Quelle guitare acheter pour débuter, avec un budget situé entre 150 et 300 euros ? Que penser des guitares pour débutant proposées sur Internet à moins de 50 euros ? Voilà parmi les questions les plus fréquentes sur nos forums, car il est impossible d’y répondre parfaitement en boutique. En réunissant dix guitares des marques les plus connues aux dernières nées, toutes origines confondues, de 39,99 à 315 euros, nous avons réalisé un banc d’essai comparatif unique en son genre.
Pourquoi ce guide comparatif de la guitare classique pour débutant ?
Certaines lapalissades sont utiles à faire pour souligner certains faits… en voici un beau spécimen : en tant que débutant, on ne dispose ni des connaissances, ni de l’expérience qui permettent de se sentir sûr de soi au moment d’entrer dans un magasin pour choisir sa première guitare classique.
Alors on y entre avec la crainte, souvent légitime, de se faire flouer… ou, pour le moins, avec la désagréable sensation d’être livré sans défense à un vendeur qui veille, logiquement, à ses marges et à ne proposer que les modèles qu’il a en stock. Par ailleurs, à l’heure d’Internet, le débutant qui passe la porte de cette même boutique sait qu’il peut trouver en ligne des instruments à moins 40 euros, mais qu’il lui sera impossible, d’une part, de les essayer avant achat et, d’autre part, de les comparer aux guitares disponibles en magasin…
Et même s’il pouvait comparer, à quels critères devrait-il veiller ? Là aussi, les forums indiquent combien cette question est brûlante et combien les réponses sont rares.
Et puis… les avis récoltés sur Internet comme ceux avancés par les publicités n’inspirent pas toujours confiance…
Pour terminer ce préambule, il me paraît, une fois de plus, nécessaire de parler des dénominations commerciales. Je cite ici un extrait de mon article "La guitare dans tous ses états", Guitare Live N°30 :
"Il y a un préjugé très répandu auquel j’aimerais tordre le cou : celui par la faute duquel les débutants commencent, pour la plupart, sur une guitare bas de gamme. Il est totalement faux de croire qu’un novice n’entend et ne sent pas la différence.
Les dénominations commerciales, qui ne reposent plus sur aucun fondement pratique ou musical, achèvent de troubler le jeu : la désignation "guitare d’étude" par exemple, induit le client en erreur en lui laissant croire qu’il va acquérir un instrument spécifiquement développée pour un abord plus facile…
Mais il n'en est, hélas, rien. On nomme dorénavant "d'étude" une guitare bon marché. […] Méfiez-vous tout autant de la soi-disant guitare "de concert". On s’attend à rencontrer un instrument de très haut vol… et il n’en est rien… n’importe qui peut, dorénavant, badger un instrument à sa guise… Les pires guitares s'appellent bien souvent King, Virtuos, Gold, Grand Concert, Royal… autant de noms rencontrés sur des instruments épouvantables qui me sont passés entre les mains."
…et dix guitares arrivèrent à la rédaction…
De gauche à droite :
Staren SC390 : 39,99 €
Valencia CG160/D : 70,00 €
Yamaha C40 : 110,00 €
EvolutioMusic CC20 : 179,00 €
Cort AC15 nat : 225,00 €
Yamaha CG 111c : 249,00 €
Paul Beuscher Astorga : 249,00 €
Admira Malaga : 249,00 €
Esteve Modèle 1 GR 01 : 315,00 €
Aria AC25 : 315,00 €
Comme vous le voyez, nous avons choisi pour ce comparatif des grands classiques du genre, tels la Yamaha C40, l’Admira Malaga ou la Cort AC15, mais également un instrument aussi novateur que la guitare ergonomique proposée par EvolutioMusic (voir mon article détaillé "Evolutiomusic, la guitare ergonomique", Guitare Live N°29) et, également, deux guitares au prix plancher disponibles sur Internet (Staren et Valencia).
Parce qu’il fallait choisir une chronologie pour les aborder, j’ai décidé de procéder par ordre de prix croissant, tout en sachant qu’il est nécessaire de comparer ce qui est comparable (tiens, une autre lapalissade !) et qu’il convient de ramener les résultats de chaque test au prix de l’instrument.
