krstf a écrit :
MonsieurMalabar a écrit :
C'est Disruptif.
Par contre ça, je ne comprend pas le sens……
C'est un mot français que je n'ai jamais utilisé !
Troubler,
jeter le trouble,
disjoindre,
perturber,
désorganiser,
détraquer.
Le mot est attesté dès la deuxième moitié du XV° siècle, dans le contexte des guerres de religion qui vont agiter (encore un une
disruption ) les sociétés européennes.
Cependant, en français moderne, le mot reste très rare.
Pas en anglais.
Cf. la notice du
Trésor de la Langue française (CNRS) :
http://www.cnrtl.fr/definition(...)suff.
S'y trouve cité un très court exemple de Bergson tiré des Deux sources de la morale et de la religion (1932), exemple malheureusement tronqué, que je ne résiste pas à la tentation de citer de manière plus développée et que je rétablis donc, ici, à peu près dans son jus, même si le topic "Citations" c'est ailleurs :
« La nature, qui a voulu de petites sociétés, a pourtant ouvert la porte à leur agrandissement. Car elle a voulu aussi la guerre, ou du moins elle a fait à l'homme des conditions de vie qui rendaient la guerre inévitable. Or, des menaces de guerre peuvent déterminer plusieurs petites sociétés à s'unir pour parer au danger commun. Il est vrai que ces unions sont rarement durables. Elles aboutissent en tout cas à un assemblage de sociétés qui est du même ordre de grandeur que chacune d'elles.
C’est plutôt dans un autre sens que la guerre est à l’origine des empires. Ils sont nés de la conquête. Même si la guerre ne visait pas la conquête d’abord, c’est à une conquête qu’elle aboutit, tant le vainqueur juge commode de s’approprier les terres du vaincu, et même les populations, pour tirer profit de leur travail. Ainsi se formèrent jadis les grands empires asiatiques. Tous tombèrent en décomposition, sous des influences diverses, en réalité parce qu’ils étaient trop grands pour vivre. Quand le vainqueur concède aux populations subjuguées une apparence d’indépendance, l’assemblage dure plus longtemps : témoin l’empire romain. Mais que l’instinct primitif subsiste, qu’il exerce une action disruptive, cela n’est pas douteux. On n’a qu’à le laisser faire, et la construction politique s’écroule. C’est ainsi que la féodalité surgit dans des pays différents, à la suite d’événements différents, dans des conditions différentes ; il n’y eut de commun que la suppression de la force qui empêchait la société de se disloquer ; la dislocation se fit alors d’elle-même. Si de grandes nations ont pu se constituer solidement dans les temps modernes, c’est parce que la contrainte, force de cohésion s’exerçant du dehors et d’en haut sur l’ensemble, a cédé peu à peu la place à un principe d’union qui monte du fond de chacune des sociétés élémentaires assemblées, c’est-à-dire de la région même des forces disruptives auxquelles il s’agit d’opposer une résistance ininterrompue. Ce principe, seul capable de neutraliser la tendance à la désagrégation, est le patriotisme. Les anciens l'ont bien connu ; ils adoraient la patrie, et c'est un de leurs poètes qui a dit qu'il était doux de mourir pour elle. Mais il y a loin de cet attachement à la cité, groupement encore placé sous l'invocation du dieu qui l'assistera dans les combats, au patriotisme qui est une vertu de paix autant que de guerre, qui peut se teinter de mysticité mais qui ne mêle à sa religion aucun calcul, qui couvre un grand pays et soulève une nation, qui aspire à lui ce qu'il y a de meilleur dans les âmes, enfin qui s'est composé lentement, pieusement, avec des souvenirs et des espérances, avec de la poésie et de l'amour, avec un peu de toutes les beautés morales qui sont sous le ciel, comme le miel avec les fleurs. Il fallait un sentiment aussi élevé, imitateur de l'état mystique, pour avoir raison d'un sentiment aussi profond que l'égoïsme de la tribu.»
Ce passage
disruptif , à lui seul, a dû faire bondir un des plus grands bergsoniens du siècle précédent, Gilles Deleuze.
C'est moi qui met en gras et souligne les synonymes dérivés ou approchés par le gars Henri.
«Wir leben unter finsteren Himmeln, und –es gibt wenig Menschen. Darum gibt es wohl auch so wenig Gedichte. Die Hoffnungen, die ich noch habe, sind nicht groß. Ich versuche, mir das mir Verbliebene zu erhalten. »
Paul Celan, 18 mai 1960, Lettre à Hans Bender.