C'est quoi FAIRE DU SPORT ?? d'où ça vient? à quoi ça sert..

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    le 21 Août 2012, 11:09
Voici une "conférence gesticulée", concept créé par Frank Lepage qui consiste à présenter une conférence sous la forme d'un one-man-show.

Anthony Pouliquen (ami d'un ami de Morlaix) a mis deux ans pour écrire cette conférence. Il n'est pas du tout comédien professionnel donc: indulgence sur les multiples pains de diction, de jeu etc...

Je trouve le sujet très intéressant: en partant de son expérience personnelle, de ses réflexions puis de ses recherches, Anthony décolrtique la "culture" du sport, ses "valeurs" voire sa morale.
Au final, la démonstration que le sport en tant qu'institution organisée est lié au capitalisme, aussi bien sur le plan économique qu'idéologique.

Et surtout, cela explicite la différence énorme entre "jouer au foot avec ses potes" et "faire du sport dans un club".



le blog d'Anthony
http://uneautrehistoiredusport(...).com/
Skelter
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    le 21 Août 2012, 11:12
L'été c'est long, il fait chaud, trop chaud, les potes sont parfois en vacances alors que nous on bosse avec le bruit insupportable du ventilateur dans les oreilles.
Dur!
"Sans une faciale de temps en temps, peut-on réellement parler d'amour?", Ben.oît

#Free the nipple!
#FreeMissDaisy
caribou71
c'est la nouvelle mode les vidéos d' 1h30 postées sur backstage ???
Sodium
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    le 21 Août 2012, 12:00
Ca change du glam shred
Electrique - Guitare d'hiver
Accoustique - Guitare d'été
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    le 21 Août 2012, 14:33
caribou71 a écrit :
c'est la nouvelle mode les vidéos d' 1h30 postées sur backstage ???


tu peux utiliser l'utilitaire gratuit jdownloader pour télécharger le contenu de la vidéo sur ton ordi et la regarder tranquillement.
Redstein


Les JO sont terminés? A mort le sport !

La critique de l'idéologie de la performance sportive engloutie avec les années 70? Pas du tout, philosophes et sociologues la remettent au goût du jour en librairie.

Ça commence par un bruit de fond, à peine un doute. Un chiffre qui sonne tout drôle aussi. Le budget des Jeux olympiques s'élève à 28,6 milliards d'euros. Quand on sait que Montréal a mis trente ans à rembourser les dettes contractées pour les Jeux d'été de 1976, que la Grèce, qui les a organisés en 2004, est loin d'être rentrée dans ses frais - 9 milliards d'euros -, on se demande si les Anglais ont vraiment de quoi exulter. Contrairement à une idée reçue, en effet, les Jeux enrichissent rarement la ville qui les organise, et profitent avant tout à la médiatisation des marques.

Mais ce formidable moment de communion entre les peuples ne doit surtout pas être entaché par des mesquineries comptables ! Voilà des années qu'on s'entend répéter que le sport exalte des vertus universelles telles que la compétition et le dépassement de ses propres limites. La performance à tout prix. La passion du «plus vite, plus haut, plus fort», comme le rappelle justement la devise olympique. Malgré l'ambiance de liesse générale, le doute se précise aux yeux de certains : à l'heure d'une crise du modèle capitaliste qui n'en finit plus d'étouffer l'Europe, ces «saines» valeurs ressemblent à s'y méprendre à celles qui nous ont conduits dans le mur.

L'hégémonie du sport, ce «fléau mondial»