Avant de vous proposer de m’accompagner pour ce test géant, je vous invite à lire le détail de la méthode choisie pour nos tests. Cette autre exclusivité vient réponse à la fameuse question "à quels point veiller lors du choix d’une guitare". Cette méthodologie s'intéresse à la justesse de l'instrument, la propreté du son, la qualité des finitions et des matériaux en prenant en compte de nombreuses mesures.
Méthodologie :
Pour commencer, chacune des 10 guitares a été soumise à toute une série de mesures objectives, dont voici la liste brute :
Evoquons tout d’abord la longueur de corde vibrante, appelée diapason. Toutes ces guitares étant des 4/4, un format adapté à un guitariste de taille adulte, la mesure de référence est de 650mm. Le calcul est cependant un peu plus complexe : il faut, tout d’abord, bien veiller au point d’où part la vibration au niveau du sillet du chevalet (si celui-ci est arrondi, le diapason commence au sommet de l’arrondi et non au bord du sillet)
Mesure 1 (justesse)
S’il est vrai que 650mm correspondent à la mesure étalon du diapason, le premier contrôle porte sur la portion située entre le sillet de tête et le sommet de la 12ème frette. La valeur de référence est donc logiquement 325mm. Une note de 1 à 5 est attribuée à chaque guitare, 5 étant la correspondance rigoureuse avec la mesure étalon.
Mesure 2 (justesse)
Pour des raisons de compensation, la partie restante du diapason, située entre le sommet de la 12ème frette et le sommet du sillet de chevalet, doit être, du côté des aigües, d’un millimètre plus longue que la valeur obtenue à la Mesure 1, et de deux millimètres plus longue du côté des basses (donc, respectivement : 326mm et 327mm si la première mesure donnait 325mm) Une note de 1 à 5 est attribuée à chaque guitare, 5 étant l’adéquation rigoureuse avec la mesure de référence.
Mesure 3 (pureté du son)
Surface de la touche : celle-ci doit être rigoureusement lisse. Une "banane" concave est admise – voire souhaitable – si elle est parfaitement régulière, mais les creux et les bosses (qu’ils proviennent d’un voilage de la touche ou d’une irrégularité d’enfoncement des frettes) sont rédhibitoires. Sur les instruments bas de gamme, on observe souvent une bosse au niveau de la douzième frette, due à la solidité structurelle supérieure du manche au niveau du pied. La "cuvette" qui en découle entre les frettes 7 et 1 est source de frise, de parasites, voire de chanterelle (la corde la plus aigüe) injouable (ggzzzz…) Des surprises nous attendent : ce défaut ne se rencontre pas qu’en bas de gamme… Là aussi, une note de 1 à 5 est attribuée à chaque guitare, 5 correspondant à une surface idéale.
Mesure 4 (confort de jeu)
Quantité de touche (et de frette) disponible au-delà de la chanterelle. Si la corde est très proche du bord des frettes, le risque qu’elle "ripe" hors du manche lors d’un jeu legato ou "pull off" (ggzzzz…) est augmenté. La valeur étalon minimale étant de 4mm à la 12ème frette, la mesure sert elle-même de note : 5mm donnent une note de 5…
Mesure 5 (confort de jeu)
Action (hauteur des cordes) au sillet de tête. Plus elle est haute, plus c’est inconfortable. La valeur de référence est de 1,4 mm. Une note de 1 à 5 est attribuée à chaque guitare. Chaque dixième de millimètre en trop coûte un point. La plus mauvaise valeur relevée lors de ce test est de 1,8mm, correspondant à une note de 1.
Mesure 6 (confort de jeu)
Action (hauteur des cordes) à la 12ème frette. Plus elle est haute, plus c’est inconfortable. La valeur de référence est de 5 mm. Une note de 1 à 5 est attribuée à chaque guitare : tout ce qui est inférieur ou égal à 5 mm donne une note de 5, tout ce qui est supérieur à 5 donne une note moindre.
