De passage début septembre au Showroom Gibson à Paris, nous avons eu la chance de nous entretenir avec Cesar Gueikian de Gibson Brands qui occupe un poste clé aux côtés de JC Curleigh dans la nouvelle équipe dirigeante. Nous avons pu aborder ensemble tous les sujets, aussi bien son parcours personnel de musicien et grand collectionneur, que son rôle au sein de Gibson, notamment dans le développement des nouvelles gammes qui rencontrent un franc succès. Nous avons aussi évoqué les vidéos montrant la destruction des Firebird X et autres ES, ainsi que le procès contre Amardillo et même l'exception du traité CITES. C'est bien la preuve que les choses changent pour le meilleur chez Gibson même si tout n'est pas parfait. Au moins le dialogue est ouvert comme vous pourrez le constater.

Bonjour Cesar et merci de nous accorder cette interview. Tu viens juste d'atterrir en France alors nous allons commencer par une question facile : tu as une centaine de guitares dans ta collection personnelle. La plupart de nos lecteurs vont être jaloux et moi le premier. Peux-tu nous en présenter quelques modèles, nous dire comment elle a grandi et le style de musique que tu joues ?

Cesar Gueikian : En ce moment j'ai un peu plus de 100 guitares dont 80 Gibson que j'ai acquises au cours des 20 dernières années. Quand j'ai commencé la guitare, je ne pouvais m'en acheter qu'une seule. Et puis j'ai eu ma première Les Paul quand j'avais 13 ans. Je jouais alors au tennis dans le 'Junior's Tour' puis dans 'Futures and Satellites' le niveau juste en dessous de l'ATP. Et c'est comme ça que j'ai gagné un peu d'argent pour m'offrir cette Les Paul. J'ai commencé la guitare quand j'avais 9 ans sur une guitare classique, c'est tout ce que nous avions à la maison.

Quel a été l'élément déclencheur de ton passage à la guitare électrique ensuite ?

J'ai découvert la musique grâce à la collection de vinyles de mon père, dont certains qu'il n'écoutait pas souvent. Et c'est celui de Black Sabbath qui m'a initié à la guitare électrique. Après avoir entendu tous ces riffs de Toni Iommi j'ai su que c'était ça que je voulais jouer. J'ai ensuite écouté les Guns'n'Roses, Metallica, Alice In Chains, Megadeth… et aujourd'hui encore j'adore le hard rock et le heavy metal mais j'ai aussi joué un peu tous les autres styles, blues, rock… et j'ai joué avec plusieurs groupes de rock traditionnel.

Pour en revenir à ta question sur ma collection, j'ai plusieurs guitares vintage : une ES-150 de 1936 avec le micro Charlie Christian, qui fût la première guitare électrique industrielle, quelques acoustiques Pre-War et Post-War puis la majorité de ma collection est composée d'électriques notamment des Les Paul des années 50, des SG des années 60. Quelques guitares des années 70 avec des sons plus heavy ainsi que plusieurs modèles Custom Shop que j'ai achetés déjà fabriqués, d'autres que j'ai commandés via le programme Made To Measure avant de rejoindre le staff de Gibson. Sans oublier les nouveaux modèles de la Original Collection et les nouvelles acoustiques que j'ai achetés depuis.

Si tu ne pouvais en garder qu'une seule, laquelle choisirais-tu?

Une seule ? (il hésite…) Ce serait sans doute ma Gibson ES-335 TDC de 1964 (Thinline Double pickups Cherry) avec chevalet fixe (stoptail) d'usine en finition Cherry dont le numéro de série est très proche de celle d'Eric Clapton. Cette guitare peut tout faire : je peux jouer heavy, classique, pop, rock, blues… Ce n'est pas celle que j'aime le plus, mais celle que je choisirais si je devais garder le meilleur outil disponible et la plus polyvalente.

Avec quel ampli ?

J'aime les amplis Marshall, j'en ai une quinzaine. Avec plusieurs couleurs Custom.

J'ai lu que le nom d'une de tes précédentes entreprises était Melody. Ça montre bien que tu es un passionné de longue date, pas juste maintenant que tu travailles pour Gibson. 

Oui c'est exact. Depuis mon enfance la musique est ma plus grande passion. Et aujourd'hui j'arrive à associer ma passion pour les guitares et en particulier les Gibson, avec mes compétences dans le business. La musique a toujours eu une influence sur mon travail. Alors quand j'ai lancé mon entreprise de rachat et redressement d'entreprises, le nom était tout trouvé.

