J'irai même plus loin : je propose un ban dès qu'on y cause faits-d'actualité-pas-trop-graves-pas-trop-choquants
Sinon, superbe interview de François Gemenne chez Reporterre :
« Le problème n’est pas tant le capitalisme que le court-termisme »
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Avec le changement climatique, toute une série de cadres d’analyse n’a plus de sens : les frontières, la souveraineté. Qu’est-ce que veut dire la souveraineté nationale à Tuvalu, quand les côtes de votre pays sont grignotées par la mer en raison du mode de vie d’autres pays, à l’autre bout du monde ? Que veut dire le concept de frontière quand la géographie des cartes est complètement redessinée ?
Les migrations environnementales nous disent qu’aujourd’hui le futur et le présent de populations sont complètement transformés à cause de facteurs sur lesquels ils n’ont plus aucune prise. Ça implique de penser les choses de manière « anthropocénique » : notre place sur cette planète ne s’arrête pas à nos frontières nationales et notre responsabilité en tant qu’humains ne s’arrête pas à des frontières géographiques ou générationnelles. Il faut repenser les relations internationales pour les transformer en relations globales.
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Il faut concevoir les luttes et mobilisations locales comme étant une déclinaison de l’international. On ne peut pas se dire « je vais aller tout seul cultiver mon lopin de terre en permaculture et tant pis pour les autres ».
Il faut soutenir des mouvements sociaux ou des ONG, comme 350.org ou Greenpeace, qui dépassent les frontières. Ensuite, il faut faire pression collectivement sur des banques ou des entreprises multinationales. Je suis révulsé quand des gens viennent me dire « qu’est-ce qu’on peut y faire, de toute façon, on est en France, ce sont des multinationales qui décident ».
Les banques qui investissent massivement dans les énergies fossiles sont BNP Paribas et la Société générale. Lafarge est le numéro 1 du ciment, Nissan Renault est le numéro 1 de l’automobile ! Je suis effrayé de voir combien les gens se sentent déconnectés de l’action internationale. La France a un siège au Conseil de sécurité, nom d’un chien (sic) !
Qu’on puisse se sentir impuissant quand on est dans un minuscule pays comme Sao Tomé-et-Principe ou Tuvalu, d’accord, mais quand vous êtes Français, vous ne pouvez pas dire des choses comme ça.
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(...) je vois ce qu’il est possible de faire au quotidien en travaillant avec ces entreprises, et ce n’est pas forcément une stratégie des petits pas. Il s’agit de leur montrer à quel point, sur le long terme, elles ont intérêt à la transition écologique, y compris en matière de profit. Le problème aujourd’hui n’est pas tant le capitalisme que le court-termisme.
Les entreprises sont aujourd’hui otages de leurs actionnaires, qui se fichent de l’avenir à long terme. Si elles étaient à nouveau dirigées par leurs dirigeants, on aurait moins de licenciements économiques, et une stratégie de long terme.
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J’ai le sentiment qu’un basculement s’opère dans l’opinion. Les gens vont manifester dans la rue parce qu’ils identifient l’environnement comme une lutte profondément politique et sociale. On sort d’une phase incantatoire où les chercheurs disaient « il faut sauver le climat ». Et on entre dans une période difficile, où la question de l’environnement va devenir un sujet polémique et controversé, facteur de tensions.
Cette période peut déboucher sur le pire et le meilleur. Le choix collectif est tellement immense qu’on pourrait avoir une position de repli et dire « c’est trop radical comme changement », ne faisons rien. Sauf qu’on est la dernière génération à pouvoir changer les choses. C’est à la fois une terrible responsabilité, parfois écrasante, mais c’est aussi une formidable occasion d’inventer autre chose.
Cette aspiration à « autre chose » explique aussi pourquoi le ressentiment envers Emmanuel Macron est si fort. Emmanuel Macron est arrivé comme le candidat du « nouveau monde » et on réalise que c’était sans doute le dernier rempart de l’« ancien monde ».
'Human beings. You always manage to find the boring alternative, don't you?'
http://fermons-les-abattoirs.org
- Quand Redstein montre l'abattoir, l'imbécile regarde Redstein - (©Masha)