Mille Petrozza : Après la tournée avec Exodus en 2010, nous avons pris quelque temps de repos. Après une courte période de récupération, nous avions déjà hâte d’enregistrer de nouvelles chansons. Ca nous a pris presque un an pour avoir assez de chansons pour faire un album. Nous ne voulions sortir notre album que vers juin 2012 donc nous avons pu prendre le temps de tout peaufiner à tous les niveaux.
Vous avez engagé Jens Borgen pour produire Phantom Antichrist. Comment avez-vous décidé de travailler avec lui ?
M. P. : Je voulais travailler avec quelqu’un de nouveau. Nick Holmes de Paradise Lost m’a indiqué être super content de Jens pour son groupe. Je connaissais déjà certains de ses albums mais je ne l’avais jamais rencontré. Nous nous sommes parlé au téléphone et j’ai tout de suite vu qu’il comprenait qui nous étions. Nous avons une vision de la musique assez proche.
On n’entend pas trop son son sur Phantom Antichrist. Je trouve que c’est vraiment le « son Kreator » dynamisé par sa puissance plus qu’autre chose…
M. P. : Nous avions déjà une vision claire de ce que nous voulions. Jens nous a aidés dans l’exécution. Pas trop dans la création. Nous avions plein d’idées mélodiques assez nouvelles pour nous qu’il a pleinement intégrées à l’album. Il est très fort pour les arrangements ainsi que les paroles et il nous a donné un coup de main appréciable là-dessus. Mais tout était composé avec une idée sonore bien précise dans nos têtes et le but n’était pas de s’écarter du « son Kreator », comme tu dis.
Phantom Antichrist pousse assez loin dans la mélodie ses refrains à tel point que certains auraient pu être pondus par des groupes de power metal. Sur From Flood Into Fire, on dirait presque du Blind Guardian avec toutes les couches vocales ! Pour être franc, en entendant pour la première fois ce morceau, j’ai foncé sur votre biographie pour voir si Hansi Kursch n’était pas invité dessus !
M. P. : (rires) Je respecte Blind Guardian car c’est un super groupe avec des gens très sympathiques. Le truc est que je voulais un morceau épique car ce titre est très différent notamment par ses paroles qui parlent de la confiance en soi. Je ne pense pas être influencé par Blind Guardian mais si tu as entendu ça sur ce morceau c’est certainement que le but a été atteint en termes de théâtralité ! Il y a en tout cas un guest : le chanteur du groupe suédois Dionysus qui donne effectivement un côté bien plus power metal que thrash metal. C’est totalement nouveau pour Kreator !
Il se dégage de Phantom Antichrist encore plus d’agressivité et de haine que d’habitude. Est-ce que cela se ressent également dans les paroles ?
M. P. : C’est délicat de répondre car oui, en effet, les paroles sont très sombres mais il y a toujours une touche d’espoir. Quand j’étais petit dans les années 80, les années actuelles étaient l’avenir et l’espoir. J’étais fan d’Isaac Asimov qui décrivait cela très bien. Pour lui en 2000, une machine répondrait aux questions des hommes. Nous avons Google. Il pensait aussi que les problèmes de la race humaine seraient éradiqués. Il s’est complètement trompé là-dessus. Nous avons des moyens de communication hyper efficaces mais il y a toujours la guerre et la religion qui parasitent tout. En 2012, la guerre et la religion devraient être des notions obsolètes (rires). C’est peut-être une utopie. J’essaie de parler un peu de tout ça sur l’album tout en expliquant que je fonde encore beaucoup d’espoirs sur la race humaine.
Depuis quelques albums, toi et Sami faites vraiment une excellente équipe aux guitares. Est-ce que tu sens une progression de votre complémentarité ?
M. P. : Oui. Nous nous sommes habitués l'un à l'autre et savons exactement ce que l'autre est capable de réaliser. A mes yeux, Sami est un des meilleurs guitaristes du monde car il joue avec de la grâce. Il n'est pas « que » technique ; il sait aussi jouer avec son cœur et ça me plaît. En plus, il s'incorpore super bien à mon jeu car je suis davantage efficace en guitare rythmique. Je peux me frotter à des soli mais ça me prendra beaucoup plus de temps que si c'est lui qui s'en charge (rires).
Pourtant, il me semblait que sur Phantom Antichrist, tu joues un grand nombre de soli...
M. P. : C'est vrai ! On peut dire que sur ce disque nous avons fait nos Downing/Tipton et Murray/Smith (rires). Nous avons pas mal joué en « questions/réponses » et avons ajouté des teintes de heavy classique dans notre musique, particulièrement dans les soli. Je crois que nous arrivons enfin à intégrer ses influences. Avant, nous n'en étions tout simplement pas tout à fait capables...
En prélude à la sortie de l’album, il y a un single dont la face B est une reprise de The Number Of The Beast (Iron Maiden). Pourquoi avoir décidé de vous frotter à un classique de cette trempe ?
M. P. : Nous avons l’habitude de « triturer » nos morceaux préférés quand on va en studio. Néanmoins, il y a des morceaux tellement incontournables que personne ne devrait les modifier. The Number Of The Beast en fait évidemment partie. Nous avons donc joué le titre avec tout le respect et la puissance qu’il méritait. Le chant a été très délicat à assurer car je ne savais pas trop comment le gérer. Au final, je pense que ça ressemble à du Kreator jouant une chanson composée par Iron Maiden.
Kreator peut aussi être rangé dans les groupes qui à leur tour inspirent d’autres musiciens. As-tu déjà entendu de bonnes reprises de vos propres compositions ?
M. P. : Oui ! Une bonne version de Tormentor par… Tormented (rires) ! C’est un groupe suédois je crois. Il y a également deux ou trois autres reprises de bonne facture qui existent mais leurs noms m’échappent.
Kreator – Phantom Antichrist
Nuclear Blast
www.kreator-terrorzone.de