Storm Corrosion - Storm Corrosion

Publié le 05/11/2012 par Nicolas Didier Barriac
Nous étions sans nouvelles de notre interviewé préféré depuis de trop longs mois ! Steven Wilson (Porcupine Tree, No-Man, Blackfield, etc.) s'était accordé une courte pause avant de revenir avec un nouveau projet, Storm Corrosion, dans les tuyaux depuis des années. Avec son acolyte d'Opeth, Mikael Akerfeldt, il a créé un album riche d'ambiances et de mélodies tortueuses avant de revenir sans doute à sa carrière solo.
 Quand tu te lances dans un nouveau projet musical, est-ce que tu as toujours en tête le chemin que tu veux parcourir ? Car j'ai l'impression que sur Storm Corrosion, ni Mikael ni toi ne savaient précisément ce que vous vouliez faire avant de le faire (rires)...
Steven Wilson : Tu as raison. Sur mes projets, il n'y a pas de règle absolue. Pour Storm Corrosion, il est vrai que nous ne savions pas trop où nous allions. En tout cas, nous ne l'avions pas formalisé par des mots. Jusqu'à ce que l'album soit fini, nous ne savions pas vraiment quelle musique nous allions proposer. C'était un sentiment génial car l'album semblait venir sans mal « d'ailleurs ». Je n'aurais jamais pu prédire que nous allions faire un album dans cette veine. Je n'aurais jamais pu prédire que nous allions faire un album si peu rock. Toutefois, à l'écoute de Storm Corrosion, j'entends pas mal des influences « ésotériques » que Mikael et moi avons en commun. Ce sont des artistes et des albums que peu de gens connaissent mais qui sont très importants à nos yeux. Je n'ai pas trop envie de les nommer car cela enlève une grande partie du mystère... Storm Corrosion est plus proche de la musique orchestrale ou du folk que du rock.

Il fallait bien décider de cela à un moment aussi, non ? Ou alors est-ce la première chanson que vous avez faite qui a dicté la marche à suivre ?
S. W. : Oui, c'est certainement ce qu'il s'est passé. Drag Ropes nous a donné une direction, une base sur laquelle construire le reste. Nous n'allions pas nous mettre à faire du death metal tout d'un coup après ça (rires). C'est amusant de noter que les chansons du disque sont rangées dans l'ordre dans lequel nous les avons écrites.

Malgré la relative étrangeté de l'album, je trouve qu'on y entend toutes les influences que nous avions l'habitude de vous coller. Simplement, elles sont toutes jouées sous un prisme totalement différent. Du coup, à la fois pour toi, pour Mikael et pour votre public, ce disque est une expérience unique. Es-tu d'accord avec cette vision des choses ?
S. W. : Storm Corrosion est une véritable collaboration. Nous nous sommes mutuellement encouragés à penser de manière inédite. A plein de moments, nous aurions pu retomber dans un chemin tout tracé : il y a quelques riffs de guitare qui ne demandaient qu'à être rejoints par la batterie et le reste du groupe. Pourtant, nous n'avons pas fait cela. Nous avons évité l'évidence. Et cela a été rendu possible par la nature collaborative de cette œuvre où l'autre personne agissait comme un filtre. Nous nous sommes empêchés de retomber sur nos clichés car cela peut arriver à n'importe quel moment. Néanmoins, nos personnalités sont toujours là et il y a, sous le couvert de quelque chose de neuf, quelque chose qui ressemble beaucoup à Opeth / Steven Wilson. C'est certainement la touche qui attirera nos fans respectifs vers cet album et qui leur feront apprécier une musique très différente. C'est assez génial car cela signifie que nous pourrons faire ce que nous voulons et les gens entendront tout de même nos personnalités. C'est certainement l'enseignement qui me fait le plus plaisir à propos de ce projet.



Depuis le dernier Porcupine Tree, à l'exception du Blackfield, toutes tes compositions s'écartent des éléments pop et des structures formatées de « chansons ». Penses-tu revenir vers cela d'ici peu ?
S. W. : Je ne crois pas même si rien n'est jamais impossible. Je crois que le monde n'a pas besoin de quelqu'un d'autre pour écrire des chansons de trois minutes (rires). Je suis nettement plus doué pour les chansons cinématiques et longues. Grace For Drowning contenait quelques titres plus courts donc j'en mettrai toujours quelques-uns et j'en retirerai certainement une grande fierté mais ce n'est plus le propos principal. Mikael n'est pas très bon dans ce format-là non plus donc pour Storm Corrosion la question ne se posait même pas. Nous apprécions le fait de pouvoir raconter des histoires grâce au format d'un album de musique. Pour ma part, en vieillissant, dans ma manière de composer, je deviens de plus en plus... égoïste ! Les labels et les managers me poussent toujours à faire des chansons plus courtes et, s'il est vrai que par le passé j'en ai écrites quelques-unes de qualité, ça m'intéresse moins actuellement. Je veux faire des morceaux et des albums imprévisibles. C'est le problème des chansons conventionnelles : l'intro n'est même pas encore finie qu'on sait déjà ce qu'il va arriver ! On dirait que c'est comme aller voir un film et savoir d'avance ce qu'il va s'y passer. D'accord, c'est déjà ce qu'il se passe avec les films d'Hollywood (rires). Mais tu vois ce que tu veux dire ? Les films hollywoodiens sont hyper logiques, carrés et tout y est hyper compréhensible. Le cinéma européen peut vous laisser suspendu en plein milieu d'une phrase. J'aime cette idée appliquée à la musique.

La tournée de ton album solo a été hyper bien reçue et la demande est très forte partout dans le monde. Cela t'a surpris ? Car l'album était assez difficile d'accès et demandait pas mal d'efforts de la part des fans pour être apprécié à sa juste valeur...
S. W. : J'ai été surpris également. Néanmoins, j'étais confiant car je savais que c'était un des meilleurs disques que j'avais faits jusqu'à présent, si ce n'est LE meilleur. Par le passé, lorsque j'avais ressenti ce sentiment de confiance, parfois je suis tombé de haut et j'ai été déçu.

Personnellement, je ne pensais pas qu'il passerait si bien le cap de la scène. C'est surtout ça qui m'a surpris...

S. W. : Je n'étais pas certain non plus... Il fallait absolument que je trouve les musiciens adéquats pour y parvenir. Et c'est ce que j'ai fait. J'avais en tête une idée pour un show complet et pas seulement moi en train de jouer de la guitare et chanter. Le show est hyper cher à produire car il y a du son quadriphonique et beaucoup de visuels. Il y avait un gros risque de perte d'argent et d'être perçu comme un artiste prétentieux et abstrait. Mais je ressentais le besoin d'essayer ! J'ai de la chance car depuis quelques années, tout ce que je tente paie. Même le nouveau morceau solo que je joue sur la deuxième partie de cette tournée est hyper bien reçu par le public. Je me sens en état de grâce !

As-tu hâte de te frotter au nouvel album de Porcupine Tree ?
S. W. : Je n'y pense pas du tout pour être honnête ! Je serai à nouveau excité par un album de Porcupine Tree quand je sentirai le moment venu pour en faire un. Et clairement, ce n'est pas maintenant. J'ai presque fini d'écrire mon troisième album solo et c'est cela qui occupe toute mon attention actuellement. Lorsque Porcupine Tree reviendra ce sera avec un album qui réinventera le groupe de la même manière qu’avec Stupid Dream ou In Absentia.

Storm Corrosion – Storm Corrosion
Roadrunner
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