Qu’il semble loin le temps où Angels Fall First sortait avec un son brut, amateur et son foisonnement d’idées mal exploitées. Nightwish joue désormais dans la cour des grands, à Bercy, à la Halle Tony Garnier et au Zénith de Nantes, où le public français découvrira en 2012 les chansons épiques et flamboyantes d’Imaginaerum, un concept album porté par… un long métrage. Rien que ça. Si ce dernier ne verra le jour qu’au printemps de l’année prochaine, l’album est quant à lui déjà prêt. C’est la raison pour laquelle le bassiste-chanteur Marco Hietala était présent pour nous en dire davantage sur ce chapitre essentiel de la carrière des Finlandais.

Nightwish semble se complaire dans les albums de plus en plus épiques. Imaginaerum ne fait pas exception. Tu ressens ce besoin de repousser les limites de la part de Tuomas ?
Marco Hietala : Je vois ce que tu veux dire mais tu sais, personnellement, je suis trop content de la tournure prise. Je suis très fier de faire partie de ce groupe car les membres sont très ouverts d’esprit et ils ne laissent aucun préjugé se frayer un chemin dans leurs pensées et devenir des obstacles dans l’écriture de chansons. Nous faisons tout ce que nous voulons avec nos albums. Notre objectif est de créer quelque chose de grand qui passe par des hauts et des bas en termes de ressenti sonore et je crois qu’Imaginaerum laisse parfaitement entendre ce genre de choses. Il y a effectivement des passages que l’on peut qualifier d’épiques. Je suis tout à fait d’accord avec ça (rires) !

Le mot « épique » ne concernait pas uniquement la musique. Vos concepts et les idées autour de l’album semblent également être de plus en plus grandiloquentes puisque cette fois-ci vous faites carrément un film ! Vous ne faites plus d’albums comme la plupart des groupes de metal…
M. H. : Nous avons déjà fait quelques albums dans cette veine qui nous ont servi de tremplin. Nous avons réfléchi à la manière de démarquer Imaginaerum de nos précédents disques. Rapidement, Tuomas a pensé faire des clips pour tous les morceaux. Nous pourrions alors révéler les clips au fur et à mesure et dévoiler tout le concept visuellement. Stobe Harju, le réalisateur du clip de The Islander, nous a expliqué qu’avec le budget de douze ou treize clips nous aurions intérêt à faire un film. Il avait raison et nous avons immédiatement suivi son idée. Nous avions la possibilité de tenter cette aventure et nous devions la saisir car rien ne dit qu’elle se représentera.

A force de surenchérir, vous allez fatalement devoir un jour revenir à quelque chose de plus basique ou minimaliste. Tu en as conscience, tu y penses ?
M. H. : C’est inévitable en effet sinon nous serions obligés de faire un concert dans une navette spatiale retransmis en streaming ! Je n’ai rien contre cette idée, soit dit en passant (rires). Plus sérieusement, nous atteindrons forcément une limite à un moment et il faudra revenir aux bases. Toutefois, Nightwish reste un groupe de musiciens qui se focalise sur la musique. Nous essayons d’être aussi honnêtes que possible. Toutes les idées créatives que nous utilisons sont des aides que nous employons pour mettre en valeur la musique. Je doute que nous fassions systématiquement un film à chaque nouvel album.

Imaginaerum semble comporter plus d’interventions vocales de ta part. Comment se crée la dynamique entre tes parties de chant et celles d’Anette ?

M. H. : Je pense que je suis présent sur davantage de morceaux mais pas forcément plus longtemps en durée totale. Les paroles guident en grande partie qui doit chanter quoi. Tuomas a forcément une idée très précise de la chose lorsqu’il compose tout ça. Les chansons d’Imaginaerum existent à l’état de démo depuis l’été dernier. Il y a des versions où je chante tout et d’autres où Anette chante tout. Cela a donné une bonne idée à Tuomas de ce qu’il convenait de faire car en fin de compte c’est lui qui décide. La dynamique entre Anette et moi n’est pas très dure à trouver car nous sommes tous les deux assez polyvalents. Il faut surtout trouver le bon groove qui convient aux morceaux. Nous avons mis plus de temps à faire les démos que l’album en lui-même, ce qui est une preuve que nous avons fait nos devoirs avant de rentrer en studio (rires).