Conséquence du calendrier (deux grandes kermesses viendront rythmer l'été, les JO et le Championnat d'Europe de football), des voix s'élèvent aujourd'hui pour dénoncer le règne hégémonique du sport, ce «fléau mondial», pour reprendre une partie du sous-titre du livre de Marc Perelman (1), réédité cette année. Le philosophe Robert Redeker, collaborateur de Marianne, publie également un essai intitulé l'Emprise sportive (2), dans lequel il analyse ce phénomène mondial dont «chacun fait comme s'il allait de soi». Un ouvrage collectif de jeunes sociologues, le Sport contre la société (3), s'interroge aussi sur cette «institution centrale de la société capitaliste dominante» qui ne souffre nullement de la récession financière. Des revues telles qu'Inflexions (4) ou Vacarme (5) ont également consacré des numéros à la réflexion sur la place du sport, quand une autre, intitulée Quel sport ? (6), en est à son 16e numéro sur le sujet. Un roman, enfin, Dernier shoot pour l'enfer (7), raconte l'enquête d'un journaliste sportif qui accuse l'équipe de France de football de s'être dopée quand elle a gagné la Coupe du monde de 1998. «Bien qu'inspirée de faits réels et fondée sur de nombreux témoignages et documents, cette histoire est une fiction», prévient l'auteur, qui écrit néanmoins sous pseudonyme, au cas où la «fiction» en défriserait certains.

Pour l'essentiel, les thèses de ces ouvrages sont issues en droite ligne des années 70, quand babas cool et intellectuels critiques étaient unis dans une même aversion pour le culte de la performance. Les chaînes de télévision sportives (Tennis TV, Foot +, Golf Channel...) n'avaient pas encore envahi les bouquets satellite, mais le sport était déjà accusé de focaliser l'attention de la planète entière sur ces jeux du cirque modernes, transformant «l'intelligence en un muscle tendu vers la victoire et le gain» (Robert Redeker). A l'époque, l'écho de ces idées ne se limitait pas au timide bruit de fond que l'on croit entendre aujourd'hui. Le sociologue Jean-Marie Brohm, ancien professeur d'éducation physique et figure tutélaire de la critique radicale du sport en France, se souvient : «Quand nous avons organisé le comité pour le boycott de l'organisation par l'Argentine de la Coupe du monde de football en 1978, il y avait eu un véritable mouvement de masse. Nous avions le soutien de Vladimir Jankélévitch, de Foucault, de Catherine Deneuve...» Mais aussi de Jean-Paul Sartre, Jean-Marie Domenach, Louis Aragon, Simone Signoret ou Marek Halter. La pétition lancée par le comité avait récolté pas moins de 150 000 signatures. C'était il y a plus de trente ans.

Entre-temps, des centaines de «records historiques», de «rencontres au sommet» et de «performances inoubliables» ont façonné notre passion collective. Unanimement considéré comme une bénédiction pour l'humanité, le sport a éjecté toute pensée dissonante hors du débat public. Cet état de fait a revêtu un caractère définitif le 12 juillet 1998, quand l'équipe de France a remporté la Coupe du monde de football. Politiques, intellectuels de droite comme de gauche, femmes, enfants, publicitaires, cols blancs et cols bleus, Blacks, Blancs, Beurs : la France a connu un orgasme généralisé. En 1997, anticipant peut-être la déferlante, Jean-Marie Brohm choisissait de dissoudre sa revue pionnière dans la critique radicale du sport (Quel corps ?, qui ressuscitera dix ans plus tard sous le nom de Quel sport ? ) : «D'un côté, cela confirmait nos thèses au-delà de nos espérances, c'était une véritable mystification de masse ! Mais, de l'autre, l'événement a placé notre discours dans une telle situation de décalage qu'il fallait réfléchir à notre orientation stratégique.»

Les Jeux, marketing international

D'autres éléments sont venus donner raison à Jean-Marie Brohm et à ses camarades de lutte. Les institutions sportives internationales, comme le Comité international olympique (CIO), indifférentes aux multiples scandales de corruption qui les ont éclaboussées, n'hésitent plus à le claironner sur leurs sites Internet : «Les Jeux olympiques sont l'une des plates-formes les plus efficaces de marketing international, atteignant des milliards de personnes dans plus de 200 pays et territoires à travers le monde [8].» Des Etats ayant une conception pour le moins élastique des droits de l'homme, comme la Chine, continuent à se servir de ces manifestations internationales pour légitimer leur pouvoir et polir leur image.

