Chris Garrel : Dreamcatcher, dont je suis le chanteur et fondateur, vient de sortir son premier album Emerging From The Shadows. Nous évoluons dans un registre heavy/thrash auquel viennent se mêler des ambiances progressives. La création du groupe remonte à 2001, mais en 2008 nous avons pris un nouveau départ et trouvé la stabilité avec l’arrivée de Denver et Geoff aux guitares, de Rado à la basse et Nico à la batterie.
Quel est ton parcours musical personnel ?
C. G. : La découverte du premier album d’Iron Maiden, en 1980, alors que j’étais adolescent, a littéralement changé ma vie. C’est vers cette période que, fortement inspiré par leur musique et la personnalité de leur leader Steve Harris, j’ai commencé à faire mes premières armes en groupe en jouant de la guitare avec des potes. Un jour, l’opportunité de chanter s’est offerte à moi et c’est ainsi que ma vocation est née. Au fil des années, j’ai été à l’origine de plusieurs formations telles que Sunset Childz ou Dreadline avec lesquelles je me suis produit régulièrement sur scène mais qui n’ont jamais dépassé le stade de la démo. Dreamcatcher est le projet le plus abouti auquel j’ai participé tant par sa longévité que par le sérieux de notre entreprise.
Pourquoi ce titre, Emerging From The Shadows ?
C. G. : C’est une citation extraite des paroles d’une de nos chansons People Of Darkness. Lorsqu’il s’est agit de trouver un titre pour l’album, c’est celui-ci qui s’est imposé assez rapidement. La sortie de l’album nous offre une exposition médiatique inédite car, jusqu’à présent, le nom de Dreamcatcher n’était connu que d’un public relativement restreint. Nous aimons cette image du groupe tapi dans l’ombre, fourbissant ses armes en attendant son heure, car elle nous correspond assez bien.
On entend sur Emerging From The Shadows des influences d'Iron Maiden, Nevermore ou encore Iced Earth. Ce sont des groupes que tout le line-up apprécie ou c'est simplement ce qui résulte de votre alchimie ?
C. G. : C’est avec l’album The Dark Saga que j’ai découvert Iced Earth. Depuis, c’est avec le plus grand intérêt que je suis leur carrière. Comme tu l’auras compris, je cultive un amour immodéré pour Iron Maiden. Les autres membres du groupe partagent à plus ou moins haute dose cette passion. Geoff possède des influences heavy, mais il apprécie aussi des groupes plus extrêmes comme Machine Head ou Arch Enemy. Saxon est le groupe fétiche de Denver par ailleurs grand fan de Randy Rhoads. Rado, le bassiste, aime beaucoup Queensrÿche, Evergrey ainsi que Dio. Nico, le batteur et aussi le plus jeune d’entre nous, est quant à lui plus sensible aux sonorités modernes de groupes tels que Meshuggah ou Fear Factory. Ce que nous écoutons influe forcément sur notre manière de composer et j’imagine que tout ça doit se doit retrouver dans la musique de Dreamcatcher.
L'album oscille toujours entre heavy et thrash et fusionne ces deux courants
C. G. : Ces deux styles ont en commun de poursuivre cette même quête du riff qui tue, celui qui fera headbanguer les hordes métalliques. Ils font la part belle à la six cordes et permettent aux guitaristes d’exprimer leur talent et leur fantaisie tant en solo que rythmiquement. En schématisant, je dirais que j’apprécie le heavy pour l’aspect mélodique et le souffle épique de ses compositions et le thrash pour son côté direct et rythmique.
Comment résumerais-tu Emerging From The Shadows ? Y avait-il une ambition particulière à sa conception ?
C. G. : L’enregistrement d’un album est une aventure collective, notre volonté était de mettre en commun nos expériences et nos sensibilités musicales afin d’apporter notre pierre à l’édifice. Notre objectif est de créer une musique qui nous plaise avant tout; une musique qui soit à mi-chemin de plusieurs de nos styles de prédilection. Notre volonté est que ce cocktail puisse séduire les amateurs du genre. Actuellement, l’industrie musicale traverse une crise sans précédent et il devient de plus en plus difficile de vendre des disques. Nous avons souhaité proposer un bel objet sous la forme d’un digipack et d’un livret afin de donner envie au potentiel acquéreur d’acheter notre album plutôt que de le télécharger illégalement. Par ailleurs, nous espérons qu’avec ce nouvel album à notre actif, les opportunités de jouer sur scène se feront plus nombreuses.
Je trouve la qualité sonore et la production d'Emerging From The Shadows un peu décevantes. Est-ce une volonté de votre part d'avoir un son assez cru ou plus un manque de moyens que vous espérez rectifier pour le second album ?
