Mode de la mélodie et mode de l'accompagnement

Groutcho
Bonjour à tous,

J'ai une petite question qui me taraude l'esprit. J'ai bien compris le concept de mode, et également, par l'expérience, j'ai remarqué que jouer Penta mineure sur un accompagnement de Penta majeure donnait une couleur particulière à l'improvisation.

Ma question est la suivante : Le mode donne t-il sa couleur à la mélodie par rapport au mode de l'accompagnement (harmonie donc) ? Ou bien il faut synchroniser le mode de l'accompagnement sur celui de la mélodie ?

Un exemple sera plus parlant. Si l'accompagnement est en Do majeur (Ionien donc), et que j'improvise une mélodie en Do Ionien, c'est la base. Maintenant, si je veux jouer un autre mode que Ionien, faut-il que l'accompagnement change aussi ? Ou ce qui fait l'intérêt du mode c'est justement le décalage entre ses propres degrés et les degrés de l'accompagnement ?

En gros, faut-il jouer ionien sur ionien, dorien sur dorien, ou ce qui fait l'intérêt de l'existence des modes est justement de jouer dorien, phrygien, mixolydien sur Ionien (au hasard)

C'est clair ?
  • #2
  • Publié par
    bobb006
    le 09 Avr 2008, 10:52
Salut !

D'abord et avant tout, ce qui créer la sonorité d'un mode ce sont les intervalles. en effet, si do majeur, est composé des intervalles suivants :

1T 1T 1/2T 1T 1T 1T

Ré mineur dorien, bien que composé des notes de do majeur, se voit attribuer des intervalles différents. C'est pour cette raison que la sonorité est différente.

1T 1/2T 1T 1T 1T 1/2T

La notion de note à éviter n'est que relative.Certains accords ne supportent que difficilement l'incursion de la 4/11 dans le solo, comme le sol7. D'autres s'accomodent de la 6/13, comme rem7, alors qu'en théorie c'est une note à éviter.

En fait, l'on devrait dire : notes à utiliser avec précaution.

Ce qui veut dire que l'on peut jouer la note do sur sol7 ? Oui, à condition qu'elle soit résolue immédiatement sur le si, Qui est une note constitutive de sol7. On résout rarement sur le re. Dans le jazz par exemple on résolve le problème en jouant le do#.

La notion de note à éviter n'est valable que pour les phrasés au sein d'une grille tonale…En effet, pour marquer la sonorité de façon certaine il est important de mettre en avant les notes caractéristiques de chaque mode.Ce qui ne libère pas des contraintes liées aux notes qui posent problème…

Il existe plusieurs astuces pour éviter les dissonances. La première est la résolution des notes en question.

Il est plus simple de ne pas jouer cette/ces notes.Seulement, un autre problème intervient…Les repères disparaissent…Comparons deux modes :
fa mixolydien fa sol la sib do re mib
fa bartock fa sol la si do re mib

A l'exception du si, toutes les notes sont identiques.vous supprimer le sib du mixolydien et le mode n'à plus d'identité.Ce qui amène, si l'on veux souligner le mode mixolydien, à jouer cette fameuse note…C'est la signature du mode et la seule possible, les autres notes d'enrichissements étant identiques(sol et ré).De même pour bartock, qui lui ne contient pas de note à éviter, la signature est le si bécarre. Ce qui au sein d'une grille tonale ne pose pas de problèmes, au contraire…supprimer la cause et vous supprimez l'effet.

Ceçi dit, jouer la 4te sur mixolydien ou la 9- sur locrien(qui au passage, est un mode très peu utilisé)etc..Est obligatoire, pour improviser sur une grille modale. sinon tout l'intéret de l'histoire est perdu.

La solution, je pense est la résolution des notes à éviter sur les notes clés.A vous de voir, supprimer ou apprivoiser. Rien ni personne ne vous empêche d'expérimenter…La musique, c'est aussi la liberté. Attention quand même aux dissonances.

Les dissonances sont elles aussi très relatives.Miles Davis ou Gil Evans, par exemple, tenaient sur plusieurs temps une note aussi dissonante que la tierce majeure sur un accord mineur…Et çà passe!
Groutcho
Merci beaucoup pour ta réponse bobb006.

Pour vérifier que j'ai bien compris, je vais prendre un exemple avec une grille en Do Majeur (c'est plus simple pour moi de prendre Do majeur par rapport aux intervalles).

Si la grille c'est : Dm - G - C

Je commence par improviser Ionien. Jusque là pas de problème, vu que toutes les notes sont communes entre l'accompagnement et l'improvisation.

Ensuite je décide de jouer Mixolydien, qui contient une sixte augmentée, soit un demi ton en dessous de la 7e Majeure du mode Ionien. Comme la seule note caractéristique du mixolydien par rapport au ionien c'est cette sixte augmentée, je suis obligé de la jouer justement pour donner cette couleur particulière au mode mixolydien.

Donc j'improvise Ionien, puis je décide d'introduire la sixte augmentée. Mais je dois la résoudre sur quel accord, le C ? C'est à dire, que je la joue sur le G et ensuite elle se résout d'elle même lorsqu'on enchaîne sur C ?

