Pete Trewavas : C’est vrai, nous avons touché à pas mal d’idées par le passé, pas mal de différents formats acoustiques. Notre live Unplugged At The Walls a été enregistré en 1998 je crois. Nous étions en train de mixer Radiation dans une petite ville au nord de Londres. Un grand chef nous a proposé de nous nourrir pendant deux semaines en échange d’un concert ! Nous n’avions pas d’instruments avec nous donc nous avons dû tout faire en acoustique. Les gens ont entendu parler de ça et sont venus du monde entier pour nous voir. Par la suite le live que nous avons sorti sur notre site Internet est devenu une de nos meilleures ventes… De plus, les deux Steve et moi-même jouons souvent en tant que Los Trios pour des émissions de radio ou des événements promotionnels également dans un format acoustique. Nous savons donc jouer des titres comme « Easter », « You’re Gone » ou « See It Like A Baby » en acoustique. Mais nous avons toujours eu peur de faire un véritable album studio dans cette veine.
Pourquoi donc ? Que craigniez-vous ?
Pete Trewavas : C’est une chose de faire une version simple et dépouillée d’ « Easter » ou de « 80 Days » qui de toute manière est acoustique à la base. C’en est une autre de proposer un album qui rompt le processus créatif que nous connaissons habituellement entre chacun de nos opus. Steve Hogarth a ressenti beaucoup de pression sur les paroles de « Happiness Is The Road » car il s’agissait d’un album double. Il faut sans cesse qu’il trouve de nouvelles choses à dire, qu’il prenne de nouvelles positions, qu’il s’investisse émotionnellement, etc. Faire Less Is More lui a permis de prendre sa respiration.
Beaucoup de gens vont comparer ce disque à Unplugged At The Walls. Ce qui est vraiment agréable est que vous avez décidé de totalement réarranger les morceaux par rapport à ce que vous aviez fait là-bas. Seules les versions de « The Space » et « Cannibal Surf Babe » sont quasi identiques…
Pete Trewavas : C’est juste. Personnellement je voulais choisir un maximum de chansons qui n’étaient pas sur Unplugged At The Walls. Du coup, je suis surpris que nous ayons retenu « The Space » puisque tout le monde trouve que nous l’avions déjà fait avec succès… En concert nous jouons également « Gazpacho » à la manière de The Walls, c'est-à-dire avec des accents hispanisants. Pour Less Is More, nous voulions des chansons que nous n’avions pas faites en version acoustique auparavant et qui puissent tout de même fonctionner.
C’est également l’occasion de réinterpréter « Interior Lulu », un titre qui a quelque peu raté son public, je trouve…
Pete Trewavas : Ça fait partie de ces chansons qui ont un goût d’inachevé… Nous ressentons tous cela vis-à-vis de ce titre. Il fut extrêmement dur à écrire et long à enregistrer. Il faisait partie des sessions de Radiation mais n’a finalement été sorti que sur marillion.com. Il faut dire que nombre de chansons de ces deux albums ont été composées en même temps. C’était agréable de retravailler « Interior Lulu » pour lui donner l’ampleur nécessaire. De toute façon, les chansons évoluent en permanence. Une version sur un album n’est jamais la version définitive. Malgré le fait que nous jouons « Easter » depuis vingt ans, sur chaque tournée elle est différente : le solo est plus ou moins long, tout comme la partie finale. La liberté que nous avons au sein de Marillion pour réaliser ce genre de choses est vraiment très appréciable.
Mis à part pour les concerts de Los Trios, est-ce que Less Is More ferme le chapitre acoustique pour Marillion ?
Pete Trewavas : Peut-être qu’en réalité ce chapitre ne fait maintenant que s’ouvrir (rires) ! Nous nous sommes vraiment amusés à faire ce disque et à partir en tournée. Nous explorons de nouvelles possibilités depuis que nous nous sommes lancés là-dedans donc qui sait ! Steve a utilisé une guitare portugaise sur le disque. Même si elle se joue de la même manière qu’une guitare traditionnelle, ça ne lui ressemble en rien. Ça ne s’accorde d’ailleurs pas du tout comme une guitare ! C’est amusant de jouer avec des instruments exotiques de ce genre. Peut-être qu’un jour, à l’avenir, nous nous pencherons sur d’autres chansons à convertir au format acoustique… Beaucoup de gens s’imaginent que notre prochain disque sera du coup plus acoustique. Personnellement, je pense que ce sera l’inverse ! C’est le genre de Marillion de réagir à ce que nous venons de faire !
Il y a en tout cas un titre inédit sur Less Is More et il est tout ce qu’il y a de plus acoustique (rires) ! A-t-il été écrit durant l’enregistrement du disque ?
Pete Trewavas : Non. Je crois que sa composition remonte en fait aux sessions de Somewhere Else. C’est une chanson de Steve Hogarth qui s’appelle « It’s Not Your Fault ». Très personnelle. Je ne pense pas qu’il m’en veuille si je dis ça. C’est une sorte de berceuse pour adultes jouée au piano.
Revenons un instant sur votre précédent (double) album : Happiness Is The Road. Est-ce que cela te surprend que Marillion puisse encore être aussi inspiré autant quantitativement que qualitativement ?
Pete Trewavas : Oh oui ! Nous sommes rentrés en studio avec sept ou huit titres qui nous restaient des sessions de Somewhere Else. Certains avaient déjà été enregistrés. Nous pensions écrire deux ou trois chansons en plus et sortir un disque… Une fois en studio, du fait que nous n’avions pas de pression liée à la feuille blanche, nous avons commencé à nous éclater ! Un véritable torrent de musique a jailli de nous ! L’inspiration ne nous quittait plus et nous avons même dû mettre un terme hâtif à la phase d’écriture car nous n’aurions tout simplement plus le temps de bosser sur toutes ces idées ! Tout ça me donne énormément de confiance pour l’avenir même si, encore une fois, le travail d’écriture des paroles a été très éprouvant pour Steve.
Marillion – Less Is More
Intact
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