Interview Yarol Poupaud (FFF)

Publié le 06/12/2002 par Guitariste.com
Yarol et Cédric, respectivement guitariste et bassiste de FFF, animaient le 26 novembre un master-class à l'école de musique Atla. Entre deux riffs au groove irrésistible, les sympathiques musiciens ont livré leurs tuyaux et leurs anecdotes. Yarol revient aussi sur les débuts de l'un des plus grands groupes de "fonk" français.

Guitariste : Tu es venu ce soir avec une demi-douzaine de pédales. Peux-tu nous parler de tes effets ?

Yarol : Aux cotés de l'inévitable wah-wah, j'ai une petite pédale d'overdrive Tube Screamer. Ce n'est pas vraiment une grosse disto, mais elle permet de donner un peu de pêche à l'ampli, et un peu de sustain pour les solos. C'est une pédale qu'utilisait beaucoup le regretté Stevie Ray Vaughan. J'ai aussi une grosse fuzz, un modèle Roadrunner fabriqué à Nancy. Et la fameuse Whammy, que les guitaristes utilisent beaucoup pour monter dans les aigus. Mais on peut faire le contraire et descendre dans les graves. Ses fonctions d'harmonisation sont assez marrantes. J'aime aussi beaucoup le chorus. J'ai amené une pédale d'écho Electroharmonix. Cette pédale est analogique, elle donne un écho un peu crade par rapport à d'autres, mais avec un grain intéressant.

Cédric : Moi, pour le fuzz, j'ai une Big Muff. Cette pédale a une grande course dans les aigus...

Yarol : ...et elle a l'avantage de ne pas trop bouffer les graves.


(Cédric lance alors un riff de basse au groove prenant, qu'il fait lire en boucle grâce à un sampleur Akai. Yarol colle une rythmique funky, et c'est parti pour dix grosses minutes d'improvisation pêchue)

Guitariste : Comment créez-vous vos compos au sein de FFF ? A partir d'un riff que vous laissez tourner comme à l'instant ?

Yarol : Il n'y a aucune démarche prévue au départ. Chacun de nous peut proposer un refrain, un riff de clavier ou de guitare....Parfois quelqu'un arrive avec une chanson entière. Souvent, alors, on jamme, on jamme, et on jamme encore. On s'enregistre sur cassette, et on réécoute. Si, sur quatre heures de bandes, on repère dans un passage vingt secondes où il s'est passé quelque chose de génial, on les approfondit, on enrichit en s'enfermant dans notre studio jusqu'à plus soif. Mais il arrive parfois que même après cinq ou six heures, il ne se passe rien...

Guitariste : Des exemples de morceaux issus d'un jam comme celui-là ?

Yarol : ll y en a plein ! Barbès, par exemple.

Guitariste : Tu joues ici sur une Les Paul. Un grand amour ?

Yarol : Pas particulièrement, j'ai différentes guitares et je joue sur tout. D'ailleurs, cela faisait longtemps que je n'avais pas joué sur cette Gibson. Je n'ai pas d'attachement sentimental pour mes guitares, à part peut-être la première sur laquelle j'ai joué.

Guitariste : Tu ne préfères pas telle ou telle guitare, selon le son attendu ?

Yarol : Il ne faut pas croire que dès que je vais avoir envie d'un gros son en disto du type Marshall, je vais prendre la Les Paul, ou qu'en son clair ce sera la Telecaster. C'est même parfois le contraire, d'autant que la Les Paul a un très bon son clair. Sur les disques, le mélange de sons fait que tout se marie.

Guitariste : En studio, vous faites beaucoup d'overdubs, de prises de guitare superposées pour grossir le son ?

Yarol : Ca dépend. Il est arrivé qu'on n'ait rien à rajouter sur des prises "live" qui sonnaient bien au départ. Et si toutes les guitares ne sont pas bien en place, c'est vite le bordel !

Guitariste : Comment construis-tu tes solos ?

Yarol : Je ne suis pas vraiment un technicien. J'utilise des gammes de blues. Ma sensibilité fait que je suis spontané, assez direct. Autrefois, j'ai essayé de déchiffrer des solos de jazz, de bosser les gammes. Mais j'ai arrêté de me prendre la tête en me disant "ouais, attention, là je vais te passer un p'tit mode dorien...". Maintenant, je joue sur la gamme pentatonique à 90 %...

Guitariste : Et la théorie ?

Yarol : Si tu me donnes la partition d'Au clair de la lune sans le titre, au bout d'une semaine j'aurais fini par reconnaître les notes. Et là je reviens vers toi en disant que tu t'es foutu de ma gueule en me refilant ça ! Je ne sais pas lire la musique. L'harmonie et la construction des accords, ça me passionne. Mais dans nos arrangements, l'essentiel se fait à l'oreille.

Guitariste : Comment le succès est-il arrivé pour FFF ?

Yarol : Quand on a démarré, vers 1986, ce n'était pas facile. FFF mélangeait plein d'influences. Marco (au chant, ndr) a une super culture funk et R'n'B. De mon côté, j'ai apporté un coté rock. Les gens qui programmaient des groupes de funk à la Earth Wind & Fire nous trouvaient trop rock. Et on était trop funk pour les amateurs de rock ! Pour jouer à Paris, on s'est demmerdé tous seul, avec des potes. Personne ne voulant de nous, on a fini par téléphoner à la salle du New Morning et on s'est tous cotisé pour louer la salle. On faisait la promo et nos affiches nous-mêmes. J'ai dû emprunter de l'argent à mon père pour notre première maquette. Il a fallu faire des sacrifices et se prendre en main. Si tu restes chez toi à attendre, il ne t'arrivera rien ! Et puis, il faut être très motivé et sûr de ses choix. Si tu fais écouter un morceau, ne dis pas un truc du genre "bon celle-là n'est pas terrible, mais on peut améliorer les textes"...

Guitariste : Tes orientations musicales évoluent au fil du temps ?

Yarol : J'ai envie de m'intéresser à tous les styles, hip-pop, rock, techno...Je m'occupe beaucoup de production actuellement, avec un groupe de punk-rock. Je travaille par ailleurs avec un chanteur sur des titres calmes et un peu surréalistes. Je fais aussi une tournée acoustique avec mon frère, dans un style plutôt folk. De toute façon, dans ma discothèque, Nat King Cole côtoie Motorhead et Grand Master Flash. J'aime la diversité.

Guitariste : Qu'écoutez-vous comme musique en ce moment ?

Yarol : Yarol : Je suis content du fait que les groupes de rock reviennent à la mode. En funk, il y a longtemps que je n'ai pas entendu quoi que ce soit d'intéressant. Cela dit, j'aime bien des groupes de hip-hop comme Outcast, ou des gens comme Pharrell Williams de Nerd. Il est accompagné de musiciens connus sous le nom Spymob. Ils font un bon mélange entre les Beach Boys, les Beatles et le punk.


Cédric : Dernièrement, j'ai bien aimé Beck, en tout cas son avant-dernier album.

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