Fondateur de Laguitare.com en 1999, tu as voué de nombreuses années à la promotion de la lutherie artisanale. Depuis quelques temps, entre Salon de la Belle Guitare à Montrouge, co-fondateur de l’APLG et de l’European Guitar Builders (EGB), consultant à la CSFI (Chambre Syndicale de la Facture Instrumentale) notamment pour les mesures CITES, organisateur d’événements, conseiller pour les marques artisanales, ton activité s’est considérablement diversifiée. En bref, qui est Jacques Carbonneaux aujourd’hui ?
Il est difficile de répondre à cette question car je ne cesse d’avancer dans différentes directions, surtout depuis que je travaille à la CSFI pour tous les
Tu es à l’origine de ce projet “Osez la Musique“ porté par la CSFI, avec le soutien du Ministère de la Culture, qui aura lieu le samedi 23 juin, peux-tu nous présenter la genèse de cet événement ?
Je ne suis pas à l’origine d’OLM mais j’en suis le chargé de mission pour la CSFI qui a toujours eu des projets pour favoriser la pratique instrumentale en France. C’est le cas des
OAE (Orchestres à l’Ecole) que la Chambre a mis en place en 1999. Devenue autonome depuis 2008, l’association OAE, ainsi que le projet
DEMOS (Dispositif d’Education Musicale et Orchestrale à vocation Sociale) ont été identifiés cette année par la Ministre de la culture comme des leviers culturels pour nos enfants et je suis très heureux de l’aide de plus de deux millions d’euros que l’état leur a accordée cette année.
Cependant, la pratique instrumentale en France est loin d’atteindre un niveau comparable à celui de
OLM existe déjà depuis presque 10 ans à la CSFI mais j’ai proposé de l’adapter en nous inspirant du “The Learn To Play Day“ porté par l’association anglaise “Music for all“ et initié par la MIA (The Music Industries Association), l’équivalent de la CSFI en Angleterre, qui propose depuis plus de 7 ans une journée nationale où chaque magasin de musique participant offre un cours gratuit de pratique instrumentale à un public le plus large possible.
Connaissant bien la problématique de la désertification des magasins en France à cause de la progression sans cesse croissante de la vente sur internet (près de 30% en France), il m’a semblé opportun d’ajouter à l’aspect culturel du projet OLM, une dimension économique pour venir en aide aux revendeurs de proximité.
A quel public s’adresse “Osez la Musique“ ?
A tout public mais avant tout à celles et ceux qui n’ont jamais eu l’occasion, qui n’ont pas les moyens ou n’ont tout simplement jamais osé approcher un instrument en prenant un premier cours, une première initiation. Cette journée leur permettra de faire ce premier pas sans dépenser un centime.
Ensuite, j’ai souhaité que cette journée soit aussi l’occasion pour ceux qui pratiquent déjà un instrument de venir développer leur culture instrumentale (la dernière étude de marché montre bien la pauvreté de cette culture dans notre pays). L’objectif est de découvrir l’histoire de l’instrument, son fonctionnement, l’intérêt de son entretien et de ses réglages. Certains magasins vont donc proposer ce type d’ateliers en collaboration parfois avec un luthier local.
Quels sont les attentes et objectifs majeurs pour cette première édition de OLM ?
Sensibiliser le public et les magasins, c’est le premier objectif. C’est une première édition, qui plus est organisée en très peu de temps. Je n’avais pas terminé la 6ème édition du salon de la belle Guitare que la CSFI m’avait déjà missionné pour préparer cet événement ! La volonté des membres de la CSFI a été tellement forte que j’ai accepté de relever ce défi. L’objectif est avant tout de poser la première pierre d’un édifice ambitieux, de lister ensuite et rapidement les axes d’améliorations et de travailler au plus vite à l’édition 2019 car ne l’oublions pas, ce projet a pour ambition d’exister chaque année autour de la date de la fête de musique.
Pour le reste, je n’imagine rien, je ferme les yeux et j’avance !