S'agit-il ta première expérience dans l'industrie musicale ? Il me semble que tu étais une sorte de conseiller pour le précédent groupe à la tête de Gibson, non ?

Je n'étais pas un conseiller officiel. Mais j'ai rencontré la précédente direction il y a 12 ans et par passion pour la marque j'ai toujours aidé lorsqu'ils m'ont sollicité. Sinon j'ai travaillé pour l'entreprise qui gère les propriétés de Mickael Jackson, pour Sony, EMI, Warner… C'était plutôt comme investisseur plutôt qu'en tant que gestionnaire.

Peux-tu nous expliquer en quoi consiste ton poste de Chief Merchant Officer (CMO) et où tu te situes dans la nouvelle hiérarchie Gibson ?

KKR est le nouvel actionnaire majoritaire de Gibson Brands. L'équipe de direction est composée de JC Curleigh qui est le CEO (PDG en français) puis moi en tant que Chief Merchant. Je suis responsable de tous nos produits et de leurs développements, de la nouvelle organisation avec la Original Collection, la Modern Collection, la Gibson Historical Custom Shop, notre nouvelle stratégie pour les acoustiques avec la série Generation notamment, Epiphone, Kramer et toutes les autres marques. Je gère notre département marketing afin de développer du lien avec nos fans et créer de la demande pour tout ce que nous faisons. 

Je m'occupe aussi des Entertainment Relations auprès de notre communauté d'artistes à travers le monde. J'ai aussi la Gibson Experience qui comprend l'ouverture à Nashville d'ici quelques mois d'un showroom Gibson Experience qui sera sous la responsabilité également de Mark Agnesi, un véritable expert du marché vintage et dont je suis un ancien client (il travaillait pour le magasin spécialisé Norman's Rare Guitar Shop, NDLR).

S'agit-il d'un showroom ouvert au public ou uniquement un point d'accueil pour les artistes et la presse ? 

Nous aurons un showroom privé à Nashville qui en actuellement en construction mais le Gibson Experience dont je parle sera ouvert au public et deviendra la destination pour voir des concerts, accéder au coffre fort 'Gibson vault', on retracera pas mal d'évènements cool de l'histoire de Gibson, on y exposera tous nos nouveaux produits aussi, on y mettra en avant nos divers partenariats…

Vous ne vendrez pas directement sur place ?

Non, ce n'est pas une stratégie de revente. C'est vraiment l'endroit pour ressentir l'expérience Gibson. Si aujourd'hui je te demande où tu irais pour savoir ce qui se passe chez Gibson ou pour te faire un avis sur nos guitares, tu me donnerais sans doute le nom d'un magasin mais qui n'aura pas tous nos modèles en stock. Nous voulons gérer ce Gibson Experience nous-mêmes tout en continuant à travailler avec nos revendeurs ainsi que sur notre présence sur internet. 

Puisqu'on évoque les revendeurs, est-ce que les conditions commerciales assez rigides du précédent régime ont évolué depuis la prise de fonction de la nouvelle équipe ? 

Il était difficile de travailler avec Gibson auparavant. Nous nous en sommes rendu compte rapidement. Et avec JC, l'une des premières mesures que nous avons prises, a été de faciliter cela. Nos relations avec le réseau de distribution à travers le monde se sont améliorées. Par le passé il y avait chaque année une commande imposée et maintenant l'accent est mis sur l'exposition de nos modèles et sur la collaboration pour apporter à nos revendeurs les meilleures conditions de succès possible aussi bien en magasin que sur internet, tout en tenant compte des différences qui existent entre les points de vente. C'est une approche beaucoup plus moderne qui se traduit par le retour d'une centaine de revendeurs qui avaient arrêtés de travailler avec nous et qui sont redevenus cette année des revendeurs officiels Gibson.

Pour autant Gibson reste une marque premium avec un certain nombre de conditions à remplir. Si le réseau s'est agrandi il reste limité car tout le monde n'a pas la surface ou les finances pour mettre en valeur une marque premium. Nous avons développé un programme Epiphone Only pour les points de vente qui souhaitent uniquement accéder aux produits Epiphone plus accessibles avec une distribution plus large. C'est un gros avantage pour nous avec d'un côté Gibson qui représente le rêve, l'inspiration, l'authenticité, le haut-de-gamme, et de l'autre Epiphone l'authenticité plus accessible aussi bien sur les électriques que les acoustiques. 

Au cours des dernières années, la qualité de fabrication de certaines guitares Gibson a fait l'objet de nombreux débats sur internet. S'agit-il d'un mythe ou d'une réalité ?