La course aux médailles a aussi autorisé une sélection des athlètes dès le berceau et des rythmes d'entraînement qui feraient presque passer l'univers totalitaire du sport qu'imaginait Georges Perec dans W ou le souvenir d'enfance (1975) pour une promenade de santé. Dans le Sport contre la société, le sociologue Clément Hamel rappelle ainsi les circonstances infiniment poétiques qui ont présidé à la naissance du joueur de basket-ball chinois Yao Ming : «Lorsque sa mère, Fang Fenghi, 1,88 m et capitaine de l'équipe nationale féminine, prend sa retraite, les autorités sportives lui "suggèrent", comme c'est l'usage depuis Mao, de "produire un champion". Elles lui trouvent rapidement un père, Yao Zhiyuan, 2 m et joueur d'un des clubs pro de Shanghai.» Résultat : un rejeton de 2,29 m prêt à l'usage.

Les records devant être battus à chaque compétition pour assurer le show, la nature a certes besoin d'un coup de pouce pour fabriquer des athlètes à la hauteur du défi. «Là-dessus, il faut être cohérent et un peu honnête, confie le footballeur Vikash Dhorasoo à la revue Vacarme. On ne peut pas demander aux gars de battre des records, aux cyclistes de monter des cols à des vitesses incroyables, et tout ça à l'eau claire. Défendre à la fois la course à la performance à tout prix et la chasse au dopage, c'est prendre les gens pour des imbéciles.» Cette violence que les sportifs retournent contre eux-mêmes, les supporteurs s'en font l'écho à leur manière. Dans son dernier numéro, Quel sport ? dresse une liste non exhaustive des «centaines de faits de violence mortifères avérés qui ont lieu chaque saison, depuis une bonne quarantaine d'années, à l'intérieur et autour des stades» : «Maroc, sept morts après un match de foot», «Hooliganisme : 13 personnes condamnées à Lucerne», «Tunisie : un stade de football évacué après des violences», etc.

Injonction au «bougisme»

Seulement voilà, ces scandales n'intéressent personne. Tenus pour des dérives n'ayant rien à voir avec l'«essence» du sport, ils sont oubliés en moins de temps qu'il n'en faut pour décapsuler une bière devant un bon OM-PSG. Difficile, en effet, d'exercer encore un jugement critique quand le sport s'est infiltré dans tous les domaines de nos vies. «Ce n'est plus tant la guerre qui est un "grand match", mais la vie elle-même, la "lutte" de tous contre tous dans un monde au devenir incertain, écrit Luc Robène dans Inflexions. L'univers de l'entreprise, à son tour, est irradié par ces images de chocs, d'affrontements, de stages physiques, de préparation au combat économique, de constitution d'équipes de collaborateurs offensifs coachés par des directeurs de ressources humaines inspirés.»

Sur nos CV, nous n'oublions jamais de mentionner nos faits d'armes sportifs pour démontrer notre combativité. Le ministère de la Santé et ses injonctions au «bougisme» ont scellé dans les esprits le lien entre «sport» et «santé», et c'est bien pour dompter nos corps, toujours trop flasques comparés à ceux des «dieux du stade», que nous nous précipitons sur les tapis de course et les rameurs des clubs de fitness. «Ces milliers de coureurs du dimanche qui éructent et crachent leurs poumons avec leur MP3 sur les oreilles comme des troupeaux hypnotisés par l'idéologie du bien-être égocentré» ne laissent pas de consterner Fabien Ollier, digne héritier de Jean-Marie Brohm. Dans son lycée du sud de la France, ce prof d'éducation physique et sportive, philosophe, s'efforce de déclencher chez ses élèves une prise de conscience de l'impact du sport sur les liens sociaux : «L'incitation majeure des pouvoirs publics et des médias, c'est d'éprouver son corps dans la douleur. La valorisation incessante de cette défonce physique a un sens politique : il s'agit d'une autochloroformisation des consciences par le biais de la fatigue volontaire. Les endorphines opioïdes sont sécrétées, le corps plane, on ne pense plus. C'est un shoot généralisé que chacun se prodigue pour oublier la triste réalité.»

Il ne s'agit naturellement pas de dire que posséder une paire de Nike est le plus court chemin vers la servitude volontaire. Mais on constate que, tandis qu'on s'autorise aujourd'hui à remettre en question le néolibéralisme, l'idéologie sportive, elle, n'est jamais inquiétée. Rêver d'un autre modèle économique, d'accord, mais à condition de ne jamais bousculer un phénomène qui concentre pourtant toutes les tares du vieux système.

