Voici mon petit coup de coeur d'aujourd'hui suite à la lecture d'une critique de disque de ce groupe Tinariwen... Un groupe de touaregs... Et franchement bah c'est vraiment bon de chez bon... Chanté en tamashek (leur langue natale) quelques petites paroles en français qui percent, Musique très inspiré... La syncope africaine, l'électricité des stratocasters... A mi-chemin entre le chant traditionnel et le blues (moderne et rustique à la fois...)
J'ai pas de comparaisons qui me viennent à l'esprit... Les guitares sonnent dans un esprit très proche de John Lee Hooker mais il y a ce petit truc proprement touareg...
Une interview du groupe...
LE BLUES DU DESERT DE TINARIWEN
Les combattants de l'espoir
Tombouctou, le 20 avril 2004 - «Le blues du désert». Sous cette étiquette "tendance" se cache un groupe de sept musiciens maliens, issus de la région de Kidal, au nord-est du pays. Découverts par les Angevins du groupe Lojo, ils viennent de réaliser leur second album en vingt-cinq ans, Amassakoul, enregistré à Bamako, après un premier opus réalisé à l'énergie solaire dans les locaux de la radio de Kidal. Rencontre avec Abdalla, un des deux leaders du groupe
Pourquoi ce nom de Tinariwen ?
C'est le pluriel de "désert" en tamashek, la langue que nous parlons, nous les Touaregs. "Ténéré" en tamashek signifie le désert, "Tinariwen" ce sont les déserts. Nous avons choisi ce nom parce qu'il représente tous les déserts et pas seulement ce Sahara dont nous sommes issus.
On parle de vous comme du groupe emblématique de la rébellion touarègue qui a débuté au début des années 60 ?
C'est vrai, les plus anciens du groupe, Hassan, Ibrahim et moi sommes d'anciens combattants du mouvement touareg. Nous avons séjourné de longues années dans les camps d'entraînements de Kadhafi dans le sud libyen avec des militants de l'ANC, de la Swapo* et de l'OLP. Puis nous avons combattu l'armée régulière malienne lors de nombreuses escarmouches dans les montagnes. Notre groupe a sensibilisé toutes les populations du désert à nos problèmes pendant la dernière rébellion des années 80. Désormais, nous devons leur parler de la paix, comme nous leur avons parlé de la guerre.
Quelle est la genèse du groupe ?
Les trois membres fondateurs sont Ibrahim Ag Alhabib, Hassan et un certain Inteyedin qui est décédé en 1995. Ce sont eux qui ont joué les premiers rôles dans le groupe entre 1979 et 1981. Ils n'étaient alors que des enfants qui jouaient sur des bidons d'essence. Deux ans plus tard, ils ont vu pour la première fois des guitares électriques. Tout de suite, ils en ont achetés trois. Pendant très longtemps, ils les ont mal accordées et ont cherché tout seuls à s'améliorer. Très vite, ils ont composé des chansons qui parlent de la souffrance touarègue, de l'exil des années 63 et 73. En 1984, ils ont rencontré des cadres de la rébellion militaire dans un camp en Libye. Ils leur ont alors proposé de les installer dans un hangar avec d'autres artistes pour qu'ils puissent se retrouver, jouer, réfléchir, écrire. C'est véritablement là-bas qu'ils ont créé Tinariwen. A cette époque-là, j'étais un nomade, je ne savais même pas ce qui se passait avec la musique en Algérie ou en Libye, où beaucoup de Touaregs avaient été contraints à l'exil. C'est en arrivant à Tamanrasset que j'ai vu ces jeunes Touaregs qui jouaient de la guitare. Et tout de suite j'ai voulu m'impliquer dans cette musique qui me touchait profondément.
C'était la poésie de l'exil ?
De l'exil et de la nature. Elle expliquait pourquoi nous avions dû quitter nos campements avec cette sécheresse qui avait tué nos animaux et les plus faibles d'entre nous. Dans les années 84-85, 70 % des Touaregs étaient entre l'Algérie et la Libye, et ce, jusqu'au début des années 9O, où nous avons commencé à redescendre chez nous. Beaucoup de chansons parlent des massacres de 1963, quand les Touaregs qui s'étaient révoltés ont été massacrés par l'armée malienne. D'autres parlent de la sécheresse de 73. Cela nous a tous marqués.
Comment composez-vous vos chansons ?
On ne s'installe pas comme ça autour d'un thé. A tout moment, on peut trouver l'inspiration, chacun amène ses compositions et à partir de là, on crée une musique.
Vous avez l'impression de faire un «blues du désert» ?
Les ressemblances qui existent entre notre musique et le blues sont vraiment fortuites. C'est venu par hasard, parce que nous, dans notre vie, dans notre culture, on s'intéresse vraiment aux choses calmes, au silence. C'est ce qui nous a amené à faire une musique douce, qui ressemble au blues. Ce n'est pas parce qu'on a écouté beaucoup de blues américain.
Quelles sont vos influences musicales ?
Nous avons appris la musique dans les pays arabes, en Algérie et en Libye. On a beaucoup écouté Ali Farka Touré dans les années 84-85, qui fait selon moi une musique proche de la nôtre, ainsi que la musique du Maghreb comme celle de Nass el Ghiwane ou de Farid el Atrache. Dans le groupe, il y en a certains qui écoutent Bob Marley, d'autres Jimi Hendrix ou les Clash, la protest song du rock.
Comment avez-vous découvert la musique occidentale dans le désert ?
Depuis que je suis arrivé en ville, j'ai toujours trouvé dans les marchés les musiques de Michael Jackson, de Bob Marley ou d'Hendrix. Parce que ce que les Occidentaux appellent le désert, ne correspond pas à la perception que nous en avons. A Tamanrasset, ici à Tombouctou, à Gao, à Kidal ou à Agades, chez nous, nous n'avons pas de difficultés à découvrir ce qu'il y a en Europe. Cela dépend de la volonté de chacun d'aller vers l'autre.
Tinariwen Amassakoul N'Ténéré (Island/Universal Music) 2004
Bonne écoute aux curieux...