Fly From Here en 2011 n’était pas l’album du siècle mais constituait un fort bon disque de « reprise ». Yes, malgré son absence des studios depuis une décennie, avait su retrouver ses automatismes. Heaven & Earth est de la même cuvée. Les compositions, légèrement plus insipides, compensent leurs défauts par la très bonne performance de Jon Davison, l’homme providentiel que recherchaient les quatre Yesmen. Depuis les années 80, les line-ups des différentes incarnations du groupe sont remplis d’individualités de passage. Comme Geoff Downes et Trevor Horn avant lui, Jon Davison s’impose d’entrée et on espère sincèrement le voir rester en place.
Toutefois, même avec des nouveaux, même avec une ambition et un engagement fortement ancrés, Yes aura un mal fou à écrire un album de qualité. Leurs compositions trainent en longueur et visent les dix minutes uniquement car c’est une durée qui fait plaisir aux vieux fans. Heaven & Earth est presque entièrement dépourvu de riffs ou de vraies mélodies. Ainsi, lorsqu’un bon groove pointe le bout de son nez, comme sur In A World Of Our Own, on se réveille d’un coup et on imagine que ça va durer. Faux. Les seuls autres éléments marquants sont quelques éclairs de génie sur des soli ou des breaks de Steve Howe (Believe Again, Light of the Ages…)
Pire, It Was All We Knew ressemble à une horreur pondue dans les eighties croisées dont le riff aurait muté avec un chant de Noël. Entendre Steve Howe participer à ce massacre fait mal, lui qui ne faiblit pas d’un iota sur scène mais qui semble incapable d’avoir la moindre bonne idée en matière d’écriture depuis vingt ans. Subway Walls essaie de masquer l’absence de créativité derrière une intro pompeuse symphonique. La suite retombe dans les même travers que l’ensemble du disque. Du prog’ au kilomètre, joliment joué mais ennuyeux comme une kyrielle de faces B.
Entre Genesis, King Crimson et Yes, difficile de dire qui est le mieux loti en 2014. La bande de Phil Collins est inactive depuis un bail malgré une rapide reformation, bien loin des envolées somptueuses de l’ère Peter Gabriel. Robert Fripp a remonté un line-up intriguant de King Crimson, laissant augurer du meilleur. Mais cela fait bien longtemps que le plus expérimental des trois groupes de pères fondateurs ne s’est plus montré incisif. Quant à Yes, il est incontestablement le plus remuant du lot. Mais à un âge où on n’attend plus rien de lui, le groupe devrait se concentrer sur ses tournées et ne sortir un disque que tous les cinq ou six ans maximum. Peu importe dont comment on le considère, Heaven & Earth est de trop.
Line-up :
Jon Davison (chant)
Steve Howe (guitare)
Chris Squire (basse)
Geoff Downes (claviers)
Alan White (batterie)
Discographie :
Yes (1969)
Time and a Word (1970)
The Yes Album (1971)
Fragile (1971)
Close to the Edge (1972)
Tales from Topographic Oceans (1973)
Relayer (1974)
Going for the One (1977)
Tormato (1978)
Drama (1980)
90125 (1983)
Big Generator (1987)
Union (1991)
Talk (1994)
Keys to Ascension (1996)
Keys to Ascension 2 (1997)
Open Your Eyes (1997)
The Ladder (1999)
Magnification (2001)
Fly from Here (2011)
Heaven & Earth (2014)
Tracklist de Space Police: Defenders of the Crown (en gras les morceaux essentiels) :
1. Believe Again
2. The Game
3. Step Beyond
4. To Ascend
5. In a World of Our Own
6. Light of the Ages
7. It Was All We Knew
8. Subway Walls
Yes – Heaven & Earth
Frontiers Records
www.yesworld.com