Câblage point par point : Mythe ou Réalité ? par Randall Smith
> le 23/10/03
Au cours d’une récente interview, il m’a été demandé comment la Trem-O-Verb pouvait avoir des performances “Vintage” aussi impressionnantes sans avoir été câblée en point-par-point, et “si elle aurait été meilleure en étant câblée ainsi ?”
Peut-être n’était-ce pas une question si surprenante, car l’auteur avait récemment écrit un article sur certains amplificateurs coûteux dont les fabricants avaient vanté les mérites de leur câblage point-par-point, comme si ce simple fait pouvait signifier (au moins à ceux “qui savent”) qu’il s’agissait d’un produit d’une distinction particulière.
De quoi s’agit-il ?
Dans un câblage point-par-point, les résistances et les condensateurs sont reliés par des fils à des points de soudure disposés sur une barrette relais. Les fils provenant de chaque point de soudure vont ensuite jusqu’aux cosses des tubes, interrupteurs et contrôles. Un fabricant a même supprimé les barrettes et utilise à la place des plaquettes de connexion au phénol vissées sur le châssis. Ce système est connu comme étant la méthode de fabrication la plus lente, la plus laborieuse et la plus propice aux erreurs parmi toutes les méthodes de câblage. Le point-par-point est probablement le style de fabrication le plus ancien et il reste approprié pour fabriquer des prototypes. Mais est-ce que l’ampli sonnera mieux pour autant ?
Mon travail en tant que concepteur a toujours été centré sur la “magie noire” de l’amplification : tout d’abord, comment l’obtenir, et ensuite, comment la rendre cohérente. Et c’est là, mes amis, le gros désavantage du point-par-point, avec lui la cohérence est très dure à maintenir.
Que faisons-nous ?
Depuis le début, les Mesa/Boogie ont utilisé une combinaison des méthodes du point-par-point et du circuit imprimé afin d’assurer une cohérence absolue dans le placement des éléments sensibles et des composants. Il est facile de démontrer comment le fait de déplacer certains composants ou fils conducteurs de quelques millimètres peut conduire à une énorme différence dans la “transparence” des aigus, c’est là que la magie opère... ou pas.
À l’intérieur d’un amplificateur point-par-point typique, les fils conduisent le signal des composants jusqu’aux embases des tubes de préampli. Comme beaucoup d’entre eux sont assez sensibles, nous plaçons toujours nos tubes sur l’axe central d’un circuit imprimé afin que les longueurs des câblages puissent être extrêmement courtes et parfaitement cohérentes.
Il faut apporter beaucoup de soins et de minutieuses études pour obtenir une disposition de circuit imprimé qui évite tout “couplage parasite” indésirable pouvant détériorer le son, ou pouvant même inclure quelques touches d’intéractions involontaires (magie noire) qui ne pourront jamais être dupliquées de manière fiable en point-par-point.
Et pourquoi le faisons-nous ?
Par exemple, les aigus magnifiques du Dual Rectifier ont un mordant aggressif, tout en évitant la dureté grâce à deux tracés très importants savamment disposés sur la carte. Un tracé se trouve au-dessus et l’autre court juste en-dessous sur l’envers de la carte. Ainsi la très petite -mais suffisante- quantité de résistance couplant ces deux tracés effectue un filtrage subtile, une sorte de “feedback négatif” en un point critique où les harmoniques peuvent en quelque sorte être alignés juste comme il faut. Bien évidemment l’alignement des tracés des deux côtés de la carte doit être absolument précis et cohérent pour que cela fonctionne.
Voici une illustration des différentes techniques de câblage. Comparons-les aux livres imprimés et aux manuscrits. Une fois que les caractères sont correctement disposés la page imprimée sera toujours la même, sans aucune erreur. Essayez maintenant d’imaginer qu’il faille disposer les lettres à égale distance du haut et du bas de la feuille de papier, mais cette fois en écrivant à la main. C’est parfaitement impossible. Un alignement aussi précis est très difficle à obtenir ne serait-ce qu’une seule fois, et il faut qu’il en soit toujours ainsi. Avec une presse d’imprimerie ou un circuit imprimé, c’est beaucoup plus facile.
Dans quel cas utilisons-nous encore le point-par-point ? Pour répondre brièvement : Partout où cette méthode peut améliorer l’amplificateur. De nombreux fabricants ont essayé de tout mettre sur circuit imprimé, mais nous, nous câblons séparément et en point-par-point tous les jacks, interrupteurs, transformateurs et tubes de puissance à 8 broches. Parce que cela améliore la fiabilité et facilite grandement leur remplacement. Si ces pièces étaient montées sur circuit imprimé, il y aurait beaucoup à démonter pour y accéder. Encore pire, le circuit imprimé pourrait être détruit en cas de gros choc, et l’ampli serait alors pratiquement irréparable.