C. G. : Notre souhait était de proposer un album qui nous ressemble, fidèle à la manière dont nous sonnons en « live », tant pour les instruments que pour la voix. Ce choix peut paraître éloigné des standards actuels, je te l’accorde, mais j’ai parfois le sentiment que de nos jours, certains albums sont surproduits. Des tonnes de guitares, des voix doublées, des batteries triggées… J’ai du mal à m’y retrouver et j’avoue être nostalgique des productions d’antan. Je pense en particulier à des albums tels que Powerslave ou The Number Of The Beast. Qui sait, si avec plus de moyens, nous n’aurions pas été tentés d’aller débusquer Martin Birch de sa tanière pour lui demander de reprendre du service et produire Emerging From The Shadows… Après, oui forcément, nous tenterons de nous améliorer sur le prochain album, mais je ne pense pas que notre manière d’aborder les choses changera fondamentalement.
A propos du second album : que souhaites-tu faire de différent sur celui-ci ?
C. G. : Lorsque le line-up a été renouvelé à 80 % en 2008, les structures des chansons de l’album étaient déjà écrites et nous nous sommes avant tout concentrés sur leurs arrangements en vue du passage en studio d’enregistrement. Nous travaillons d’ores et déjà à donner un digne successeur à ce premier opus. Cette fois-ci, chaque membre du groupe s’impliquera dans son écriture. En revanche, vous devrez patienter un peu avant sa sortie. Nous ne souhaitons pas trop nous hâter et désirons peaufiner ces futures compositions et leur laisser le temps de mûrir afin quelles puissent soutenir la comparaison avec celles de Emerging From The Shadows.
Quel regard portes-tu sur la scène rock et metal en France ?
C. G. : Je crains que mes connaissances de la scène rock française soient trop limitées pour que je puisse t’apporter un avis éclairé sur la question. Concernant la scène metal, j’observe que de nombreux styles y sont représentés. Vu le nombre sans cesse croissant de groupes qui sortent des albums, je constate également qu’elle est très active. Toutefois, tout n’est pas rose dans notre microcosme. En France, j’ai le sentiment que le genre n’est pas suffisamment rentable économiquement parlant pour pouvoir se développer et évoluer sereinement. Ainsi ce courant musical et ceux qui le composent manquent cruellement de moyens. Cette scène est selon moi surtout animée par des amateurs passionnés et quelques rares professionnels motivés qui luttent en permanence pour leur survie. Je trouve vraiment dommage que ce manque de sérénité soit un frein à un développement harmonieux. Nous pourrions tous être acteurs de son essor, au lieu de rester le nez collé devant son écran d’ordinateur, on ferait mieux d’aller assister à des concerts et d’acheter la presse spécialisée et des albums.
Quel matériel de guitare a été employé sur Emerging From The Shadows ?
Geoff : Depuis plusieurs années, j’ai développé un intérêt grandissant pour la lutherie, ce qui m’a conduit à fabriquer mes propres guitares. En concert je joue sur un des modèles que j’ai créé. C'est une forme Stratocaster avec un corps en noyer et un manche traversant en teck sur laquelle j’ai monté des micros Dimarzio PAF Pro côté manche et Super Distorsion côté chevalet, plus un micro simple Jackson au milieu. J'ai repris la configuration de la guitare de Dave Murray d’Iron Maiden dans les années 80. Il a eu une très forte influence sur mon jeu de guitare. J’apprécie son style à la fois rapide, fluide et mélodique.
J’ai eu l’opportunité d’utiliser une Fender Stratocaster signature Dave Murray pour enregistrer l’album. J’ai conservé la configuration d'origine, micros DiMarzio PAF 36th Anniversaire DP103 pour le manche, DiMarzio Super Distorsion DP100 pour le chevalet et micro simple bobinage Fender de type vintage au milieu. En ce moment je travaille à la fabrication d'un modèle qui aura la forme d’une Jackson Randy Rhoads avec un corps et un manche traversant en acajou et des micros EMG 81TW et 89 (splitable tout les deux).
Denver : Je voue un culte à Gibson et je suis l’heureux propriétaire de plusieurs modèles de la firme américaine. Pour l’album, j’ai utilisé une Les Paul Classic Custom Shop (de 2001, que j'ai d'ailleurs tatouée sur mon biceps droit) sur laquelle sont montés des micros Gibson Classic 57 Zebra (noir et blanc) corps en 1 seule pièce, un petit bijou, et une Explorer Pro équipée de micros Gibson 496 et 500T. En revanche, la version acoustique de "How Much I Miss You" a elle été enregistrée sur une Cort MR710F.
En concert, je joue de préférence sur mes Gibson et particulièrement sur ma SG Standard Heritage Cherry montée de Humbucker Standard 490R et 498T (de 2009) et mon Explorer Limited Edition, équipée elle aussi de micros Gibson 496 et 500T, finition naturelle (de 1999) dans une tête ENGL Fireball équalisée tout à 6 et reliée à un baffle Marshall 1960A, sans aucun effet ni même reverb’ (absente de la tête d'ampli), à l'ancienne quoi... Direct dans l'ampli, juste un petit accordeur Boss TU2 et le footswitch...
Dreamcatcher - Emerging From The Shadows
Brennus Music
www.dreamcatcherfrance.com