Comme à chaque fois tu es crédité dans l’écriture d’une chanson (The Crow, The Owl & The Dove). Comment se fait-il que tu ne contribues jamais plus que cela (deux morceaux au maximum). Tuomas ne te permet pas de dépasser un certain « quota Hietala » (rires) ?
M. H. : Je ne sais pas trop, en fait (rires). Ce coup-ci, je n’étais pas très inspiré. Je n’ai donné à Tuomas qu’une seule vraie chanson et quelques riffs. The Crow, The Owl & The Dove date d’avant les sessions du nouvel album et Tuomas connaissait déjà ce titre. Je le jouais souvent dans les coulisses des shows de Dark Passion Play car il me plait. Il m’a aidé à transformer mon idée en morceau. Je ne suis pas frustré car il y a un réel sens démocratique au sein de Nightwish. Nous avons passé des mois à uniquement répéter et envisager les arrangements des morceaux. Nous nous sommes tous super bien entendus. Personnellement, il n’y a qu’une fois, lors de l’enregistrement de Dark Passion Play, où je me suis emporté envers les autres. C’est peu !

Imaginaerum contient pas mal de guitares acoustiques et cela contribue à la diversité des ambiances proposées. C’était un élément facile à placer dans vos compositions car nous n’avons pas été trop habitués à cela par le passé ?
M. H. : Cela a été relativement facile. Le problème est que ces éléments acoustiques contraignent légèrement les concerts. Les influences celtiques et acoustiques sont hyper importantes pour nous. Personnellement, j’ai été happé par les chansons irlandaises quand j’étais petit. Du coup, ces éléments reviennent de façon naturelle dans notre musique. Heureusement, avec le temps et l’expérience, nous avons appris à les utiliser à bon escient.

Vous allez donner quelques concerts l’année prochaine en France dans des salles plutôt… grandes (rires). Imaginaerum est l’album parfait pour être adapté sur scène. Est-ce que le but pour vous sera de retranscrire le film sur scène ou s’agira-t-il de deux choses bien distinctes ?

M. H. : Nous avons décidé d’aller à Bercy quand nous avons fait deux Zénith complets la fois passée, donc pourquoi pas ? Nous n’allons pas pouvoir « adapter »le film tout simplement car il ne sera pas sorti pour le début de la tournée mais seulement quelques mois plus tard vers avril ou mai. Nous espérons tout de même avoir quelques extraits à projeter sur des écrans géants. Pendant l’été nous pourrons peut être adapter le show car il y a des jours de répit que nous pourrons utiliser pour cela. Mais je pense que globalement, le film, l’album et les concerts seront des expériences assez différentes les unes des autres.

A quoi ressemblerait un album solo de Marco Hietala ?

M. H. : Il y aurait sans doute pas mal de guitare acoustique car j’en joue beaucoup. C'est d'ailleurs l'instrument que je pratique le plus quand je suis chez moi. La basse ne permet pas vraiment de composer et de « palper » les chansons. L'album serait également un collage de différents styles. Je ne pense pas qu'il y aurait trop de sons distordus ou indus.

Un album à la Ulver, vieille époque ?

M. H. : Oui, j'adore ça ! Mais j'aurais peut-être envie de ramener de la puissance de feu dans la musique donc je ne sais pas trop au final à quoi ça ressemblerait (rires) ! Ca serait peut être du folk indus avec du chant très hargneux (rires).



Nightwish - Imaginaerum
Nuclear Blast
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Le son et lumière par Nightwish