Mickael Connelly aussi (j'ai pas trop l'habitude de lire des roman mais c'était les vacances...), et pareil, j'ai eu l'impression qu'on me racontait un épisode d'une série policière américaine... ça se lit facilement, mais c'est vite lassant.
D'ailleurs avec l'avènement des série, ça m'étonne que ce genre d'auteurs ait autant de succès.
"C'est pas une boîte de p'tit pois, Avi, comment tu veux que je l'ouvres?"
Ben.oît
Dodo13 a écrit :
J'ai lu le livre sans nom. On en a déjà peut être parlé ici mais j'ai bien aimé. Un livre d'action assez déjanté, très divertissant. Un peu lassant par moment à cause du niveau d'écriture (on a presque plus l'impression de regarder un blockbuster américain que de lire un livre), et du coup j'hésite un peu à m'attaquer aux suites...



Ah oui effectivement, j'ai lu ça par curiosité et j'ai été très déçu. Beaucoup d'intérêt au début, j'avais l'impression de lire Pulp Fiction. Ca va vite, c'est drôle, c'est violent, c'est dynamique, personnages singuliers, ambiance intéressante et puis... partir sur Buffi ... très très déçu.
Es könnte auch anders sein
Dodo13
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Oui c'est vrai que le délire vampire / épouvantail hanté / seigneur des ténèbres / saint-graal aurait pu être évité.
"C'est pas une boîte de p'tit pois, Avi, comment tu veux que je l'ouvres?"
jules_albert
jeroveh a écrit :
À l'occasion du dixième anniversaire des attentats du 11 septembre 2001, paraît une réédition de Logique du terrorisme de Michel Bounan.

Exemples à l’appui, Michel Bounan rappelle qu’aucun attentat terroriste n’a jamais obéi aux motifs avoués de ses prétendus auteurs. Il s’agit bien plutôt d’une stratégie entretenue par les pouvoirs en place, qui imposent aux populations le vieux principe mafieux : terrorisme ou protection. Les événements récents (11 septembre, guerre en Irak, montée de l’antisémitisme, etc.) s’en trouvent éclairés de façon nouvelle et le véritable affrontement apparaît : celui qui oppose les dirigeants mafieux de notre monde moderne à des populations de plus en plus nombreuses, aux conditions de vie de moins en moins tolérables.



Michel Bounan, Logique du terrorisme, Allia.


très bon livre! et pas cher.
c'est une histoire de comment les états utilisent le terrorisme pour parvenir à leurs fins.
zapa avait parlé de ce bouquin sur son blog: http://zapa.over-blog.com/arti(...).html


Citation:

Fin 19ème / début 20ème siècle :

Un des exemples les plus probants d’utilisation du terrorisme par un pouvoir étatique réside dans le cas du très étonnant Yergheï Filipovitch Asev. Chef de la mouvance anarchiste russe, commanditaire de nombreux attentats souvent sanglants (meurtre de plusieurs grands ducs, d’une demi douzaine de gouverneurs, du ministre de l’intérieur, du chef de l’Okhrana…), il se révélera plus tard (ce que confirmera Stolypine, ministre de l’intérieur Russe) comme ayant été depuis le début un zélé auxiliaire de la police.

27 février 1933 :

Hitler vient d’être élu chancelier. L’incendie du Reichstag lui permet de mettre en place rapidement un régime autoritaire et de mettre à sa botte les institutions démocratiques. Il a été prouvé que le militant gauchiste arrêté, n’avait pu agir seul. Que divers foyers d’incendie avaient permis la destruction totale du bâtiment. Et que l’incendiaire décapité avait été secondé, à son insu. Une telle occasion de tordre le cou à l’opposition étant évidemment précieuse...



6 décembre 1941 :

Les Japonais attaquent Pearl Harbour. Le lendemain l’opinion américaine jusqu'à alors très défavorable à cette guerre se range en fanfares derrière la décision du commandeur en chef Roosevelt d’entrer dans la guerre.

Pour Bounan, pour les historiens aussi, Pearl Harbour est bourré d’incohérences. D’abord, contrairement aux autres bases américaines dans le pacifique, Pearl Harbour est très mal défendue. Ensuite, les services secrets américains et étrangers semblaient connaître de longue date le lieu d’attaque de l’armée japonaise, le code secret de l’armée japonaise ayant été déchiffré depuis longtemps. Comme pour le 11 septembre, le manque de réactivité (la base n’était même pas en état d’alerte) des responsables américains aux sonnettes d’alarmes tirées en tout lieux (l’ambassadeur américain au Japon ou l’amiral hollandais Helfrich, entre autres, avaient prévenu Washington de l’attaque) est effarante.