Tout cela en sachant que la grille ne change pas...

lodeli
  • lodeli
  • Custom Cool utilisateur
  • #4
  • Publié par
    lodeli
    le 09 Avr 2008, 15:54
dans le mode mixolydien, on a une 7eme mineure plutot qu'une sixte augmentée .
sinon pour ton exemple, j'aime bien aussi associer le mode au degré d'un accord que l'on joue; ça me semble important pour definir la gamme d'improvisation à choisir. mais les puristes de la théorie nous interdisent de faire cette association et disent qu'il faut se contenter de dire que l'on est en do majeur.
Karchaque
alors je pense qu'il y a quelques précisions à faire ici.

D'une, le mode mixolydien est composé des intervalles |1|1|1/2|1|1|1/2|1|
soit seconde majeure, tierce majeure, quarte juste, quinte juste, sixte majeure, septième mineure. c'est la septième qui est altérée, pas la sixte.

Ensuite, je pense que ton exemple est mal choisit. Dm-G-C c'est purement un II V I en C, contexte très tonal, et du coup introduire les modes là dedans est un peu maladroit. (P.S. : après lodeli : merde ! je suis un puriste)

Si on garde quand même cette grille, mais qu'on oublie les modes pour l'instant, on parlera juste de chromatismes, et là c'est clairement des notes de passage, des notes qu'on va automatiquement résoudre. On pense donc à ton C "mixolydien" avec son Bb. Et là l'intérêt que je lui verrais serait d'amener le G : sur le Dm, tu joues D F A Bb et B pour retomber sur la tierce majeure de G.
Sur le Dm et le C, le Bb ne gêne presque pas et surtout n'apporte pas grand chose, c'est assez fade : sur le Dm, si tu joues Bb A, le A sonne mal (enfin tout ça c'est mon avis, fait aussi ta propre expérience).

Pour en revenir aux modes, je peux te résumer ce que bob développe :
Sur un accompagnement qui tourne sur C majeur, tu peux vraiment faire ce que tu veux. Mixolydien, Ionien, Lydien... Toutes les notes qui sont laissés libres sont celles qui ne sont pas comprises dans l'accord : 9 11 13 (et 7 sur un C basique).
Mais en pratique, si tu les altères vraiment "nimporte comment", on prend le risque des dissonances. C'est ça que t'explique bob.

ma réponse à ta question du début du post, c'est que l'accompagnement laisse la mélodie libre du "choix de mode" (c'est un peu cette liberté qui change du tonal).
Groutcho
Je vous remercie pour vos précisions.

Ce qui me posait problème c'était le fait que dans ma tête, si on joue des accords de la gamme majeure, et que la mélodie contient d'autres notes que celles de la gamme majeure, on va entendre une dissonance. Mais je n'avais pas pensé au fait que les accords simples (triades voire tétrade) ne sélectionnaient que 3 ou 4 notes sur 7 et que donc les 3 notes restantes donnaient la "marge de manoeuvre" pour l'improvisateur.

Si je comprends bien si l'improvisateur change de mode, l'accompagnateur devrait lui aussi changer de mode, sinon on reste dans le simple chromatisme de passage ?
TomTomAtomic
Groutcho a écrit :
Merci beaucoup pour ta réponse bobb006.

Pour vérifier que j'ai bien compris, je vais prendre un exemple avec une grille en Do Majeur (c'est plus simple pour moi de prendre Do majeur par rapport aux intervalles).

Si la grille c'est : Dm - G - C

Je commence par improviser Ionien. Jusque là pas de problème, vu que toutes les notes sont communes entre l'accompagnement et l'improvisation.

Ensuite je décide de jouer Mixolydien, qui contient une sixte augmentée, soit un demi ton en dessous de la 7e Majeure du mode Ionien. Comme la seule note caractéristique du mixolydien par rapport au ionien c'est cette sixte augmentée, je suis obligé de la jouer justement pour donner cette couleur particulière au mode mixolydien.

Donc j'improvise Ionien, puis je décide d'introduire la sixte augmentée. Mais je dois la résoudre sur quel accord, le C ? C'est à dire, que je la joue sur le G et ensuite elle se résout d'elle même lorsqu'on enchaîne sur C ?

Tout cela en sachant que la grille ne change pas...



Alors déjà je te stop de suite : ta grille Dm - G - C n'est pas modale, elle est tonale... Premier point!
2eme chose, on ne le dira jamais assez, c'est la grille qui va définir ce que tu va joué : Dm - G - C c'est tonale, tu pourrais joué tes modes dans tout les sens, ça ne sonnera pas, tu passera a coté de l'intérêt de ce genre de cadence.
F - G cela sonnera lydien (et pas autre chose).
Si pour toi mode ce défini par : un bourdon de basse en C pendant 5 minute, alors la en effet tu pourrais joué tout les modes qui te viennes a l'esprit (The riddles de steve vai) maintenant dans le cadre d'une grille avec au moins 2 accords, tu n'as pas cette possibilité de choisir tes modes, la grille elle même sous entend le mode!
Groutcho
TomTomAtomic a écrit :
la grille elle même sous entend le mode!