Nous avons beaucoup investi dans toutes nos usines, y compris celles d'Epiphone, pour moderniser nos outils de production et faire en sorte que les instruments que nous fabriquons soient de la meilleure qualité possible. Ce savoir-faire est notre cœur de métier. Nous avons créé un nouveau poste de chef de production, dont le seul et unique objectif est de maintenir et d'améliorer nos standards de fabrication, aidé en cela par toute une équipe dédiée.

 

Après une absence remarquée en 2018, Gibson a fait son grand retour au Winter NAMM de janvier 2019 avec déjà les nouveaux modèles des 3 collections Original, Modern et Custom Shop officiellement lancées en avril dernier. La nouvelle équipe dirigeante est arrivée le 1er novembre, comment avez-vous réussi à mettre cela en place en si peu de temps ? D'autant que les ouvriers sont toujours les mêmes et qu'il a fallu changer de vieilles habitudes de travail très rapidement ?

Avec JC nous avons discuté de tout cela avant même notre prise de fonction officielle. Revenir au NAMM était un objectif ambitieux et important à condition d'y présenter des guitares qui soient pertinentes, attractives avec des identités claires et une organisation bien définie. Nous n'avions pas le choix du calendrier. Il fallait être prêt fin janvier. Pendant les 2 mois qui ont précédé le NAMM j'ai presque vécu H24 dans notre usine à travailler avec notre équipe pour cela. 

Nous avons en interne des personnes très talentueuses qui travaillent chez Gibson depuis 30 ou 40 ans. Ils avaient non seulement des connaissances très précises des instruments mais aussi pas mal d'idées à nous soumettre. Nous avions JC et moi-même nos propres idées sur les choses à mettre en place, et en tant que leaders de cette entreprise, notre rôle a été de donner un cap et de libérer nos équipes pour concevoir ensemble les produits qui feront le succès de Gibson demain auprès de nos fans et de nos artistes.

N'aurait-il pas été plus facile uniquement de présenter la Original Collection ? Ça représente déjà une quinzaine de guitares aux spécifications historiques et ça répond aux attentes d'un grand nombre de guitaristes, non ?

Nous avons choisi d'aller plus loin que ça pour satisfaire tous les fans de Gibson. Nous avions des idées sur les améliorations à apporter à la Modern Collection. Et pour la partie Custom Shop Historic, j'ai ramené plusieurs de mes guitares personnelles, d'autres artistes et collectionneurs ont contribué également. Nous les avons scannées afin d'en réaliser des reproductions fidèles. Je veux que les gens puissent s'acheter aujourd'hui pour $10,000 une copie en tous points identiques à une guitare originale de 1959 qui vaudrait plusieurs centaines de milliers de dollars. Ce serait un succès pour le Gibson Custom Shop.

Nous avons également annoncé quelques changements dans nos gammes de guitares acoustiques. D'autres changements suivront au NAMM 2020 dont pas mal de nouveautés excitantes pour Epiphone.

Le lancement officiel des nouvelles gammes a eu lieu 4 mois après le NAMM. C'était pour avoir le temps de produire suffisamment d'instruments à envoyer chez les revendeurs ? 

Au NAMM 2019 nous avions annoncé des livraisons pour juin ou juillet, et nous avons finalement réussi à livrer dans le monde entier 2 mois à l'avance. Une première chez Gibson ! Nos revendeurs ont été agréablement surpris de cela. 

Verra-t-on de nouveaux modèles intégrer la Original Collection ou est-elle définitivement figée ? Les nouvelles guitares sont-elles condamnées à être des éditions limitées ou des Modern Collection ?

Ça dépend du type d'instrument dont il s'agira. Les caractéristiques des guitares d'une Les Paul 50's ou 60's ne vont pas changer. Mais il est possible que nous ajoutions éventuellement quelques modèles. Je pense notamment à notre gamme Electric Spanish (ES) dont la production migre de Memphis vers Nashville. Les modèles de l'âge d'or des ES viendront dans la Original Collection, d'autres seront plus modernes… 

Lors des dernières années, il semblait que la majorité des guitares Signature Gibson étaient celles de Slash ou Joe Bonamassa. Cette année on remarque que plusieurs autres artistes sont mis en avant avec des instruments aux designs assez originaux finalement. Je pense à la Joe Perry Gold Rush LP Axcess ou encore la sublime Brian Ray SG Jr. Le processus de la guitare Artist est-il de reproduire l'instrument sur lequel ils jouent ou de créer leur "Dream Guitar" ?