La catastrophe de Pearl Harbour aurait en fait été encouragée par l’entourage du président, soucieux de maintenir une industrie de guerre pléthorique et d’ouvrir à la libération de nouveaux champs d’expansion asiatiques à l’industrie américaine. Bounan mentionne cette réunion tenue le soir de l’attaque par Roosevelt avec quelques gradés, en attendant l’attaque. Et cite l’historien américain John Toland, rapportant les hallucinants propos de Roosevelt à ses affidés galonnés : « messieurs, ceci va au tombeau avec nous ».

4 ans plus tard, les bombardements de Dresde et surtout l’utilisation de l’arme nucléaire contre le Japon se chargeront de rappeler que le terrorisme étatique peut également être le fait de régimes démocratiques modernes. Le but réel d’Hiroshima et Nagasaki par exemple étant plus d’impressionner Staline lors du partage du monde en cours, que de faire plier un empire Japonais déjà largement à genoux.



1982 :

Trois séparatistes irlandais sont arrêtés en région parisienne, à Vincennes. Dans leur logement, la police française découvre quantité d’armes et d’explosifs destinés à une future opération terroriste. Quelques années plus tard, un gendarme français avoue avoir déposé de lui même le matériel terroriste, sur ordre venu de très haut. L’affaire sera évidemment rapidement étouffée.

Sur sa lancée, Bounan décortique de nombreux autres attentats, recelant tous des parts d’ombre assez étonnantes :

L’assassinat de François Ferdinand à Sarajevo en 1914, détonateur de la première guerre mondiale ? Habile manœuvre de l’empire austro-hongrois (laisser agir à leur guise les bouillants nationalistes serbes) pour se débarrasser d’un héritier peu conforme à la tradition impériale tout en obtenant une guerre désirée.

L’attentat meurtrier d’Oklahoma City en 1995 ? La résultante d’une machination gouvernementale dans laquelle l’homme arrêté, Mc Leigh, jouerait le rôle de « l’idiot de service », plusieurs experts du Pentagone ayant semble t’il déclaré absolument invraisemblable que l’explosion provoquée par son camion bourré d’engrais ait suffi à faire de tels dégâts (tout comme l’inventeur de la bombe à neutrons, Samuel Cohen, qui déclara tout de go : « il est absolument impossible qu’un camion rempli d’essence et d’engrais fasse s’effondrer le bâtiment »). Peu après, Clinton promulguait le très liberticide anti terrorism act.

Les mouvances d’extrême gauche des années 1970 tels que Bande à Baader en Allemagne ou Action Directe en France ? Des mouvances infestées par la police et bien utiles pour stigmatiser une opinion alors un peu trop libertaire.

L’accumulation des cas est plutôt fascinante. Et le faisceaux de présomption mis à jour par Bounan tentaculaire. Pour lui, ce n'est pas les états qui formentent les attentats. Simplement les états laissent faire, voire encouragent.
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kleuck
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jules_albert a écrit :
kleuck a écrit :
K.Lagan a écrit :
kleuck a écrit :

Heuuuuu, j'adore le film de Scott, mais il n'a pas grand rapport avec le bouquin hein.


Hé ! Euh si si amigo, il est indéniable qu'il en est très grandement inspiré. Cf interviews avec les scénaristes du film (Peoples, aussi derrière 12 Monkeys et un certain Mr Fancher.

Il n'a pas adapté le bouquin pour rien, mais pour l'aspect schizo de K.Dick (que les producteurs ont limité lors de la sortie initiale avec l'accord et le poids d"Harrisson Ford qui ne voulait pas qu'on puisse penser que le héros puisse être autre chose qu'humain -quel manque de discernement, c'est juste le fond de l’histoire)
En attendant, ni le décor, ni le contexte (inversé) ni l'histoire, ni les personnages (ils ont bien le même nom, mais pas le même fond), ni même le thème central du bouquin (qui est plus le Mercerisme/l'empathie) ne se retrouve dans le film.
L'armée des 12 singes est un plus à mettre en rapport avec Chris Marker (c'est un calque, avoué de "La jetée") qu'avec K.Dick.

euh, je pensais plutôt que le thème central du bouquin était l'artificialisation cauchemardesque de la vie sur terre suite à une catastrophe nucléaire, l'impossiblité de vivre sur terre et la relation des humains avec les machines.
justement j'ai pu voir l'adaptation de ridley scott hier soir et ça ne m'a pas plu. ça ne m'a pas plu car trop d'éléments essentiels du livre ont été laissés de côté : par exemple, la ville ressemble plus à une sorte de gotham city qu'à une ville frappée par une catastrophe nucléaire. tout l'aspect de la pollution radioactive est ignoré dans le film, ce qui n'est pas une surprise : l'industrie du cinéma n'est pas là pour alerter sur ce genre de péril...