Ensuite, les dix candidates ont été soumises aux tests suivants, qui portent sur des critères difficilement mesurables, donc plus "empiriques", mais tout aussi précis :
Mesure 7
Puissance (relative). Il s’agit de la sensation de force sonore ressentie. Divers paramètres définissant cette sensation, c’est l’impression générale obtenue en comparant les 10 cobayes les uns aux autres qui est retenue. Une note de 1 à 5 est attribuée à chaque instrument, 5 correspondant à la guitare la plus puissante de ce banc d’essai.
Mesure 8
Confort (sensation de). Par-delà les mesures effectuées plus haut, c’est la sensation générale de confort obtenue en comparant les 10 cobayes les uns par rapport aux autres qui est retenue. Là aussi, divers paramètres entrent en ligne de compte, tous interdépendants (épaisseur du manche, poids de l’instrument, action etc.) Une note de 1 à 5 est attribuée à chaque instrument, 5 correspondant à la guitare la plus confortable de ce banc d’essai.
Mesure 9
Finition. Il s’agit de l’ensemble des éléments qui y contribuent : épaisseur et précision du vernis, polissage des frettes, précision des assemblages, qualité des surfaces… Une note de 1 à 5 est attribuée à chaque instrument, 5 correspondant à la guitare la mieux finie de ce banc d’essai.
Mesure 10
Précision des mécaniques. Là aussi, divers paramètres entrent en ligne de compte, et ils sont, parfois, contradictoires. Par exemple, il peut y avoir différence entre la sensation et les chiffres. Sur ce point, l’attention se portera autant sur l’absence de jeu mécanique que sur la souplesse de la rotation : un cylindre qui tourne par à-coups peut annuler le travail correcte d’une vis sans fin de qualité. Une note de 1 à 5 est attribuée à chaque instrument, 5 correspondant à la guitare de ce banc d’essai possédant les mécaniques les plus convaincantes.
Bien sûr, il convient de rapporter toutes ces données brutes au prix de l’instrument testé. La fourchette est logiquement assez resserrée pour ce test (de 40 à 300 €) mais on tolèrera mieux certaines imprécisions sur un instrument bon marché que sur une guitare à 315 €…
La note générale de chaque instrument est obtenue en additionnant les notes obtenues dans chacune des dix mesures. Il s’agit donc d’une note sur 50 (10x5)
La note "justesse" est obtenue en additionnant les résultats des mesures 1 à 3, donc sur 15 (3x5)
La note "confort théorique" (à différencier de la note "sensation de confort", qui est plus empirique) est obtenue en additionnant les résultats des mesures 4 à 6, donc là aussi sur 15 (3x5)
Parés ? Alors prenons les dix guitares en main !
Les guitares classiques passées au crible
Staren SC390
(disponible chez http://www.euroguitar.com)
- Prix : 39,99 €
- Note générale : 29/50
- Note justesse : 8,5/15
- Note confort théorique : 10/15
- Puissance relative : 2/5
A ce prix, il ne faut pas s’attendre à des miracles… rien n’est en bois massif sur cette guitare, et la table arborant une feuille de placage en peuplier surprend – mais elle ne cherche pas à dissimuler cet état de fait. La lutherie n’est pas trop lourde, les assemblages corrects. Le chevalet est vissé, ce qui n’est pas de très bon augure. La prise en main de cet instrument ne révèle en revanche pas de gros inconfort. Cependant, les mesures montrent que les choses changent au moment de jouer : le sillet de tête est vraiment trop haut. Dommage car les autres mesures sont plutôt bonnes.
En revanche, comme le montre la note "justesse", aucune des mesures ne révèle de résultat correct. Passe encore le diapason légèrement faux ou le mauvais placement du chevalet, mais la touche est ondulée et seule une partie des notes sonne correctement…
Le son est en conséquence : souvent malpropre, surtout à partir de la 7ème frette. La puissance sonore est au plus bas. Le timbre est du type "nez bouché", mais la table en peuplier plaqué fait le maximum.
À 39,99 €, il n’est, bien-sûr, pas étonnant que cette Staren soit, d’une manière générale, la lanterne rouge de ce comparatif. Il est probable, également, que certains individus de cette série seront mieux lotis que d’autres, mais comment savoir sur lequel on va tomber au moment de passer commande ?
Matériaux pauvres, son caduque, confort médiocre... Difficile de s’attacher à un instrument de ce type.