E.E.

(1) «Le Sport barbare». Critique d'un fléau mondial, de Marc Perelman. Réédité en 2012 chez Michalon.

(2) «L'Emprise sportive», de Robert Redeker, François Bourin Editeur, parution le 23 mai 2012.

(3) «Le Sport contre la société», de Clément Hamel, Simon Maillard, Patrick Vassort, Le Bord de l'eau, parution le 14 juin.

(4) «Inflexions» no 19, «Le sport et la guerre», La Documentation française.

(5) «Vacarme» no 45, textes disponibles sur vacarme.org/rubrique310.html

(6) «Quel sport ?», disponible sur quelsport.free-nux.org

(7) «Dernier shoot pour l'enfer», de Ludo Sterman, Fayard Noir.

( 8 ) Citation extraite du «Sport contre la société».
'Human beings. You always manage to find the boring alternative, don't you?'


http://fermons-les-abattoirs.org

- Quand Redstein montre l'abattoir, l'imbécile regarde Redstein - (©Masha)
Skelter
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    Skelter
    le 21 Août 2012, 15:40
red tu fais quoi comme taf?
toi aussi tu as du temps à tuer ou bieng!
"Sans une faciale de temps en temps, peut-on réellement parler d'amour?", Ben.oît

#Free the nipple!
#FreeMissDaisy
Redstein
Skelter a écrit :
red tu fais quoi comme taf?
toi aussi tu as du temps à tuer ou bieng!


À vrai dire j'avais cet article dans un onglet Firefox depuis un bail - j'attendais juste le moment propice (merci Bonniwell !) pour le poster, ce qui m'aura pris 3 minutes...

Vu que je vous ai gratifiés de remarques énervantes à plusieurs reprises durant les JO, je vous devais bien une explication -- et cet article a non seulement le mérite d'exposer un point de vue imparable... mais aussi de m'avoir montré que l'explication en question, contrairement à l'idée que je m'en faisais, pauvre naïf resté coincé dans les Seventies, n'avait rien de superflu dans ce monde sinistré par le sport-spectacle et plus généralement par le culte des apparences - comme le prouve d'ailleurs ta réaction
'Human beings. You always manage to find the boring alternative, don't you?'


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Redstein
chix4free a écrit :
C'est quand même un peu rasant le bourdieusisme pontificateur de province...


Ça c'est un flag de parisianisme ou je ne m'y connais point





Cet article mérite mieux qu'un fond de page 1 où personne ne le verra plus :

Citation:


Les JO sont terminés? A mort le sport !

La critique de l'idéologie de la performance sportive engloutie avec les années 70? Pas du tout, philosophes et sociologues la remettent au goût du jour en librairie.

Ça commence par un bruit de fond, à peine un doute. Un chiffre qui sonne tout drôle aussi. Le budget des Jeux olympiques s'élève à 28,6 milliards d'euros. Quand on sait que Montréal a mis trente ans à rembourser les dettes contractées pour les Jeux d'été de 1976, que la Grèce, qui les a organisés en 2004, est loin d'être rentrée dans ses frais - 9 milliards d'euros -, on se demande si les Anglais ont vraiment de quoi exulter. Contrairement à une idée reçue, en effet, les Jeux enrichissent rarement la ville qui les organise, et profitent avant tout à la médiatisation des marques.

Mais ce formidable moment de communion entre les peuples ne doit surtout pas être entaché par des mesquineries comptables ! Voilà des années qu'on s'entend répéter que le sport exalte des vertus universelles telles que la compétition et le dépassement de ses propres limites. La performance à tout prix. La passion du «plus vite, plus haut, plus fort», comme le rappelle justement la devise olympique. Malgré l'ambiance de liesse générale, le doute se précise aux yeux de certains : à l'heure d'une crise du modèle capitaliste qui n'en finit plus d'étouffer l'Europe, ces «saines» valeurs ressemblent à s'y méprendre à celles qui nous ont conduits dans le mur.

