españa traicionada (l'espagne trahie. staline et la guerre civile)
s'appuyant sur des archives soviétiques inédites, ces historiens arrivent aux conclusions suivantes :
1- Le Parti communiste espagnol (PCE) n'avait pas d'autonomie propre. Ce n'était pas un parti national mais un parti dirigé dans toutes ses facettes stratégiques par les soviétiques à travers leurs conseillers et délégués du Komintern pendant toute la Guerre civile, comme auparavant durant les années de la IIème République.
2- Les soviétiques conditionnèrent et influencèrent les décisions militaires les plus importantes de la Guerre civile en favorisant à tout moment les intérêts nationaux de l'URSS.
3- Le PCE et les conseillers soviétiques ont poursuivi sans merci tous ceux qui ne se pliaient pas à leurs diktats. Ceci explique les attaques contre le socialiste Largo Caballero, les trotskystes du POUM ou l'obsession envers les anarchistes. L'offensive contre Largo Caballero est l'objet de plusieurs dossiers comme celui du 15 avril 1937 où est mentionnée la possibilité d'intervenir de façon drastique afin d'accélérer sa mise au placard (quelques semaines après a lieu la provocation donnant lieu aux "Evénements de Mai 1937" et la chute de Largo Caballero. Les soviétiques s'inquiètent en février 1937 de l'influence du POUM et de son rapprochement avec les anarchistes. Les soviétiques affirment dans leurs rapports le besoin d'écraser le POUM afin de venir plus facilement à bout de la CNT. Certains, comme Marty, conscients de la difficulté d'éliminer complètement les anarchistes affirment : "après la victoire nous prendrons notre revanche." (page 93)
4- La livraison d'armement (payée à prix d'or et par avance par le gouvernement espagnol) fut l'instrument fondamental du chantage exercé sur la République espagnole. Ce chantage fut soigneusement caché par la propagande communiste basée sur "l'aide désintéressée de l'URSS".
5- À partir de la chute du gouvernement de Largo Caballero, les soviétiques assument le contrôle de tous les ressorts du pouvoir d'État, surtout dans les domaines militaires et policiers, tout en maintenant une façade républicaine pour la galerie. L'interprétation selon laquelle il s'agissait d'un essai de dictature communiste est tout à fait pertinente.
6- La répression contre le POUM était l'expression du délire totalitaire stalinien mais aussi un instrument pour affaiblir ceux que les Russes considéraient comme leurs adversaires pour le contrôle de la République : les socialistes (Largo Caballero, puis Prieto et leurs partisans) et les anarchistes.
7- Le développement d'une révolution sociale dans des zones importantes de l'Espagne républicaine (principalement la Catalogne et Valence), libre de la domination et des intérêts stratégiques de l'URSS, provoque un double processus dans la politique communiste : affaiblir la révolution sociale par tous les moyens pour ainsi consolider le pouvoir institutionnel du PCE. Les communistes étaient bien évidemment conscients de l'existence de cette révolution. Un rapport de Marty en octobre 1936 décrit ainsi la situation : "Les travailleurs gèrent les entreprises, mais ils ne savent pas les diriger. Les anarchistes contrôlent tout" (p. 81). Le succès des communistes dans l'écrasement de cette révolution sociale et leur hégémonie est étroitement liée à la démoralisation croissante de la zone républicaine où le PCE et ses alliés parvinrent à marginaliser tous ceux qui avaient une activité autonome.