Dans l’ensemble, quelle a été la réaction des revendeurs que tu as sollicités pour participer à ce projet ? A l’heure actuelle, combien y a-t-il de magasins participants ?
A ce jour, il y a 37 magasins qui participent à cette première édition. Ceux-là ont accueilli le projet avec un grand intérêt et proposent déjà en plus de leur activité de revendeur des leviers pédagogiques pour dynamiser le lien entre le musicien et la pratique musicale. C’est donc une bonne occasion de mettre en avant des initiatives qui portent déjà leurs fruits au quotidien.
Cependant, aussi par manque de temps et compte tenu des difficultés économiques qu’ils rencontrent, beaucoup de magasins sont sceptiques face à une telle initiative. C’est un projet à long terme qui avancera pas à pas et qui devra convaincre chaque année.
Quelles activités seront proposées au cours de cette journée du 23 juin ?
Elles sont nombreuses et couvrent pratiquement toutes les familles d’instruments de musique. Il y aura des cours d’initiation, des master-class, des ateliers entretien/réglages et découverte de l’instrument, la présentation de modèles spécifiques d’instruments, des rencontres avec des musiciens, des promotions sur des instruments et accessoires… Je vous invite à aller sur le site d’OLM pour consulter la liste
magasins participants et y découvrir toutes les prestations qui seront offertes pendant cette journée par les revendeurs.
On sait que la pratique instrumentale est un sujet qui te tient à cœur. De par tes diverses expériences, quel constat portes-tu sur le sujet ?
Le gros problème en France est cette habitude qui en a dégoûté plus d’un et qui consiste à apprendre le langage de la musique avant de pratiquer l’instrument. Didier Lockwood, qui nous a récemment quittés, avait présenté au précédent gouvernement un rapport qui préconisait la pratique de l’instrument avant de travailler le solfège. Qu’est devenu ce beau projet ?
De plus, l’art n’est pas à la portée de toutes les bourses. Certaines classes sociales sont exclues des pratiques artistiques d’où l’idée de remettre la pratique instrumentale à l’école, dès la primaire. Le nouveau gouvernement semble répondre à nos attentes avec son récent soutien aux projets OAE et DEMOS et également avec la création (enfin) du CNM (Centre National de la Musique) qui va permettre de regrouper tous les acteurs de la musique pour mettre en place une vraie politique musicale ambitieuse en France.
On entend et on lit souvent que le manque de guitar heroes pourrait être en partie responsable d’une forme de désintérêt des plus jeunes pour l’apprentissage de la guitare, le penses-tu aussi ou vois-tu d’autres raisons ?
Je ne suis pas convaincu de cette notion de Guitar hero. Je pense que c’est une question d’époque et d’évolution de la musique à travers les nouvelles générations de musiciens.
La guitare reste l’instrument le plus vendu et donc le plus joué au monde et les craintes qu’on a pu avoir sur la mort de la guitare électrique ont été balayées par les derniers chiffres du premier trimestre 2018 publiés par Music Trades sur les importations US qui montrent une augmentation de 66.2% pour les guitares électriques, 67.9% pour les ukuleles et 40.3% (<$299) pour les guitares acoustiques.
Quant au désintérêt des plus jeunes pour l’apprentissage, je préciserais “pour l’apprentissage des instruments dits traditionnels“. En effet, il ne faut pas négliger les nouvelles pratiques musicales avec notamment l’apparition de ces outils numériques qui prennent une place sans cesse croissante dans le parc des instruments de musique. La musique plaît aux jeunes et elle plaira toujours, mais ils veulent la pratiquer autrement et parfois de façon moins contraignante qu’avec un instrument traditionnel qui demande une maîtrise plus exigeante dans le rapport technique et d’inspiration.
Quel(s) conseil(s) donnerais-tu à quelqu’un qui souhaiterait (re)apprendre à jouer d’un instrument ?
Se lancer les yeux fermés, le cœur ouvert et l’esprit débordant d’imagination. La technique viendra inévitablement, si la passion domine. Osez La Musique a pour ambition de déclencher l’envie, à nous professionnels de les accompagner pour que cette envie devienne une réalité à long terme.
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