Jérôme Leroy est un communiste tendance réac. Il a du style, ne se prend pas au sérieux et regarde le monde à travers ses lunettes noires - des Ray Ban, bien sûr -, ce qui le rend subtilement décalé.
Porter des Ray-Ban vous désigne comme un play-boy tendance facho. À votre droite, ce cher Augusto Pinochet vous a à l'oeil. À votre gauche, Audrey Hepburn roucoule avec sa guitare pendant que vous transpirez sur votre prochain roman. Jérôme Leroy a vu et revu
Diamants sur canapé de Blake Edwards. Quand Audrey enlève ses lunettes, on sait que les ennuis vont commencer pour elle et pour l'écrivain. Ils vont s'aimer et chercher à coucher ensemble. On se demande pourquoi. Pourquoi ils ne savent pas que les femmes et les hommes qui couchent ensemble finissent toujours par se haïr. La morale de l'histoire est qu'il ne faut jamais enlever ses Ray-Ban.
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Mais là où Jérôme Leroy me touche le plus, c'est lorsqu'il évoque le philosophe marxiste Michel Clouscard. Se souvenir qu'en 1973 il publia un livre au titre prémonitoire,
Néofascisme et idéologie du désir, pour nous avertir que bientôt, très bientôt, tout sera permis, mais que plus rien ne sera possible. Clouscard aimait la plage et les filles. Il rêvait d'un communisme sexy, poétique et balnéaire, un communisme en lunettes noires. Jérôme, tu as raison : il faut aimer Bernard Frank et ne pas oublier Clouscard. Les lire avant l'amour et après, comme tu dis.
Ta
Physiologie des lunettes noires n'a l'air de rien, et pourtant, sur la plage cet été, elle sera aussi indispensable qu'une paire de Ray-Ban.
Roland Jaccard,
Ma Vie et autres trahisons