l'obsession pour les animaux si présente dans le livre en raison de la disparition de presque toute vie animale (c'est en ça que le livre est visionnaire) est également passée à la trappe dans le film.

le film se limite souvent à une course-poursuite entre le blade runner et les robots, avec certes quelques moments qui rappellent la mélancholie du livre de p.k. dick, mais ces moments sont trop rares dans ce film qui a voulu privilégier les scènes d'action au détriment de la richesse du roman.

il me semble que les cinéastes en général ont toujours intérêt à partir de romans médiocres pour faire leurs films, car avec les grandes oeuvres littéraires le cinéma est condamné à décevoir.

Le thème est pour moi plutôt -une fois de plus un truc schizoïde- l’impossibilité de vivre sans les autres en même temps qu'avec, d’où l'invention d'une religion électronique permettant de se sentir en contact tout en étant dans son canapé ou dans son lit (si ça ne vous fait penser à rien) le thème et plus l'empathie, thème sous-jacent récurent à pas mal de bouquins de Dick (même si ce n'est pas toujours l’idée principale, c'est souvent moteur ou une résolution, voir la fin de L'homme dans le labyrinthe) la fascination un peu morbide pour les animaux n'est qu'un illustration secondaire pour moi.
Tout ça est en filigrane tout de même dans le film, les replicants font preuve de bien plus d'empathie que les humains tout au long du film, la position des animaux est rappelée plusieurs fois, il y a même un clin d’œil à l'araignée etc, donc non ce n'est pas qu'un film d'action, loin de là, mais pas non plus une adaptation en images du bouquin, et tant mieux, ça ne fonctionne que (très très) rarement.
"Le métal, c'est plus facile assis, : c'est une musique de salon finalement !" (bonniwell, ex-métalleux)

"Oh justement, moins on en sait, plus on est capable de réellement juger quelque chose. Je suis peut-être pas expert en art, mais j'ai deux yeux, comme tout le monde, je sais distinguer un truc moche d'un truc beau comme n'importe qui d'autre.
Si Van Gogh a passé toute sa vie pauvre et incompris, c'est parce qu'il faisait de la merde, point, il ne savait pas peindre. Des années après sa mort, des "experts" ont décidés que c'était un génie, ça ne change pas pour autant son travail." (King V expert es bon goût)

Le Gecko : https://www.guitariste.com/for(...).html
jules_albert
kleuck a écrit :
Le thème est pour moi plutôt -une fois de plus un truc schizoïde- l’impossibilité de vivre sans les autres en même temps qu'avec, d’où l'invention d'une religion électronique permettant de se sentir en contact tout en étant dans son canapé ou dans son lit

certes, c'est ce que j'appelle l'artificialisation de la vie dans un contexte où la terre est devenue invivable suite à une guerre nucléaire et la pollution radioactive qui en découle. mais la religion en question, "le mercerisme", ne résout rien dans le livre, ce n'est qu'un leurre, une consolation, une drogue pour supporter des conditions de vie épouvantables.

les rapports sociaux entre humains sont en effet très dégradés de nos jours, l'empathie diminue dans un monde de plus en plus déshumanisé. on peut dire que là aussi p.k. dick a été visionnaire

Citation:
la fascination un peu morbide pour les animaux n'est qu'un illustration secondaire pour moi.

ça n'a rien de morbide ni de secondaire. par leur attachement aux animaux, les humains dans le livre expriment ainsi leur désir de préserver ce qui rattache l'homme au reste de la création naturelle. ce lien est en train de disparaître, p.k. dick l'avait bien senti il y a déjà plus de 40 ans...

d'ailleurs le roman s'ouvre par des vers de yeats ("et je rêve qu'il arpente la pelouse, fantôme dans la brume matutinale, que traverse mon chant joyeux") et une dépêche de reuters narrant la mort d'une tortue âgée de 200 ans...

Citation:

Tout ça est en filigrane tout de même dans le film, les replicants font preuve de bien plus d'empathie que les humains tout au long du film, la position des animaux est rappelée plusieurs fois, il y a même un clin d’œil à l'araignée etc, donc non ce n'est pas qu'un film d'action, loin de là, mais pas non plus une adaptation en images du bouquin, et tant mieux, ça ne fonctionne que (très très) rarement.
je ne crois pas du tout que p.k. dick ait voulu dire que les robots pouvaient avoir plus d'âme que les humains... si le film exprime cela, c'est une trahison.
pour moi, tout le film trahi l'esprit du roman, particulièrement la fin.
dans le roman les robots se montrent froids et calculateurs, dénués de toute empathie véritable. je ne veux pas dévoiler la fin par respect pour ceux qui ne l'auraient pas encore lu, mais le robot rachel se montre très cruelle avec un animal cher au blade runner... le film a une fin complètement différente et s'achève par une sorte de happy end où le robot rachel et le blade runner s'en vont couler des jours heureux ensemble...