Valencia CG160/D
(distribuée par INVmusic)
- Prix : 70,00 €
- Note générale : 31/50
- Note justesse : 9/15
- Note confort théorique : 9,5/15
- Puissance relative : 2,5/5
Ici non plus, pas de miracle à attendre… la guitare est entièrement en contre-plaqué. L’ensemble est teinté orangé, c’est une affaire de goût, mais cela cache efficacement la misère des matériaux… La prise en main est assez bonne, la lutherie un peu lourde, les assemblages supportables. Le chevalet est, ici également, vissé. Mais son sillet est multi-compensé, ce qui est surprenant dans cette gamme de prix.
Hélas, cela ne suffit pas à faire la justesse… les mesure sont à peine meilleures que pour la Staren. Ici, la touche semble plus droite, mais ce sont les frettes qui sont irrégulières. L’une d’entre elles dépasse carrément des autres, ce qui rend la chanterelle inutilisable dès la 5ème case ! Pour cette guitare également, on peut imaginer qu’un autre individu de la même série pourrait être plus satisfaisant, mais le fait que celui-ci ait pu passer les contrôles inquiète…
Reste la solution de ne jouer que sur les 4 premières cases (configuration envisageable au début) mais, ici aussi, l’inconfort, dû à un sillet de tête trop haut, est sensible. Dommage car les autres valeurs sont bonnes
Le son est proche de celui de la Staren, la puissance à peine meilleure. Mais comment jouer sur un instrument qui fait "ggzzzz" sur la chanterelle ?
Yamaha C40
(Distributeur : Yamaha)
- Prix : 110,00 €
- Note générale : 39,5/50
- Note justesse : 14/15
- Note confort théorique : 11/15
- Puissance relative : 3/5
Pour le 3ème prix de ce comparatif, la Yamaha C40 confirme sa réputation en obtenant la note générale de 39,5/50, soit la 5ème place du classement général, damant le pion aux deux guitares les plus chères en lice : bravo ! La prise en main est agréable, la finition nettement supérieure à la catégorie dans laquelle son prix la positionne. Évidemment, la lutherie est toute simple, mais les bois, plaqués, donnent une bonne impression. Le sillet de chevalet est compensé à la corde sol.
La justesse est quasi-irréprochable : la touche est presque parfaite et seul un demi-millimètre manque au placement du chevalet. La C40 se place parmi les meilleures guitares du comparatif.
Question confort, la note "empirique" n’est pas mauvaise, la note technique est moyenne, par la seule faute d’un sillet trop haut de 3 dixièmes de millimètres… dommage, les trois points qu’il lui en coûte auraient catapulté la C40 à une toute autre (et très surprenante) place…
Le son est satisfaisant, la puissance correcte. La table plaquée est suffisamment soignée pour offrir un équilibre sonore qui relègue les deux guitares précédentes loin derrière, y compris en jouant aux limites de ce que la guitare peut encaisser (exercice que la Staren et la Valencia n’encaissent pas du tout)
En conclusion, je stigmatiserai de la sorte : la Yamaha C40 coûte presque trois fois plus que la guitare la moins chère de ce test, mais elle se positionne dans la catégorie des instruments qui coûtent 6 fois plus que cette même guitare de base… La C40, sans prétention, fait exactement ce qu’on attend d’elle : elle offre des prestations correctes et, surtout, sans "danger" à un prix absolument basique.
EvolutioMusic CC20
(Distributeur, Evolutiomusic)
- Prix : 179,00 €
- Note générale : 43,5/50
- Note justesse : 12/15
- Note confort théorique : 15,5/15
- Puissance relative : 3/5
Prise en main surprenante… cette guitare est construite d’après le concept ergonomique inventé par EvolutioMusic (voir mon article détaillé "Evolutiomusic, la guitare ergonomique", Guitare Live N°29) qui, en garantissant un confort inégalé en position classique, fait exploser le score "confort". La lutherie est de bon aloi, la finition est plus que correcte, en tout cas supérieure à ce que l’on attend dans cette gamme de prix. La note générale obtenue est inattendue, et place cette guitare en seconde position de ce comparatif, ex aequo avec une autre surprise, la Paul Beuscher Astorga.
