lapinmalin a écrit :
(...)
Dieu est il un gauchiste?
(...)
—Ma p´tite colombe, j'te dis que Dieu est assis à la droite du Père, c'est à dire de lui–même, puisqu'il est tripo, tri...euh, popobi...bipo...bipolaire, à ce qu'il paraît.
—Oui, mais...mais...alors...y a comme un problème : où c'est que tu mets le Centre dans ma Sainte Trinité ?
—Le Père est le Fils, le Fils est le Père, c'est une majorité de coalition, Holy Ghost, mon chou. La communauté réduite aux acquêts, si tu préfères.
—Pfuiitt, le communisme est la maladie sénile du gauchisme...
—Tout à fait, mon enfant, ma colombe, tout à fait, c'est ta traversée du désert, je veux dire ta perte d'auréole...
—Ta gueule, Charles...
—Allez, Patron, susucres, cuillers, et deux fées vertes, s'exclama Charles B.
(je protège mes sources), en ébauchant des cercles maladroits de son doigt, sur le zinc mouillé, l'œil vague.
—« Sois sage, ô ma douleur, et tiens-toi plus tranquille.
Tu réclamais le soir, il descends, le voici...», chantonnait le Patron, un certain Luc Le Fer, en essuyant un verre, car il aimait bien les chansons sentimentales.
—Dis, Lulu, mon Lucien, mon Le Fer, ça t'écorcherait–y pas la gueule, de la fermer, ta gueule, de temps en temps, tu veux bien ?! Et finis ton Job sur ton tas de fumier...
—Allez, cap au pire, laissa tomber sombrement Holy Ghost, d'une voix brouillonne que la sobriété abandonnait déjà.
Ouais, direc', cap au pire, et à gauche, et à droite, toute et toute, matelot,
mille sabords, catachrèses et synecdoques !
—Avec ta gauche, t'es sinistre, ma destrière, t'as le vin mauvais, ma douce, et un mauvais fond.
—R'mettez nous cha, Pa...pa...pa-tron...Deux fées, ça urge, Le Fuc et L'air,...le ciel, le ciel bas et lourd pèse comme un couvercle.
—Fiat mihi secundum verbum tuum, diagnostiqua Charles, vacillant sur sa chaise.
«Wir leben unter finsteren Himmeln, und –es gibt wenig Menschen. Darum gibt es wohl auch so wenig Gedichte. Die Hoffnungen, die ich noch habe, sind nicht groß. Ich versuche, mir das mir Verbliebene zu erhalten. »
Paul Celan, 18 mai 1960, Lettre à Hans Bender.