La différence majeure avec l'album précédent se situe dans son ambiance générale. Heritage était extrêmement torturé, difficile à appréhender durant les premières écoutes, tandis que Pale Communion est enrobé dans un manteau de mélodies douces et délicieuses. Les parties acoustiques se situent dans la plus pure tradition d'Opeth : envoûtantes, délicates et répétitives. On les goute particulièrement dans l'intimité chaleureuse du casque. Leurs sonorités cristallines apaisent l'âme. Joakim Svalberg, qui signe ici son premier disque en tant que membre du groupe, effectue un joli travail de soutien derrière ses claviers, s'inspirant largement de l'héritage de Per Wiberg.
Pale Communion compte aussi de nombreuses incursions électriques. Mais celles-ci n'expriment aucune violence ou agressivité. Elles ont troqué ces sentiments pour un groove inattendu rappelant parfois certains freestyles live des grands Deep Purple ou The Doors (Goblin). Sur River, dont la partie rythmique finale est l'élément le plus metal sur tout le disque, Opeth se frotte aux harmonies vocales à la Neil Young tout en conservant le son de ses guitares électriques tel qu'il a été défini sur Damnation. Là où Damnation et Heritage proposaient des instants plus ténébreux, ce onzième opus studio est presque toujours lumineux. Mikael Åkerfeldt semble à présent animé d'une redoutable confiance en lui. Il ne sent plus obligé de se cacher derrière des growls et autres gimmicks qu'il juge appartenir à une autre époque de sa vie. S'il y reviendra peut-être un jour, pour s'y ressourcer, il a parfaitement opéré le virage vers la musique qu'il a toujours eue dans le viseur.
Steven Wilson est encore de la partie, au mixage. Mais l'ombre de l'anglais plane comme d'habitude un peu partout sur cet album. Il est le maître étalon des chansons écrites par Åkerfeldt. Parfois, notamment sur Voice Of Treason, il semble même rendre directement hommage à la star du rock prog. Le rythme et l'orchestration menaçante des couplets auraient pu se faufiler sur The Raven That Refused To Sing (And Other Stories). Sur le dernier morceau, Faith In Others, les cordes sont de nouveau de sortie mais les parties vocales du refrain en « oouuuuhhh ooouuuh » gâchent quelque peu le plaisir. Cusp Of Eternity étant également là pour le prouver, Opeth flirte parfois dangereusement avec la musique d'ascenseur et, bien que sur Pale Communion il retombe presque toujours du bon côté de la limite, il faudra veiller à ce que cela reste le cas à l'avenir.
Sur cette production, les suédois livrent une galette qui s'écoute de bout en bout avec un plaisir constant. Tour à tour dépaysant et relaxant, Opeth démontre une maîtrise absolue. On regrettera simplement l'absence de chansons qui puissent vivre en dehors de cet environnement cloisonné comme celles de Damnation et même de Heritage. Alors qu'il continuait à puiser dans son répertoire death sur scène, le groupe risque d'effectuer un nouveau virage. Réponse à partir du 10 octobre pour le lancement de sa prochaine tournée.
Line-up :
Mikael Åkerfeldt (chant+guitare)
Fredrik Åkesson (guitare)
Joakim Svalberg (claviers)
Martín Méndez (basse)
Martin Axenrot (batterie)
Discographie :
Orchid (1995)
Morningrise (1996)
My Arms, Your Hearse (1998)
Still Life (1999)
Blackwater Park (2001)
Deliverance (2002)
Damnation (2003)
Ghost Reveries (2005)
Watershed (2008)
Heritage (2011)
Pale Communion (2014)
Tracklist de Pale Communion (en gras les morceaux essentiels) :
1. Eternal Rains Will Come 6:43
2. Cusp of Eternity 5:35
3. Moon Above, Sun Below 10:52
4. Elysian Woes 4:47
5. Goblin (instrumental) 4:32
6. River 7:30
7. Voice of Treason 8:00
8. Faith in Others 7:39
Opeth – Pale Communion
Roadrunner
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