L'hégémonie du sport, ce «fléau mondial»

Conséquence du calendrier (deux grandes kermesses viendront rythmer l'été, les JO et le Championnat d'Europe de football), des voix s'élèvent aujourd'hui pour dénoncer le règne hégémonique du sport, ce «fléau mondial», pour reprendre une partie du sous-titre du livre de Marc Perelman (1), réédité cette année. Le philosophe Robert Redeker, collaborateur de Marianne, publie également un essai intitulé l'Emprise sportive (2), dans lequel il analyse ce phénomène mondial dont «chacun fait comme s'il allait de soi». Un ouvrage collectif de jeunes sociologues, le Sport contre la société (3), s'interroge aussi sur cette «institution centrale de la société capitaliste dominante» qui ne souffre nullement de la récession financière. Des revues telles qu'Inflexions (4) ou Vacarme (5) ont également consacré des numéros à la réflexion sur la place du sport, quand une autre, intitulée Quel sport ? (6), en est à son 16e numéro sur le sujet. Un roman, enfin, Dernier shoot pour l'enfer (7), raconte l'enquête d'un journaliste sportif qui accuse l'équipe de France de football de s'être dopée quand elle a gagné la Coupe du monde de 1998. «Bien qu'inspirée de faits réels et fondée sur de nombreux témoignages et documents, cette histoire est une fiction», prévient l'auteur, qui écrit néanmoins sous pseudonyme, au cas où la «fiction» en défriserait certains.

Pour l'essentiel, les thèses de ces ouvrages sont issues en droite ligne des années 70, quand babas cool et intellectuels critiques étaient unis dans une même aversion pour le culte de la performance. Les chaînes de télévision sportives (Tennis TV, Foot +, Golf Channel...) n'avaient pas encore envahi les bouquets satellite, mais le sport était déjà accusé de focaliser l'attention de la planète entière sur ces jeux du cirque modernes, transformant «l'intelligence en un muscle tendu vers la victoire et le gain» (Robert Redeker). A l'époque, l'écho de ces idées ne se limitait pas au timide bruit de fond que l'on croit entendre aujourd'hui. Le sociologue Jean-Marie Brohm, ancien professeur d'éducation physique et figure tutélaire de la critique radicale du sport en France, se souvient : «Quand nous avons organisé le comité pour le boycott de l'organisation par l'Argentine de la Coupe du monde de football en 1978, il y avait eu un véritable mouvement de masse. Nous avions le soutien de Vladimir Jankélévitch, de Foucault, de Catherine Deneuve...» Mais aussi de Jean-Paul Sartre, Jean-Marie Domenach, Louis Aragon, Simone Signoret ou Marek Halter. La pétition lancée par le comité avait récolté pas moins de 150 000 signatures. C'était il y a plus de trente ans.

Entre-temps, des centaines de «records historiques», de «rencontres au sommet» et de «performances inoubliables» ont façonné notre passion collective. Unanimement considéré comme une bénédiction pour l'humanité, le sport a éjecté toute pensée dissonante hors du débat public. Cet état de fait a revêtu un caractère définitif le 12 juillet 1998, quand l'équipe de France a remporté la Coupe du monde de football. Politiques, intellectuels de droite comme de gauche, femmes, enfants, publicitaires, cols blancs et cols bleus, Blacks, Blancs, Beurs : la France a connu un orgasme généralisé. En 1997, anticipant peut-être la déferlante, Jean-Marie Brohm choisissait de dissoudre sa revue pionnière dans la critique radicale du sport (Quel corps ?, qui ressuscitera dix ans plus tard sous le nom de Quel sport ? ) : «D'un côté, cela confirmait nos thèses au-delà de nos espérances, c'était une véritable mystification de masse ! Mais, de l'autre, l'événement a placé notre discours dans une telle situation de décalage qu'il fallait réfléchir à notre orientation stratégique.»

Les Jeux, marketing international

D'autres éléments sont venus donner raison à Jean-Marie Brohm et à ses camarades de lutte. Les institutions sportives internationales, comme le Comité international olympique (CIO), indifférentes aux multiples scandales de corruption qui les ont éclaboussées, n'hésitent plus à le claironner sur leurs sites Internet : «Les Jeux olympiques sont l'une des plates-formes les plus efficaces de marketing international, atteignant des milliards de personnes dans plus de 200 pays et territoires à travers le monde [8].» Des Etats ayant une conception pour le moins élastique des droits de l'homme, comme la Chine, continuent à se servir de ces manifestations internationales pour légitimer leur pouvoir et polir leur image.

