Depuis le succès critique et commercial phénoménal de Radiohead et son mémorable OK Computer, plusieurs groupes se sont succédés dans le rôle du porte flambeau de la pop rock progressive. Dernier relayeur en date : les Canadiens d'Arcade Fire. Dès le premier album, Funeral sorti en 2004, leur rock 16/9ème possédait toutes les caractéristiques des plus ambitieuses formations. Neon Bible, en 2007, enfonçait le clou en développant l'aspect mélodique et en allant lorgner du côté de Bruce Springsteen tout en restant fidèle aux expérimentations orchestrales inhérentes au son de la bande de la famille Butler. Au début du mois d'août 2010, Arcade Fire continue sa marche en avant avec un troisième opus dans la lignée des deux précédents, tout autant déterminant.
Les seize pistes du disque, bâties en un tout conceptuel et musical, semblent trouver leurs origines dans No Cars Go, l'excellent single de Neon Bible. Nul ne sait s'il s'agit là du son définitif du groupe mais toujours est-il qu'il n'en démord pas sur The Suburbs. Délavés, délicats, contrastés, tour à tour orchestraux ou d'inspiration électo / noise, les titres posent leurs fondations sur des lignes de chant exceptionnelles. Celles-ci renvoient souvent à Neil Young autant dans le ton plaintif et distant utilisé que dans l'étrange véracité des paroles.Certains passages paraissent provenir de Harvest comme Deep Blue ou Suburban War. Mais, là où Neil Young misait tout sur sa voix et sa guitare acoustique, Arcade Fire emploie d'autres armes. Un arsenal, même. Un synthé disco sur Sprawl II (Mountains Beyond Mountains), des guitares électriques en pleine puissance sur Month Of May, un piano bar sur The Suburbs ou encore un ensemble de cordes sur The Suburbs (Continued) ou une combinaison de plusieurs de ces éléments sur Empty Room : les Canadiens n'ont que l'embarras du choix pour retranscrire leurs thèmes de rock déclamatoire.
Pourtant, tout n'est pas à garder sur The Suburbs. Month Of May sonne comme du très mauvais Ramones et manque de crédibilité autant vocalement qu'instrumentalement. Pire, la chanson, perdue au milieu de l'album détruit le remarquable travail de l'enchaînement City With No Children / Half Light I / Half Ligh II (No Celebration) / Suburban War, sans aucun doute le meilleur moment de ce troisième album. Wasted Hours, un des passages les plus intimes et calmes de The Suburbs, vaut pour son clin d'œil - encore un ! - à l'auteur de Heart Of Gold mais se révèle transparent. Cela se confirme d'ailleurs par sa fin précipitée en « fade out » donnant à ce morceau le parfait profil d'intrus. Quant à Rococo, la chanson alterne d'excellents couplets où la production du disque fait merveille avec un refrain crispant. Arcade Fire ne peut donc pas s'en sortir avec les félicitations du jury à chaque tentative de diversification.
On revient vite à ce que le groupe fait de mieux : des hymnes robustes. Jamais personne ne se sera aussi explicitement nourri d'influences d'artistes majeurs comme Bruce Springsteen, U2, Depeche Mode ou David Bowie pour accoucher d'un style si personnel installant à son tour le collectif dans un rôle d'inspirateur pour les générations à venir. Arcade Fire vise la transcendance sur The Suburbs. Quoi de plus naturel, finalement, pour un groupe dont le premier album s'appelait Funeral ?
Line-up :
Win Butler
Régine Chassagne
Richard Reed Parry
William Butler
Tim Kingsbury
Sarah Neufeld
Jeremy Gara
Discographie :
Funeral (2004)
Neon Bible (2007)
The Suburbs (2010)
Tracklisting de The Suburbs (en gras les morceaux essentiels) :
1. The Suburbs 5:14
2. Ready to Start 4:15
3. Modern Man 4:39
4. Rococo 3:56
5. Empty Room 2:51
6. City with No Children 3:11
7. Half Light I 4:13
8. Half Light II (No Celebration) 4:25
9. Suburban War 4:45
10. Month of May 3:50
11. Wasted Hours 3:20
12. Deep Blue 4:28
13. We Used to Wait 5:01
14. Sprawl I (Flatland) 2:54
15. Sprawl II (Mountains Beyond Mountains) 5:25
16. The Suburbs (Continued) 1:27
Arcade Fire – The Suburbs
Merge
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