Ça va dans les 2 sens et comme pour les revendeurs, il nous a fallu regagner la confiance de plusieurs artistes qui avaient délaissé Gibson et qui aujourd'hui reviennent nous voir. La communauté d'artistes est très importante pour nous. Je viens justement de m'entretenir avec Waxx que tu connais sûrement pour voir ce qu'on pouvait faire ensemble. 

Pour en revenir à la conception des guitares signature, tout dépend si on rend hommage à un artiste comme par exemple le regretté Chris Cornell qui était un de mes héros personnel et une inspiration pour beaucoup. Là on a travaillé avec sa femme pour mettre le projet en place et reverser de l'argent à sa fondation.

Nous sommes évidemment très attaché à notre relation avec Slash avec qui je travaille directement et avec qui nous développons un concept très intéressant qui sera annoncé au prochain Winter NAMM (depuis notre entretien, le Custom Shop Gibson a sorti la Slash 1966 EDS-1275 Doubleneck, NDLR). Nous travaillons toujours avec Joe Bonamassa qui est une véritable icône admiré aussi bien par les jeunes générations qui veulent jouer avec lui que par leurs parents. Et il est capable de jouer dans tous les styles.

Avec Brian Ray, tu as vu la guitare, elle est unique en soi avec son "dummy-coil" le bobinage caché sous la plaque du manche qu'on peut activer ou pas pour atténuer les bruits parasites du P-90 comme sur un humbucker. Et surtout elle est splendide. Et ça c'est à lui qu'on le doit, c'est son idée avec ses exigences pour le son. Notre travail c'est ensuite d'en faire une réalité, une guitare qu'il joue et qu'il aime au point de l'emmener avec lui en tournée ce qui va ensuite inspirer d'autres personnes à jouer de la guitare.

 

Pour les icônes du rock nous avons formé la Gibson Alliance avec une quarantaine d'artistes dont Slash, Billy Gibbons, Don Felder, Gary Clark Jr. et tous ceux que tu peux imaginer. Pour la nouvelle génération nous lançons G3 Gibson Generation Group, un programme international qui se déroule sur 2 ans pour 20 guitaristes de moins de 20 ans. La moyenne d'âge de la première Classe est de 14 ans ! Au terme de ce cursus l'objectif est que ces jeunes talentueux deviennent des artistes grand public, et que les accompagnions en les soutenant, en leur offrant un maximum d'exposition grâce à nos différents événements et réseaux sociaux notamment. Nous voulons les soutenir et nous connecter à ces jeunes générations.

Des statistiques qui circulent actuellement démontrent que les femmes représentent une part croissante des guitaristes actuels et encore plus demain. Ciblez-vous certains de vos produits spécifiquement pour la gente féminine ? Vous avez sorti récemment une ES-339 Signature Joan Jett. Cherchez-vous d'autres artistes féminines à endorser ?

Joan est une source d'inspiration pour beaucoup de guitaristes, pas uniquement des femmes, même si elles sont nombreuses à l'admirer et à vouloir jouer comme elle. Nous allons prochainement sortir une acoustique Sheryl Crow Country Western Supreme, et nous travaillons aussi avec Sinead Burgess… Nous observons nous aussi cette tendance d'un nombre croissant de femmes qui aiment jouer de la guitare, et nous adorons ça ! Nous allons continuer à fabriquer des instruments notamment de la gamme Modern avec des manches plus fins, des corps de guitare plus légers et ces genres de spécifications généralement (pas exclusivement) appréciées par les femmes guitaristes. J'en profite d'ailleurs pour signaler que les femmes sont très représentées chez Gibson et qui sont en plus d'incroyables guitaristes. 

Lors de la récente Conférence des Parties et son fameux traité CITES, une exception vient d'être validée facilitant le transport des instruments finis avec du palissandre. Étiez-vous représentés sur place ? Cette exception va-t-elle entrainer des changements pour Gibson ou Epiphone ?

Oui nous étions présents, et c'est un résultat positif pour toute l'industrie de la musique. Nous allons effectuer quelques changements mais nous avions anticipé ce résultat, et surtout nous allons pouvoir importer et exporter nos instruments finis plus facilement et rapidement puisqu'il n'y aura plus ni les démarches ni les délais pour demander le permis de chaque instrument à partir de son numéro de série. 

Et pour le bois en tant que matière première, nous allons même au-delà des obligations légales pour nous assurer de la durabilité des ressources, avec une équipe dédiée à cela. D'ailleurs nous fabriquons des instruments d'une incroyable durabilité par définition. Si tu ne me crois pas essaie d'acheter une Les Paul de 1959 et vois le prix qu'elle coûte et ce qu'elle vaut. Je joue encore aujourd'hui mon ES-150 de 1936 et elle est incroyable ! 