Notre engagement est de fournir un instrument professionnel qui, avec une maintenance minimale, peut durer toute une vie voire plus. Toutes nos cartes de circuits imprimés sont à double-face et “métallisées”, ce qui signifie que chacun des trous a un enrobage en platine et cuivre formé à l’intérieur qui établit la continuité avec les tracés en cuivre du dessus et du dessous. Ainsi chaque composant ou conducteur est soudé trois fois : au-dessus, en-dessous et à l’intérieur du trou.
La plupart des fabricants utilisent des cartes à une seule face où il n’y a qu’un seul point de soudure par pièce sur une mince feuille collée sur la surface des cartes. Mais le plus souvent, ces cartes, une fois installées ne peuvent être ni réparées ni remplacées sans avoir à démanteler complètement l’amplificateur.
Pour la petite histoire
J’ai dû réparer des milliers d’anciens Fender, et j’étais considéré comme le gars qui pouvait vous débarasser des bruits parasites, mais en fait pas toujours. J’ai finalement trouvé pourquoi certains de ces bruyants amplis semblaient incurables. Le bruit était généré par les barrettes relais utilisées pour le câblage en point-par-point! Car le matériau de la carte pouvait absorber de l’humidité et devenir ainsi légèrement conducteur. La recommandation de l’usine était de mettre les cartes dans un four séchant puis de les plonger dans de la cire fondue pour les protéger de l’humidité !
Un autre truc : Les cartes ou barrettes peuvent se voiler, et cette légère torsion a pour effet d’augmenter l’espace entre les œillets qui tiennent les cosses. Il y a quelques années, un gars m’a téléphoné, complètement déchaîné parce que son Fender avait rendu l’âme juste avant un grand concert. J’ai écouté la description du problème, puis je lui ai conseillé d’enlever le châssis et de chercher une résistance de couleur brun-noir-brun-argent courant tout du long de la carte. “Donnez-lui une pichenette et vous verrez probablement qu’elle n’est plus fixée au point de soudure” lui ai-je dit. Il m’a rappelé, soulagé et extatique, et il m’a confié qu’il n’avait jamais rien réparé de sa vie auparavant. Pas de problème. J’ai bien dû réparer une centaine de Fender à face noire dans lesquels la torsion de la carte câblée en point-par-point avait causé ce problème. Mais ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit, j’aime les Fender. Sans eux, c’est bien simple, aucun d’entre nous ne serait là aujourd’hui !
En conclusion
Vous comprenez maintenant les quatre avantages des cartes du type circuit imprimé :
1. Cohérence de la disposition,
2. Possibilité d’utiliser la carte pour un couplage intentionnel,
3. Immunité aux bruits parasites causés par l’humidité, et
4. Elle ne se voile pas.
Et si nous parlions maintenant de la manière dont un conducteur affecte le son ? Est-ce qu’un fil rond en cuivre est meilleur qu’un tracé plat en cuivre sur un circuit imprimé ? Pas d’après Randall Research (aucune relation avec moi !) qui a étudié les conducteurs audio dans toutes les conditions, allant même jusqu’au niveau moléculaire sous un microscope électronique. Son opinion est que s’il devait y avoir un avantage, ce serait pour le tracé du circuit imprimé dont le profil offre une surface plus grande. Il est bien établi que les signaux audio (surtout les fréquences les plus hautes) ont tendance à glisser à la surface du conducteur, plutôt qu’à l’intérieur de celui-ci.
Tout ceci n’est pas pour dire qu’il n’existe pas de bons amplificateurs câblés en point-par-point, bien sûr qu’il y en a. Mais ayant construit moi-même des amplificateurs en employant les deux méthodes, le simple fait qu’un amplificateur soit câblé de cette manière est, autant que j’ai pu le constater, uniquement un argument pour qu’il coûte plus cher. Et s’il existait un avantage sonore intrinsèque à utiliser le câblage point-par-point tout le temps, vous pouvez être sûr que nous l’aurions déjà fait !
Randall Smith
(Fondateur, Designer & Président de Mesa/Boogie)
VrAiMeNt TrOp InJuStE
Les paul Standard 2003 FlameTop Heritage Cherry Sunburst
Line6 POD Xt Live
Line6 Pocket POD
Vox Tonelab
Mesa Boogie Single Rectifier
Cabinet 4 HP's Mesa-Boogie
cable hp ProCo Fat Max (merci Gillou) et PlanetWave