Djits a écrit :
J'adore ces débats stériles avant même qu'ils aient commencé
Faudrait se rappeler que Hendrix, comme Einstein, Chaplin ou Picasso, sont des sortes d'"anormalités" en leur temps. Il faudrait donc pas oublier de resituer leur contexte parce que sans ça, je pense qu'on a rien compris.
Hendrix dans les années 60,
c'est une révolution qui mêle l'esthétique, le show, la revendication libertaire (et sexuelle), sur une base blues/rock qui brasse large et à une époque troublée (mouvement des droits civiques aux US, Vietnam, mai 68 et j'en passe). Dans l'univers mainstream de l'époque,
personne ne joue comme lui, ou en tout cas, personne n'arrive à atteindre le premier plan comme lui (et on est d'accord qu'il a bénéficié d'une conjonction d'événements favorables comme ça a été dit).
Je vois pas l'intérêt de chercher un nouveau Hendrix en fait ? Il n'y a qu'un Hendrix comme il n'y a qu'un Django, qu'un Chuck Berry ou qu'un Van Halen. Soit des précurseurs dans leurs styles respectifs, qui ont su trouver la popularité. Et encore, je mettrais un bémol sur Eddie, parce que ça concerne surtout les hair-gratteux des 80's, soyons honnêtes. Tout le monde connaît "Jump!", mais personne sait qui joue la guitare dessus.
Hendrix ça reste un héritage plus large je trouve :
à la fois culturel pour toute l'époque qu'il incarne, mais aussi musical avec un phrasé et une inventivité folle. Et puis il a gagné une signature sonore, c'est pas donné à tout le monde. Aujourd'hui, à l'instar d'un Clapton, d'un BB King ou d'un The Edge,
il a apporté un son reconnaissable en 3 notes.
+ 1000
On ne saurait être ni plus clair ni plus pertinent !
PS 1 : Hendrix c'est aussi une voix !
PS 2 : À ceci près, qu'en matière d'Eddie, même si Hendrix est plutôt un de ses héritiers inattendus, je préfère le Cochran et ses "inventions" très précoces en terme de gimmicks/riffs, ses trouvailles de production à une époque où le très sommaire commandait, enfin sa voix et ses sorties en lyrics, exemple le
Summertime Blues de 1958, dont je vous laisse ici l'usufruit, celui dont encore le grand Blue Cheer sut se souvenir en 1968 :
I'm gonna raise a fuss, I'm gonna raise a holler
About a workin' all summer just to try to earn a dollar
Every time I call my baby, and try to get a date
My boss says, "No dice son, you gotta work late"
Sometimes I wonder what I'm a gonna do
But there ain't no cure for the summertime blues
Well my mom and pop told me, "Son you gotta make some money,
If you want to use the car to go ridin' next Sunday"
Well I didn't go to work, told the boss I was sick
"Well you can't use the car 'cause you didn't work a late"
Sometimes I wonder what I'm a gonna do
But there ain't no cure for the summertime blues
I'm gonna take two weeks, gonna have a fine vacation
I'm gonna take my problem to the United Nations
Well I called my congressman and he said quote:
"I'd like to help you son but you're too young to vote"
Sometimes I wonder what I'm a gonna do
But there ain't no cure for the summertime blues.
Dans cet ordre d'idées, j'aurais pu enfin indiquer une autre admiration, même pas provocatrice, pour le plus beau son clair de guitare, surtout le jeu par lequel il s'incarnait, ainsi qu'une des plus belles voix que j'ai entendus ces dernières-années : ceux de Jeff Buckley.
Mais, comme Eddie C. depuis 1960, le sort a décidé qu'il serait moins présent à partir de 1997.
Cochran, Hendrix, comme Buckley (pour ne rien dire de Tim, son père), et pas mal d'autres (JJ Cale, Peter Green, John Cipollina, Frank Zappa, Tom Verlaine...etc...etc) n'étaient / ne sont pas des athlètes, des sprinters de la portée, capables de courir le milarésolsimi, de la 1° à la 24° case, en 3 secondes aller & retour.
Heureusement !
On l'a échappé belle.
Je me rappelle il y a quelques années un concert où Clapton jouait sur scène avec JJ Cale. À un moment Clapton laisse le solo à JJ Cale. Celui-ci le regarde un peu perdu, comme timide, et se met enfin à balbutier des bouts de notes, vacillants ; puis il s'oublie, puis il joue et oublie peut-être, je ne sais quoi, autour de lui. Au bout de quelques phrasés discrets mais de plus en plus éloquents de Cale, Clapton s'arrête d'accompagner, se tourne vers JJ, qui ne voit plus rien, le regarde en secouant la tête et sourit, comme médusé, ou reconnaissant.
Il y avait eu un peu de musique ce jour-là.
«Wir leben unter finsteren Himmeln, und –es gibt wenig Menschen. Darum gibt es wohl auch so wenig Gedichte. Die Hoffnungen, die ich noch habe, sind nicht groß. Ich versuche, mir das mir Verbliebene zu erhalten. »
Paul Celan, 18 mai 1960, Lettre à Hans Bender.