La course aux médailles a aussi autorisé une sélection des athlètes dès le berceau et des rythmes d'entraînement qui feraient presque passer l'univers totalitaire du sport qu'imaginait Georges Perec dans W ou le souvenir d'enfance (1975) pour une promenade de santé. Dans le Sport contre la société, le sociologue Clément Hamel rappelle ainsi les circonstances infiniment poétiques qui ont présidé à la naissance du joueur de basket-ball chinois Yao Ming : «Lorsque sa mère, Fang Fenghi, 1,88 m et capitaine de l'équipe nationale féminine, prend sa retraite, les autorités sportives lui "suggèrent", comme c'est l'usage depuis Mao, de "produire un champion". Elles lui trouvent rapidement un père, Yao Zhiyuan, 2 m et joueur d'un des clubs pro de Shanghai.» Résultat : un rejeton de 2,29 m prêt à l'usage.

Les records devant être battus à chaque compétition pour assurer le show, la nature a certes besoin d'un coup de pouce pour fabriquer des athlètes à la hauteur du défi. «Là-dessus, il faut être cohérent et un peu honnête, confie le footballeur Vikash Dhorasoo à la revue Vacarme. On ne peut pas demander aux gars de battre des records, aux cyclistes de monter des cols à des vitesses incroyables, et tout ça à l'eau claire. Défendre à la fois la course à la performance à tout prix et la chasse au dopage, c'est prendre les gens pour des imbéciles.» Cette violence que les sportifs retournent contre eux-mêmes, les supporteurs s'en font l'écho à leur manière. Dans son dernier numéro, Quel sport ? dresse une liste non exhaustive des «centaines de faits de violence mortifères avérés qui ont lieu chaque saison, depuis une bonne quarantaine d'années, à l'intérieur et autour des stades» : «Maroc, sept morts après un match de foot», «Hooliganisme : 13 personnes condamnées à Lucerne», «Tunisie : un stade de football évacué après des violences», etc.

Injonction au «bougisme»

Seulement voilà, ces scandales n'intéressent personne. Tenus pour des dérives n'ayant rien à voir avec l'«essence» du sport, ils sont oubliés en moins de temps qu'il n'en faut pour décapsuler une bière devant un bon OM-PSG. Difficile, en effet, d'exercer encore un jugement critique quand le sport s'est infiltré dans tous les domaines de nos vies. «Ce n'est plus tant la guerre qui est un "grand match", mais la vie elle-même, la "lutte" de tous contre tous dans un monde au devenir incertain, écrit Luc Robène dans Inflexions. L'univers de l'entreprise, à son tour, est irradié par ces images de chocs, d'affrontements, de stages physiques, de préparation au combat économique, de constitution d'équipes de collaborateurs offensifs coachés par des directeurs de ressources humaines inspirés.»

Sur nos CV, nous n'oublions jamais de mentionner nos faits d'armes sportifs pour démontrer notre combativité. Le ministère de la Santé et ses injonctions au «bougisme» ont scellé dans les esprits le lien entre «sport» et «santé», et c'est bien pour dompter nos corps, toujours trop flasques comparés à ceux des «dieux du stade», que nous nous précipitons sur les tapis de course et les rameurs des clubs de fitness. «Ces milliers de coureurs du dimanche qui éructent et crachent leurs poumons avec leur MP3 sur les oreilles comme des troupeaux hypnotisés par l'idéologie du bien-être égocentré» ne laissent pas de consterner Fabien Ollier, digne héritier de Jean-Marie Brohm. Dans son lycée du sud de la France, ce prof d'éducation physique et sportive, philosophe, s'efforce de déclencher chez ses élèves une prise de conscience de l'impact du sport sur les liens sociaux : «L'incitation majeure des pouvoirs publics et des médias, c'est d'éprouver son corps dans la douleur. La valorisation incessante de cette défonce physique a un sens politique : il s'agit d'une autochloroformisation des consciences par le biais de la fatigue volontaire. Les endorphines opioïdes sont sécrétées, le corps plane, on ne pense plus. C'est un shoot généralisé que chacun se prodigue pour oublier la triste réalité.»