je vois le film de scott comme une (mauvaise) carte postale en comparaison du beau tableau sombre peint par p.k. dick
Sans valeur marchande : https://debord-encore.blogspot(...).html

La peste citoyenne. La classe moyenne et ses angoisses : http://parolesdesjours.free.fr(...)e.pdf
kleuck
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jules_albert a écrit :
je ne crois pas du tout que p.k. dick ait voulu dire que les robots pouvaient avoir plus d'âme que les humains... si le film exprime cela, c'est une trahison.
pour moi, tout le film trahi l'esprit du roman, particulièrement la fin.
dans le roman les robots se montrent froids et calculateurs, dénués de toute empathie véritable. je ne veux pas dévoiler la fin par respect pour ceux qui ne l'auraient pas encore lu, mais le robot rachel se montre très cruelle avec un animal cher au blade runner... le film a une fin complètement différente et s'achève par une sorte de happy end où le robot rachel et le blade runner s'en vont couler des jours heureux ensemble...

je vois le film de scott comme une (mauvaise) carte postale en comparaison du beau tableau sombre peint par p.k. dick

K.Dick n'a pas voulu dire ça c'est clair, ses androïdes sont un miroir de l’être humains plutôt raté, rien à voir avec ceux du film.
Mais je crois que tu as tort de considérer le film comme une adaptation (genre The Lord of The Rings, Scott en a fait un tout autre objet, qui fonctionne très bien par lui-même tout en abordant quand même une partie des thèmes chers à Dick.
"Le métal, c'est plus facile assis, : c'est une musique de salon finalement !" (bonniwell, ex-métalleux)

"Oh justement, moins on en sait, plus on est capable de réellement juger quelque chose. Je suis peut-être pas expert en art, mais j'ai deux yeux, comme tout le monde, je sais distinguer un truc moche d'un truc beau comme n'importe qui d'autre.
Si Van Gogh a passé toute sa vie pauvre et incompris, c'est parce qu'il faisait de la merde, point, il ne savait pas peindre. Des années après sa mort, des "experts" ont décidés que c'était un génie, ça ne change pas pour autant son travail." (King V expert es bon goût)

Le Gecko : https://www.guitariste.com/for(...).html
20th Century Boy
kleuck a écrit :

je vois le film de scott comme une (mauvaise) carte postale en comparaison du beau tableau sombre peint par p.k. dick
K.Dick n'a pas voulu dire ça c'est clair, ses androïdes sont un miroir de l’être humains plutôt raté, rien à voir avec ceux du film.
Mais je crois que tu as tort de considérer le film comme une adaptation (genre The Lord of The Rings, Scott en a fait un tout autre objet, qui fonctionne très bien par lui-même tout en abordant quand même une partie des thèmes chers à Dick.
EN fait au départ, Scott voulait adapter "the long tomorrow", une BD de DAn O bannon ( le créateur d'Alien) et de Moebius ( aujourd'hui lisible dans le recueil "l'homme est-il bon", enfin je crois). Mais Moebius étant en vogue à l'époque ( le dune de Jodo, Tron, designs sur Alien...) il demandait trop cher. Scott s'est donc rabattu sur un obscur écrivain de SF inconnu aux états-unis mais au final tout l'univers urbain c'est du pur Moebius. Tout ça pour ire que Scott avait surement son idée sur l'univers qu'il voulait dévelloppé et que le bouquin de Dick s'est greffé là dessus en cours de route.
well I’m a mess / hell, I know that it’s a crappy excuse
didithegrave



Une lecture passionnante. Finalement peu de gens ont saisi Maurras et la portée purement Nietzschienne de sa pensée;
"J'allais toucher l'anti-accord absolu, vous entendez : ABSOLU. La musique des sphères ... Mais qu'est ce que j'essaie de vous faire comprendre, homme singe!"
  • #3104
  • Publié par
    Eybi
    le 17 Sep 2011, 09:13
Buvons de cette boisson colorée qui est saturée de sirop glucosé à la saveur chimique. Ainsi nous serons tous survoltés et nous nous gâterons les yeux avec des heures de marsupiaux qui chantent et qui dansent dans la jungle le tout truffé de publicités vantant des céréales qui vont sans doute détruire mon pancréas avant que j'ai 12ans et me laisser agar et abrutie de diabète.
Olivier
Connaissez-vous l’œuvre de Joseph Delteil ? C'est recommandable ?

En ce moment sur backstage...