La justesse est correcte, il manque un millimètre au chevalet pour être à la bonne place, mais il est correctement compensé. Dommage que la touche ne soit pas d’une rectitude parfaite : cependant aucun phénomène de frise n’est à lui attribuer.
Le confort généré par le concept ergonomique n’est pas démenti par les mesures techniques : la quantité de touche disponible sous la chanterelle est la plus élevée du comparatif, l’action est la seule à être parfaite aux deux points de mesure. Le sans-faute.
Le son est correct. La table contre-plaquée fait des efforts, mais limite forcément la puissance du son et la qualité du timbre. Pour ce prix, c’est tout à fait correct ; nous sommes en présence d’un instrument qui remplit parfaitement sa fonction : une bonne guitare pour débuter.
Le concept ergonomique peut attirer irrésistiblement ou rebuter le débutant. Même si tout indique qu’au long terme, il sera plus heureux sur ce type d’instrument, le fait de se retrouver en possession d’une guitare qui, de nos jours encore, sort du lot, peut être considéré comme inquiétant. Il n’en est rien dans les faits, mais la sensation est très compréhensible…
Cort AC15 nat
(Distributeur : SAICO http://www.saico.fr/)
- Prix : 225,00 €
- Note générale : 42/50
- Note justesse : 14/15
- Note confort théorique : 13/15
- Puissance relative : 3/5
Prise en main assez agréable, même si le traitement du manche évoque plus l’univers Folk que le classique. L’instrument est plutôt lourd, mais la forme est très réussie, élégante et soignée, comme la rosace, première en "vrai" bois (voir mon article "le nom de la rosace", Guitare Live N°14). La lutherie est bonne, le vernis un peu désagréable, mais la finition est très moyenne : le sillet de tête noie littéralement les cordes, ce qui est préjudiciable (voir mon article "le sillet de tête sur une guitare classique", Guitare Live N°27) et les frettes sont, carrément, laissées brutes et rugueuses.
Une bonne note générale cependant pour cette guitare populaire. La justesse est parfaite, mais une surface de touche moyenne empêche d’atteindre le sans-faute. A noter : les mécaniques sont de très belles Schaller – inattendues à ce niveau de prix – d’une qualité nettement supérieure à toutes les autres ici présentes.
Les notes de confort théorique sont bonnes et confirmées par la note de confort ressenti, un débutant ne sera pas rebuté par ces points.
Le son est correct, mais la puissance n’est pas spectaculaire. La faute au vernis ? Le timbre est un peu métallique, les sonorités un peu brouillées, tout en restant admissibles pour le prix. En revanche, en cas de jeu vibrato, la surface bâclée des frettes gratte les cordes et les fait grésiller.
Cette Cort ne démérite pas, et reste un bon instrument. Mais d’autres font, finalement, mieux pour le même prix, voire pour moins cher…
Yamaha CG 111c
(Distributeur : Yamaha)
- Prix : 249,00 €
- Note générale : 43/50
- Note justesse : 13/15
- Note confort théorique : 13/15
- Puissance relative : 4/5
Petit incident lors du test de cette Yamaha CG 111c… il s’est avéré que le diapason était légèrement faux mais, surtout, que le chevalet était si mal placé et la touche si ondulée que la guitare obtenait une note "justesse" de 8,5/15, aussi mauvaise que celle de la Staren… la note générale chutait à 38,5, soit l’un des trois derniers placements de ce comparatif, malgré une finition record !
En apprenant cela, Yamaha a réagi avec efficacité et célérité, mettant immédiatement une autre CG111c à notre disposition. Ce nouvel individu s’est révélé tout à fait correct, permettant d’emblée à cette guitare de monter sur la troisième marche du podium. J’ai donc noté cet instrument d’après les mesures obtenues sur le second modèle.
La prise en main est agréable. L’instrument est élégant, et les bois plutôt beaux (à ce sujet, notons que, là aussi, le second individu fourni par Yamaha est nettement plus convaincant que le premier) Le manche est agréable, le vernis sans reproche, les sillets soignés, les frettes impeccables. Cette guitare est la seule à obtenir la note de 5/5 en finition, devant toutes les autres.
