Blur – The Magic Whip

Les reformations de Blur et de System Of A Down ont eu en commun de faire attendre de la nouvelle musique. Les deux groupes sont actifs sur scène, y déploient de belles qualités mais ne parvenaient pas à franchir le pas en studio. Les anglais, à la surprise générale, ont finalement mis fin à six ans de spéculations en sortant The Magic Whip, leur premier album à quatre depuis 13, en 1999. Blur n'a jamais eu pour habitude de livrer des disques ratés mais les réflexes peuvent se perdre par manque d'entrainement. Heureusement, Albarn et Coxon ont pris très au sérieux cette nouvelle fournée de chansons...

The Magic Whip est parcouru par de multiples influences glanées par ses membres durant leurs années vagabondes. Le psychédélisme de Coxon s'infiltre à chaque occasion de faire vibrer sa guitare, les velléités vocales d'Albarn s'accordent en parfaite cohérence avec sa réalisation solo de l’an dernier, Everyday Robots, la basse de James galope avec son insouciance nineties tandis que Rowntree tient tout le monde en place, imperturbable. Et il n'a pas la tâche facile. Prenons par exemple Thought I Was a Spaceman. Ce morceau de science fiction folk contient autant de claviers rétro que de notes hébétées ou de xylophone en sourdine. Berceuse cosmique, ballade en orbite, rock aérien… nommez-la comme vous voulez mais son atmosphère vaporeuse fait honneur à son titre.

Il n'y a que peu d'instants réellement rock sur The Magic Whip. Lonesome Street possède le riff de guitare le plus « blurien » et les couplets à la Country House, avant un break où Coxon prend le micro, sont l’introduction idéale pour se remémorer tout ce que représente le groupe. Evidemment les célèbres « woo-hoo-hoo » sont de la partie. On n’oublie pas aussi facilement qui l’on est. I Broadcast est le titre qui essaie le plus désespérément de ressembler à du Parklife. Deux décennies plus tard, Blur parvient remarquablement bien à réinventer l'esprit alt rock qui l’animait à cette époque. Go Out, gonflé par des beats disco, rappelle un peu Gorillaz mais capture surtout une énergie brute, propre aux échanges étincelants entre les deux silex que sont Albarn et Coxon.

Le reste du disque oscille entre mid tempo berceurs et morceaux mutants comme le symphonique  There Are Too Many of Us. Ainsi, The Magic Whip est un album en constante progression, vif et créatif. Il rappelle souvent la démarche de David Bowie, autant dans le résultat final que dans le processus secret de fabrication. New World Towers ou Ice Cream Man sont à leur manière de beaux exemples de ce que peut aussi proposer Blur : de petites pépites aux accents enfantins mais terriblement chargés émotionnellement. Bien sûr, la thématique est loin d’être identique sur ces deux morceaux mais leur démarche gravite autour des mêmes gimmicks, ce savoir-faire DIY et cette insouciance légère qui transperce même les moments intenses tels que Pyongyang.

On a souvent écrit sur la rivalité entre Oasis et Blur durant les années 90. Il est amusant de constater que Blur s’est révélé le coureur de fond en doublant sur la durée les sprinteurs Oasis, définitivement hors course depuis leur split de 2009. Albarn et Coxon ont cueilli moins de succès que les frères Gallagher durant les années glorieuses. Mais en 2015, c’est bien Blur qui s’apprête encore à remplir Hyde Park et à récolter les fruits d’un nouvel album, sans doute pas intemporel mais n’empruntant jamais les sentiers de la facilité et donnant furieusement envie de réécouter tout leur back catalogue.

Line-up :
Damon Albarn (chant+claviers+guitare)
Graham Coxon (guitare+claviers)
Alex James (basse)
Dave Rowntree (batterie)

Discographie :
Leisure (1991)
Modern Life Is Rubbish (1993)
Parklife (1994)
The Great Escape (1995)
Blur (1997)
13 (1999)
Think Tank (2003)
The Magic Whip (2015)

Tracklist de The Magic Whip (en gras les morceaux essentiels) :
1.    Lonesome Street      4:23
2.    New World Towers      4:02
3.    Go Out      4:40
4.    Ice Cream Man      3:23
5.    Thought I Was a Spaceman      6:16
6.    I Broadcast      2:52
7.    My Terracotta Heart      4:05
8.    There Are Too Many of Us      4:26
9.    Ghost Ship      4:59
10.    Pyongyang      5:38
11.    Ong Ong      3:06
12.    Mirrorball      3:37


Blur – The Magic Whip
Parlophone
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