C'est exactement la réponse à ma question merci !
Karchaque
la grille sous entend aussi le contexte modal/tonal : savoir les reconnaitre.
zigmout
  • zigmout
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par contre je suis pas sur que tu ai compris vraiment les modes vu ce que je lis mais bon.

tiens par exemple si tu parle d'une melodie modale et d'un accompagnement modal...ca veut donc dire que tu est capable de faire une melodie modale(a savoir qui meme toute seul donnera le sentiment modal)...tu fais ca comment?...par exemple tu sais faire une mélodie en do ionien et une melodie en re dorien...et la réponse n'est pas"il suffit de rester sur le mode je te le dis tout de suite car vu que do ionien ,re dorien ou mi mixo sont composé des meme note si on veut sentir a chaque fois la couleur sans avoir rien derriere(pas d'accord ou de basse continu) ben ca va pas marcher.

(on peut tout a fait faire ce que je decris mais bon c'est pas ce qu'on fait generalement en rock ou jazz ,c'est plus une conception classique mais bon tu en parle donc je m'interroge,surtout que ce que tu decris ben en vrai on peut le faire ,a savoir sur un morceau en re dorien se forcer a avoir une melodie en disont sol mixo(meme note mais pas meme point d'appui) ben c'est assez raffiné parfois.

BON OK je vous embrouille un peu car c'est des concept qu'on utilse pas vraiment en rock et de maniere global mais si on a bien compris les mode on peut comprendre tout ca aisement.

Par contre sur le fait qu'un accompagnement suggère naturellement le mode heu...sur un accompagnement modale d'ecole c'est sûr mais clairement pas sur tout...cf en rock ou l'on a souvent des power chord sans extentions et ou plein de mode sont du coup possible.
Groutcho
Intuitivement, je me dis qu'il faut jouer sur les notes cibles, c'est à dire la tonique, quarte, quinte... même si toutes les notes sont identiques, on jouerai plutôt ces notes cibles et on résoudrait sur ces notes cibles...

Mais je vais continuer mes recherches sur les modes, j'avais juste cette question qui me turlupinait et qui m'empêchait d'avancer... Merci.
TomTomAtomic
zigmout a écrit :

Par contre sur le fait qu'un accompagnement suggère naturellement le mode heu...sur un accompagnement modale d'ecole c'est sûr mais clairement pas sur tout...cf en rock ou l'on a souvent des power chord sans extentions et ou plein de mode sont du coup possible.


Quand je dit grille, je parle de grille d'accord a 3 sons au moins, pas de power chord ni d'une ligne de basse a 2 note, cela va de soit!

Moins il y a de note dans l'accompagnement plus tu as de possibilité...
Mais méme d'une maniere general, cette ligne de plusieurs power chord suggerera un certain nombre de mode, cela ne laissera pas un champ libre infini!

Ma reponse était un peu expeditive, mais c'est pour bien faire comprendre qu'il y a des contextes ou il faut pas ce prendre la tête, surtout ici, on vois des personnes arrivés avec des grilles d'accord tout ce qu'il y a de plus simple (plus haut Dm G C) et nous sortir des théories complètement tordu alors que la réponse est évidente!
Groutcho
TomTomAtomic a écrit :
et nous sortir des théories complètement tordu alors que la réponse est évidente!


Pour toi.

Si je pose la question c'est qu'elle n'est pas évidente pour moi.
Karchaque
Si ça ne te saute pas aux yeux que Dm/G/C c'est en do majeur et que c'est tonal, il faut que tu étudie plus le tonal avant de te lancer dans les modes, ça t'évitera de tomber dans le piège.

Ou alors, pour mieux s'initier aux modes, prendre des "grilles modales" à la So what. deux accords : Dm7 et Ebm7 répartis en Dm7(16 mesures)/Ebm7(8 mes)/Dm7(8mes)
Entre ces deux accords, tu n'as vraiment pas cette idée de tension/résolution comme sur ton Dm/G/C où tu peux jouer C majeur tout du long sans sortir de la grille.
Dm7/Ebm7/Dm7 la seule manière de voir ça c'est d'abord on est en ré mineur puis ça module sur mib mineur et on revient sur ré mineur.

Ou sinon la musique traditionnelle indienne, c'est modal. Tu as souvent une note en bourdon, un instrument à corde qui fait un accord, pas mal de percussions, et surtout la voix ou la flûte "charmeur de serpent" qui développe sa mélodie pendant tout le morceau.

Pour moi la mélodie est vraiment laissée libre de développer son truc sur l'accompagnement, la grille n'ayant pas de dynamique propre à souligner.
Mais pour autant il n'y a pas de "mode de la mélodie" et "mode de l'accompagnement". Le contexte modal est créée par les deux.

Maintenant, je ne connais pas l'utilisation dans le contexte rock/métal. Tomtom ou autre, si on pouvait avoir un petit exemple, ça serait parfait je crois.

En ce moment sur théorie...