La justesse est donc au rendez-vous, à un dixième près. La touche du second modèle est presque irréprochable.
Le confort est très bon, malgré une action un peu haute aux deux points de mesure. La sensation confirme les chiffres.
Le son est assez puissant et équilibré. Pas de saturation, mais un timbre un peu nasillard. C’est sur ce point que la CG 111c déçoit et se fait larguer par les deux guitares du même prix…
Paul Beuscher Astorga
(Distributeur : Paul Beuscher http://www.paul-beuscher.com)
- Prix : 249,00 €
- Note générale : 43,5/50
- Note justesse : 14/15
- Note confort théorique : 13/15
- Puissance relative : 4/5
La prise en main est agréable, le vernis est correct. L’aspect général n’est pas des plus avenants (c’est une question de goût il est vrai…) La lutherie est classique et dans la bonne moyenne, la finition également, même si Yamaha reste loin devant.
Cet instrument, plutôt léger, est l’une des bonnes surprises de ce comparatif. Sa note générale lui confère la seconde place au classement général, partagée avec l’EvolutioMusic.
La justesse est réussie, le placement du chevalet n’est pas entièrement parfait, mais dans la moyenne. Notons que nous sommes en présence de la seule des dix guitares à présenter une touche dont la surface est parfaite (note 5/5) !
Le confort souffre d’une trop grande hauteur au sillet de tête, cela lui fait perdre 2 précieux points, alors que les autres mesures sont excellentes.
Le son est très agréable, la puissance en adéquation avec le prix, il n’y a ni "trou" ni grésillement, ni perturbations lorsque l’on joue plusieurs notes à la fois (accords)
La synthèse de tout cela : un très bon instrument pour débuter, à la finition soignée. Pour 50 € de moins, cette guitare aurait carrément "cassé la baraque". Ici aussi, quelques autres ne font que "presque" aussi bien, mais elles le font pour moins cher…
Admira Malaga
(Distributeur : SAICO http://www.saico.fr/)
- Prix : 249,00 €
- Note générale : 46/50
- Note justesse : 14,5/15
- Note confort théorique : 14/15
- Puissance relative : 5/5
Contact rassurant, lutherie de qualité, aspect un peu bon marché (dû à une fileterie digne du bas de gamme) mais sans défaut, finition dans la bonne moyenne (ah si Yamaha n’existait pas !), manche convaincant, vernis réussi : la prise en main fait plaisir.
La meilleure note "justesse" est assurée par un parfait placement du chevalet et un diapason pilepoil. Seule la surface de la touche n’est pas absolument irréprochable, sinon cette guitare aurait fait un sans-faute dans ce domaine.
Le confort théorique ne souffre que d’un sillet de tête trop haut d’un dixième de millimètre ; le confort ressenti est excellent, et le 5/5 aurait été envisageable si EvolutioMusic n’existait pas…
Le son est probablement le plus rond et le plus nuancé de ce comparatif. La puissance est au plus haut. L’ensemble est équilibré.
Tous ces résultats permettent à l’Admira Malaga d’emporter haut la main la meilleure note générale de ce comparatif, à 2,5 points du couple EvolutioMusic/Paul Beuscher. Tout cela pour un prix qui, quoiqu’un peu élevé, est, cette fois, vraiment justifié : on en a largement pour son argent, cette guitare étant susceptible d’entrer dans la catégorie supérieure où, là, elle serait carrément bon marché.
Esteve Modèle 1GR01
(Distributeur : SAICO http://www.saico.fr/)
- Prix : 315,00 €
- Note générale : 39/50
- Note justesse : 12/15
- Note confort théorique : 10,5/15
- Puissance relative : 5/5
La prise en main est très agréable : lutherie fine, forme élégante, belle fileterie, manche soigné, finition très correcte, l’Esteve présente des atours séducteurs…
La justesse, en revanche, déçoit carrément. Le diapason est correct, mais le placement du chevalet laisse à désirer, avec une mesure rare d’un demi-dixième de trop. Quant à la touche, surtout du côté de la chanterelle, elle est affublée de vaguelettes difficilement admissibles pour ce prix.
Le confort est également en retrait, avec une action trop haute aux deux points de contrôle et assez peu de touche sous la chanterelle. Le confort ressenti est à peine meilleur.
