Les groupes combinant réussite technique et musicalité se font rares. No One Is Innocent fait partie de cette espèce en extinction et, au moment où le combo sort le surprenant Drugstore, on prend un certain plaisir à retrouver Shanka, le guitariste polyvalent et toujours passionnant des meilleurs amis de Johnny Rotten. Avant d’applaudir le groupe dans toutes les villes de France pour une longue tournée, entretien avec « le prof relou ».

Drugstore avait initialement été prévu pour le printemps 2010. Comment se fait-il qu'il ne sorte que début 2011 ?
Shanka : Nous avons tout simplement voulu nous réserver la possibilité de composer des titres supplémentaires, afin d'obtenir le meilleur tracklisting possible. C'est parfois plus sage de décaler le planning plutôt que de foncer tête baissée ! Par contre, nous avons fait une petite tournée qui nous a permis de tester les titres en live ce qui est très enrichissant et rejaillit forcément d'une manière ou d'une autre sur l'album.

Comment définirais-tu l'album par opposition aux autres opus de No One Is Innocent ?

S. : Comme tu le dis dans la question, chaque album de No One déconstruit le précédent ! C'est une démarche qui permet de réinventer le groupe à chaque fois. Ainsi, ni nous ni le public ne nous ennuyons puisque chaque nouvel album et chaque nouvelle tournée amène son lot de surprises et de prises de risques ! Ce nouvel album est à dominante électro-rock, mais dans une optique beaucoup plus « uptempo » que revolution.com. Les guitares s'effacent au profit des synthés, que nous avons voulus aussi énormes que des guitares ! C'est une démarche intéressante, d'autant plus que je suis depuis quelques années dans une recherche sonore permanente vis-à-vis de mon instrument. J'essaye de repenser la place de la guitare dans un mix en tentant de défricher de nouvelles manières de faire !

La fabrication et la composition de ce disque ont été semble-t-il légèrement différentes de vos autres albums. Tu confirmes ?

S. : Finalement, si la prédominance des machines nous a autorisés à travailler plus en home-studio (et nous sommes plutôt bien équipés en la matière) qu'en studio, le fonctionnement de base reste identique : on travaille en trio avec Kemar et K-mille, si, sur cet album, c'est surtout ce dernier qui a composé et arrangé les chansons. Du reste, c'est très classique : une démo puis des arrangements puis un texte puis des prises définitives...

Le titre Johnny Rotten a une histoire assez spéciale... Peux-tu revenir dessus pour ceux qui n'en ont pas entendu parler ?
S. : En fait, l'histoire est assez marrante : nous avons joué à un gros festival à Bobital avec les Sex Pistols en tête d'affiche. Dans les loges, l'organisateur a voulu provoquer une rencontre entre Kemar et Johnny Rotten, ce qui était assez sympathique sur le papier puisque le nom de notre groupe est également le titre d'une chanson des Pistols... Mais rien ne se passe comme prévu : Rotten insulte Kemar sans préavis, le ton monte et l'organisateur est forcé de les séparer... Et bien évidemment, tu imagines que c'est assez drôle d'en faire une chanson !

Vous présentez un duo avec Guizmo de Tryo. C'est facile de bosser avec un pote ? Pourquoi avoir choisi Guizmo et la chanson Qui Je Suis ?
S. : Guizmo est un ami depuis plusieurs années, c'est une personne qu'on apprécie beaucoup humainement et artistiquement. La musique étant une affaire d'amitié avant tout et le titre étant « raccord » avec son style musical, cela est apparu comme une évidence.

Que penses-tu de l'absence de débat sur les questions culturelles dans la classe politique actuelle ?

S. : Quand on élit des beaufs, il ne faut pas s'étonner que la culture tombe dans l'oubli... Il suffit de regarder dans le métro et de faire un rapide rapport entre le nombre de publicités pour des raviolis, d’affiches pour des pièces de théâtre de boulevard genre "Accroche toi à mon slip, j'enlève mes roubignolles" ou des spectacles comiques et le nombre d'affiches de concert !

Tu as fait des études d'économie. As-tu parfois la nostalgie de la vie dans une banque (rires) ?

S. : Non, pas une seule seconde ! Je préfère la vie de pirate ! (rires et pleurs entremêlés)



Tu as été contributeur chez Guitar Part. Tu as aimé cette expérience ? Qu'en gardes-tu aujourd'hui ?
S. : Cela a été une expérience exceptionnelle ! Voir sa pédagogie jugée par des dizaines de milliers de personnes chaque mois m'a permis de travailler mes méthodes de manière très intéressante. Faire les DVDs était vraiment pénible, tant au niveau horaires de travail que de la préparation que cela demandait, mais on rigolait vraiment bien tout en étant super exigeants quant au fond pédago. J'ai gardé de nombreux amis ex-Guitar Part et les gens me reparlent des DVDs quotidiennement ! Mon plus grand moment de gloire a été lorsqu'un jour dans le métro un type m'a interpelé en criant : "HEY C'EST LE PROFESSEUR RELOU!!!" Ceci dit, je me suis plus tourné vers l'écriture de méthodes. Ce format me semble un peu plus gratifiant car il s'inscrit dans la durée là où Guitar Part était un magazine mensuel... J'ai sorti une méthode de guitare rock en deux volumes avec JJ Rebillard, un des fondateurs de Guitar Part, la boucle est bouclée!

Tu es familier avec guitariste.com / Guitare Live ?

S. : Tout à fait, j'ai déjà été "parrain" d'un défi ! C'est un site de référence pour tous les guitaristes !

Quel matos as-tu employé pour l'enregistrement de Drugstore ?
S. : Essentiellement ma Telecaster standard et des petits amplis (zvex nano head, pignose, mini-marshall, petits combos divers...). Sur scène, je vais surtout jouer sur orange avec ma nouvelle guitare Roadrunner. C'est un modèle custom, la "14-18", avec une cellule de micro d'harmonica incrustée dans la corne supérieure et un theremin optique en-dessous du bridge, le tout dans une forme de Jazzmaster équipée en TV Jones... C'est la guerre ! Laurent (Hassoun) m'a convaincu des qualités du manche huilé, c'est un vrai bonheur, même pour le shred.

Quels sont les plans de No One Is Innocent pour les prochains mois ?

S. : Tourner, tourner, tourner ! No One est un groupe hyper agréable sur la route, chaque concert est unique et l'ambiance est toujours fun.

No One Is Innocent - Drugstore
Naïve
www.nooneisinnocent.net 
No One Is Innocent et Shanka le professeur Relou