Il ne s'agit naturellement pas de dire que posséder une paire de Nike est le plus court chemin vers la servitude volontaire. Mais on constate que, tandis qu'on s'autorise aujourd'hui à remettre en question le néolibéralisme, l'idéologie sportive, elle, n'est jamais inquiétée. Rêver d'un autre modèle économique, d'accord, mais à condition de ne jamais bousculer un phénomène qui concentre pourtant toutes les tares du vieux système.

E.E.

(1) «Le Sport barbare». Critique d'un fléau mondial, de Marc Perelman. Réédité en 2012 chez Michalon.

(2) «L'Emprise sportive», de Robert Redeker, François Bourin Editeur, parution le 23 mai 2012.

(3) «Le Sport contre la société», de Clément Hamel, Simon Maillard, Patrick Vassort, Le Bord de l'eau, parution le 14 juin.

(4) «Inflexions» no 19, «Le sport et la guerre», La Documentation française.

(5) «Vacarme» no 45, textes disponibles sur vacarme.org/rubrique310.html

(6) «Quel sport ?», disponible sur quelsport.free-nux.org

(7) «Dernier shoot pour l'enfer», de Ludo Sterman, Fayard Noir.

( 8 ) Citation extraite du «Sport contre la société».
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- Quand Redstein montre l'abattoir, l'imbécile regarde Redstein - (©Masha)
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Redstein a écrit :


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"Sans une faciale de temps en temps, peut-on réellement parler d'amour?", Ben.oît

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Don Guillermo
Citation:
«L'incitation majeure des pouvoirs publics et des médias, c'est d'éprouver son corps dans la douleur. La valorisation incessante de cette défonce physique a un sens politique : il s'agit d'une autochloroformisation des consciences par le biais de la fatigue volontaire. Les endorphines opioïdes sont sécrétées, le corps plane, on ne pense plus. C'est un shoot généralisé que chacun se prodigue pour oublier la triste réalité.»



Au contraire

Il n' y a pas de plus grand moment de méditation , de réflexion , de focus intellectuel , que quand on parcours des kilomètres et des kilomètres . Le corps se mets en pilotage automatique , l' esprit est libre .

C' est trés facile a experimenter , mais ça demande autre chose que lire trois bouquins de sociologie et les relier a deux études de "science et vie junior" , il faut prendre sa paire de pompes et passer quelques mois a s' exercer , et petit a petit on arrive a cet état de méditation , une fois le seuil de la douleur apprivoisé


De manière plus générale , les " grande personnes serieuses" qui m' expliquent que ça ne sert a rien de jouer , puisque le sport c' est aussi ça , a la base , un jeu , une activité ludique , me font a la fois peur et pitié , je pense qu' ils ont perdu quelquechose de préçieux .

Pour finir , je dirai , en mode " backstage " que la critique intellectualisée du sport sert souvent d' excuse aux gras du cul ( vous allez les voir rappliquer içi bientot d' ailleurs ) tout comme le célèbre adage de la taille qui ne compte pas sert souvent d' excuse aux petites bites .
"Mais ouvres les yeux Don Guillermo " - mjolk
Redstein
Skelter a écrit :
Redstein a écrit :


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Je peux ?!!! Je peux ?!!! Je peux ?!!! Je peux ?!!! Je peux ?!!! Je peux ?!!! Je peux ?!!!



DonGuillermo : on parle d'idéologie dominante et empoisonnante liée au sport-spectacle, pas de pratique individuelle raisonnée
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Don Guillermo
Aprés il faut s' entendre sur la définition du " sport "

EDIT

Ok , mais bien souvent les deux sont imbriqués dans les analyses anti-sport .

Il faut vraiment distinguer les deux . le passage que je souligne dans ton article ne me semble pas faire le distinguo .
"Mais ouvres les yeux Don Guillermo " - mjolk

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