Le son est puissant mais la qualité du timbre laisse sur sa faim.
En gros, cette belle Esteve est loin d’être une mauvaise guitare. Mais d’autres, ici présentes, font mieux pour moins cher…
Aria AC25
(Distributeur : SAICO http://www.saico.fr/)
- Prix : 315,00 €
- Note générale : 38,5/50
- Note justesse : 12,5/15
- Note confort théorique : 12/15
- Puissance relative : 5/5
Ici aussi, la prise en main est agréable. Les bois sont flatteurs, la tête est joliment sculptée, la lutherie plutôt fine : une guitare élégante.
Hélas ! Cela est totalement occulté par une finition déplorable. Le vernis présente diverses ratures : souvent trop épais (on a vraiment l’impression que l’instrument a, tout simplement, été trempé dans un bain) et baveux, il présente divers manques à d’autres endroits… les frettes sont poncées au point de présenter, par endroits, un méplat rugueux calamiteux. Quant au chevalet, assez correctement posé mais malformé, il néglige de recouvrir parfaitement la partie non vernie sur laquelle il est posé (ce qui, en soi, dénote d’un assemblage raffiné, avec collage après vernissage)
La surface de la touche a, elle aussi, quelque vague à l’âme - que le vilain ponçage des frettes ne rattrape pas complètement.
Quant au profil du sillet de chevalet, au lieu de présenter un angle, il offre, lui aussi, un véritable méplat, engendrant des vibrations parasites inadmissibles à ce niveau de prix…
Le confort souffre d’une action trop haute au sillet de tête. Dommage, cela met à mal les autres mesures, qui sont excellentes. Le confort ressenti laisse, lui aussi, à désirer.
Le son est étonnamment puissant, le timbre plutôt réussi. Mais la 6ème corde, mise à mal par le sillet de chevalet, vibre à tout va et gâche entièrement la fête.
Conclusions, les meilleures guitares pour débutant
Voici le tableau final qui récapitule de façon détaillée les résultats des mesures et des évaluations.
Finalement, la première conclusion à tirer de ce comparatif méticuleux est que les deux guitares les plus chères ont un point commun avec les deux guitares situées à l’autre extrémité de la fourchette : elles sont les lanternes rouges de ce comparatif ! C’est une demi-surprise.
A l’heure du verdict, on cerne nettement deux catégories :
1) celle entre 110 et 180 euros, représentée par une valeur sûre, la Yamaha C40, et par l’originale et très recommandable EvolutioMusic CC20. Toutes deux sont équipées de tables plaquées limitant leur qualité sonore.
2) celle à 250 euros, dans laquelle la Paul Beuscher Astorga et, surtout, l’Admira Malaga, sortent nettement du lot. Les tables massives qu’elles arborent fièrement font la différence.
Payer plus s’avérant inutile (à moins, bien sûr, de payer BEAUCOUP plus), il n’y aura que le budget maximum disponible et le goût personnel qui permettront, en dernière instance, de faire son propre choix. Car, et cela, on ne le répètera jamais assez, en plus des mesures (qui permettent de faire une première sélection objective), ce qui doit compter, c’est ce que l’on ressent quand on serre l’instrument contre soi, quand on fait sonner les cordes sous ses doigts, même si les sons obtenus sont malhabiles. Respecter cette sensation est primordial, parce que, justement, subjectif. Ce n’est pas parce que le goût et l’oreille sont susceptibles de considérablement évoluer avec le temps et l’expérience qu’il faut partir sur un malaise actuel. Enfin, si vous en avez la possibilité, n’hésitez pas à essayer plusieurs individus d’un même modèle pour élire le vôtre.
Voici donc les trois guitares qui sortent gagnantes de ce comparatif.
En appliquant, sans vous laisser troubler par mille avis, les quelques conseils de ce banc d'essai, et en vous armant des résultats que nous avons livrés, vous aurez toutes les chances de votre côté et débuterez certainement avec une guitare qui vous rendra heureux. Et un guitariste débutant heureux est un guitariste chevronné en puissance…
Textes, mesures et illustrations réalisés par André Stern aka Amidala.