Le bail de votre usine de Memphis où étaient fabriquées les ES est arrivé à son terme. Vous avez rapatrié la fabrication à Nashville. Est-ce que les employés ont déménagé eux aussi ? Avec votre réorganisation comment le staff Gibson a-t-il évolué en quantité ?

Une grande partie de nos employés de Memphis ont en effet choisi de nous rejoindre à Nashville. À côté de ça nous avons aussi embauché pas mal de monde récemment, et nous recrutons encore actuellement des gens qualifiés pour fabriquer nos guitares. Si tu connais quelqu'un, dis-le moi ! 

C'est dans le cadre du démantèlement cette usine de Memphis qu'ont été filmées les vidéos des ES découpées en 2 et le manche arraché à grands coups de pieds. On a tous vu aussi la vidéo des Firebird X détruites au bulldozer. Des vidéos qui ont choqué pas mal de guitaristes et qui ont été publiées juste après que la Gibson Foundation ait annoncé offrir 1 guitare par jour pendant 1000 jours, un timing désastreux pour l'image de Gibson…

C'est quelque chose que nous n'aurions jamais autorisé. Ceci étant dit, il faut savoir que ces guitares n'étaient pas jouables, endommagées pour certaines ou même dangereuses pour d'autres. Certaines ont subi des inondations, elles avaient rouillé à l'intérieur y compris au niveau des batteries ce qui peut avoir de graves conséquences sur la santé. Nous les avons examinées et nous essayé de les réparer. Et il nous reste encore d'autres Firebird X qu'on ne voit pas dans ces vidéos qui sont irrécupérables et toujours dans nos entrepôts. Si vous m'ameniez une guitare dans cet état je serai obligé de la remplacer par une guitare neuve. En plus de tout ça elles ont besoin pour fonctionner d'un logiciel que Microsoft ne fabrique plus du tout. 

On ne pouvait vraiment pas les utiliser pour la Gibson Foundation. Surtout que pour ce programme nous offrons des guitares neuves qui valent chacune des milliers de dollars et qui s'en vont vers des écoles de musique qui n'auraient pas eu les moyens de se les offrir. L'impact négatif qu'ont eu ces vidéos qui ont fuité a suscité beaucoup d'attention. Mais ça ne change rien au fait que les instruments étaient irrécupérables.

Concernant la plainte déposée par Gibson contre Amardillo que peux-tu nous dire ? Pourquoi avoir ciblé ce fabricant en particulier et pas d'autres ? Si j'ai bien compris seuls les designs de la tête peuvent être protégés et pas ceux du corps…

Si, si, nous avons bien des brevets (trademarks) sur les designs des corps également. Je ne peux pas trop en dire sur une affaire judiciaire en cours. Je peux juste te dire que ça n'est pas juste lié à la Flying V pour laquelle nous détenons des brevets pour le corps, la tête et tout ce qui la compose. C'est plutôt le fait de voir des entreprises comme ça qui copient la SG en l'appelant la GS, ils sortent une acoustique 'Hum' comme notre Hummingbird, une Les Paul… 

Notre obsession c'est de fabriquer les instruments de le meilleur standard de qualité possible. Et il y a une attente de cette qualité associée à l'image de marque de Gibson. Et quand tu penses acheter une guitare Gibson et que ce n'en est pas vraiment une, c'est un problème. Car ce n'est pas le même standard de qualité. Ils peuvent faire leur guitare en V, la forme du V ne nous appartient pas. Ce qui nous appartient c'est la Flying V. Et ça fait des années que durent ces litiges avec Amardillo. Ça n'a rien de nouveau.

Encore une fois, le concept pour nous quand on s'intéresse aux 'Trademarks' c'est de protéger nos fans et nos artistes qui veulent la qualité Gibson. Nous voulons fabriquer nos instruments, dans nos usines pour que quand tu ouvres l'étui et tu prends cette Gibson, elle soit la guitare que tu aimes de la plus haute qualité. Et pour cela nous devons être vigilants face à ce qui se passe sur le marché. 

Pour finir sur une note plus légère, peux-tu nous dire si vous allez bientôt sortir un ampli Gibson ? 

(Il sourit et marque une pause…) Maybe !

Merci à Cesar Gueikian ainsi qu'à l'équipe Gibson France sans qui cet entretien n'aurait pas pu avoir lieu.

[Interview] Cesar Gueikian de Gibson Brands